Théâtre: ‘’Si tu sors, je sors’’, entre défiance, méfiance et confiance

Après avoir ébloui des scènes internationales comme celles du Festival d’Avignon et des Francophonies en Limousin de Limoges (France), ou d’Instituts français tels que celui de Ouagadougou (Burkina Faso) et Lomé (Togo), entre autres, la pièce « Si tu sors, je sors » est attendue avec ferveur par les amoureux des planches à l’Institut français de Côte d’Ivoire à Abidjan-Plateau. Ce sera le 23 mars, en soirée. Mais, déjà, que de bons points pour cette œuvre, plus déclamée que jouée et que la critique encense.

Morceau choisi du texte avant d’entrer dans la trame actancielle et du discours: « Ne me dites pas que c’est une coïncidence. Un pagne qui n’a pas de nom, à notre époque, ça n’existait pas. Et quand tu vas au marché, ce n’est pas le pagne que tu achètes. C’est le nom que tu achètes. Et ça, c’est très clair, et tout le monde le sait… ».

« Si tu sors, je sors », « Ton pied mon pied », « L’œil de ma rivale », « Thomas Sankara », tels sont quelques noms des célèbres pagnes africains qui ont fait la fortune des grossistes de ce commerce en Afrique de l’ouest et donné naissance à de véritables dynasties de grandes commerçantes: les Mamies du Ghana, les Nana Benz du Togo et du Bénin, les Bueyem Sellem du Cameroun.

Si sous différents cieux, les tissus ont servi ou servent encore à communiquer, l’Afrique est le continent où cet art est le plus raffiné, au point que ces pagnes à messages (sociétaux, politiques...) sont devenus un marqueur identitaire africain. Et pourtant, ils sont nés en Hollande (Île de Java, Indonésie). Qu’est-ce qu’ils nous racontent de notre monde, de nos manières d’être ?

Le pagne, marqueur identitaire et tout une histoire…

Les pagnes à messages sont devenus un marqueur identitaire africain. Les auteurs togolais Gustave Akakpo et Marc Agbedjidji co-géniteurs de « Si tu sors je sors » avec à la lecture et à l’interprétation Aminata Abdoulaye, Marc Agbedjidji, François Ebouélé et Sophie Sénécaut, entendent nous faire partager anecdotes, intrigues et autres scènes de ménage autour de l’étoffe précieuse.

Et pourtant, il est le fruit de conquêtes, d’emprunts, de métissages, venus de nombreuses cultures. Les wax sont surtout le véhicule d’un ensemble de messages sociétaux émis par les motifs. Symbole de lien social, d’appartenance ou de résistance, d’adhésion ou de défiance, le pagne s’exprime. Messager féministe, le wax « Si tu sors, je sors » rappelle que là où l’homme va, la femme peut aller également !

Gustave Akakpo et Marc Agbedjidji se sont emparés de l’histoire des wax et des Nana Benz du Togo pour dérouler, en musique et sans façon, un discours politique et sociétal sur le Togo, mais aussi l’Afrique, son histoire, son (ses) peuple (s), sa (ses) relation (s) à l’Occident. Un point de vue inattendu, un spectacle haut en couleurs.

Né en 1974 à Aného (Togo), Gustave Akakpo est auteur, conteur, comédien. Il a participé à plusieurs résidences et chantiers d’écriture, au Togo, en France, en Belgique, en Syrie. Animateur culturel, il préside l’association « Escale des écritures » créée à la suite de chantiers d’écriture organisés au Togo par l’association « Écritures vagabondes ». Il coordonne également le comité de lecture du Tarmac, scène nationale francophone à Paris. Gustave Akakpo a reçu de nombreux prix.

Quant à Elemawusi Marc Agbedjidji, né en 1985, après des études d’anthropologie à l’université de Lomé, il débute le théâtre en 2004 et se forme au jeu d’acteur, scénographie, mise en scène, écriture et en performance théâtrale.

Il participe en tant qu’auteur au Laboratoire de recherche artistique Récréâtrales – Elan, sous la direction de l’Ivoirien Koffi Kwahulé et Carole Fréchette, à Ouagadougou. Elemawusi Marc Agbedjidji a joué également dans des mises en scène d’Anne Tismer, Alfa Ramsès, Rodrigue Norman, Souleymane Koly, etc. Il met en scène Les monologues du Vagin, de Eve Ensler en 2009, revisité en 2010 avec l’appui de l’Institut Français du Togo.

REMI COULIBALY