Leonarda n’est pas Marie–France

Leonarda Dibrani
Leonarda Dibrani
Leonarda Dibrani

Leonarda n’est pas Marie–France

Leonarda n’est pas Marie–France

Quelle différence y a-t-il entre un Jean-Marie Le Pen affirmant: « Ce phénomène angoissant nous impose ses coutumes, ses mœurs, sa religion et nous vole nos âmes (...) La marée de l’immigration va nous submerger après nous avoir ruinés.»(Paris, le 1ermai 1996) et la décision à la Salomon du Président François Hollande face à l’expulsion controversée de Leonarda Dibrani et de sa famille ? Au cas où vous auriez raté la série: une adolescente de 15 ans, Leonarda, Rom (appellation générique des gens du voyage et des sans-papiers semi-nomades vivant dans les campements et les camping-cars) kosovare est interpellée, le 9 octobre, devant ses camarades de classe, en sortie scolaire à Sochaux. Ensuite, sa famille et elle, arrivées illégalement en France, le 26 janvier 2009, sont expulsées au Kosovo, à Mitrovica.

Enseignants, parents et associations contestent les expulsions et réclament, par la même occasion, une sanctuarisation de l’école. Enfin, pour certains d’entre eux. Puisque 65% des Français refusent une éventuelle annulation du renvoi de la collégienne et de sa famille ainsi que leur retour en France, selon un sondage BVA publié, le samedi 19 octobre, par Le Parisien - Aujourd’hui en France.

Vox populi, vox Hollande? Évidemment. Le chef, entre fermeté et humanité, a fait comme le sage Salomon: il a coupé la poire en deux, kif-kif. Leonarda, si le cœur lui en dit, pourrait revenir, elle et elle seule, poursuivre sa scolarité en France où elle sera (bien) accueillie. Conformément à la sauvegarde du modèle social et culturel français. La sortie n’est guère surprenante. Le chômage, les difficultés des ménages, le nombre croissant des personnes en situation de précarité et les budgets sociaux en berne fixent les priorités. Sur ce ring, la gauche et la droite sont comme des uppercuts dont les frappes signifient clairement que la France ne peut ni ne doit recevoir toutes les Leonarda à qui elle n’a plus grand’ chose à offrir. Il n’y a, pour la majorité des Français, ni xénophobie, ni racisme. Juste du bon sens.

Les poussées extrémistes ne sont pas un label exclusif sur les bords de la Seine. Elles essaiment toute l’Europe et traduisent un malaise profond auquel les pays ont du mal à faire face. Les pleurs de ceux qui ont minimisé la réalité des expulsions et qui ne veulent pas leur poursuite n’ont pas étouffé la voix majoritaire des Gaulois qui réclament que les rapatriements continuent. Mais peut-on s’émouvoir de la mort des noyés de Lampedusa, comme ce fut le cas, sans faire le lien moral avec l’accueil des réfugiés et oublier que la France s’est construite sur l’immigration ? La droite se frotte les mains pour l’instant: si Hollande avait appelé la famille à revenir, elle aurait certainement crié à l’invasion et serait montée au créneau; s’il n’avait laissé aucune possibilité de retour à la collégienne, cela aurait donné lieu à un gros rire victorieux et moqueur. Mais pourquoi Leonarda et pas sa soeur âgée de 17mois et née en France?

La réponse de l’adolescente est sans équivoque: «Je n’irai pas seule en France, je n’abandonnerai pas ma famille. Je ne suis pas la seule à devoir aller à l’école, il y a aussi mes frères et mes sœurs ». Voici un drame de la synthèse des inconciliables rendant l’accès du pays qui s’honore d’avoir inventé les droits de l’homme aussi improbable que l’équilibrisme du truculent Maître Jacques dans L’Avarede Molière qui passe du père au fils en donnant raison aux deux. Mais Maître Jacques finit par être roué de coups. Alors, je repose ma question: qu’est-ce qui change, de la droite à la gauche ? La perspective pardi, la perspective ! Ou plutôt la rudesse des coups.

Par OUMOU D.

oumou.dosso@yahoo.fr