La chronique de Venance Konan : Après l’horreur ?

A Palestinian man walks amidst rubble from buildings damaged during Israeli bombardment, in Beit Lahia in the northern Gaza Strip, on May 20, 2021. - Israel and the Palestinians are mired in their worst conflict in years as Israel pounds the Gaza Strip with air strikes and artillery, while Hamas militants fire rockets into the Jewish state. (Photo by Mohammed ABED / AFP)
A Palestinian man walks amidst rubble from buildings damaged during Israeli bombardment, in Beit Lahia in the northern Gaza Strip, on May 20, 2021. - Israel and the Palestinians are mired in their worst conflict in years as Israel pounds the Gaza Strip with air strikes and artillery, while Hamas militants fire rockets into the Jewish state. (Photo by Mohammed ABED / AFP)
A Palestinian man walks amidst rubble from buildings damaged during Israeli bombardment, in Beit Lahia in the northern Gaza Strip, on May 20, 2021. - Israel and the Palestinians are mired in their worst conflict in years as Israel pounds the Gaza Strip with air strikes and artillery, while Hamas militants fire rockets into the Jewish state. (Photo by Mohammed ABED / AFP)

La chronique de Venance Konan : Après l’horreur ?

Le 10/10/23 à 09:16
modifié 10/10/23 à 09:16
Après l’horreur ?

L’horreur. Il n’y a pas d’autre mot pour qualifier ce qui est arrivé à Israël depuis le samedi 7 octobre. Des centaines de femmes, de jeunes gens, d’enfants, de vieilles personnes, tous sans défense, mais aussi des soldats, massacrés sans discrimination, ou enlevés. Cela ne peut qu’être condamné avec la dernière énergie. Jusqu’alors les mouvements de lutte palestiniens nous avaient habitués à quelques tirs de roquettes sur Israël qui tuaient ou blessaient quelques personnes, entraînant toujours un retour de bâton très musclé de la part de l’État hébreu.

Cette fois-ci, le Hamas a atteint des niveaux que personne ne pouvait soupçonner dans l’horreur. Et tout le monde s’attend à une riposte de la part d’Israël que l’on imagine très violente, sanglante. Tous ses alliés, à commencer par les États-Unis et les Européens, lui ont donné le feu vert. Israël a déjà annoncé un blocus total : pas d’électricité, pas d’eau, pas de nourriture.

Alors, ce sont des femmes, des jeunes gens, des enfants, des vieilles personnes, tous sans défense, qui vont être massacrés. Nous devons aussi condamner cela avec la dernière énergie. Un État a-t-il le droit de se venger sur des personnes innocentes ? Un État qui se venge de cette façon ne se met-il pas moralement au même niveau que les terroristes qu’il combat ?

Bien sûr l’État d’Israël imputera la responsabilité et les conséquences de sa riposte au Hamas. Tout comme ce dernier impute son attaque au comportement du gouvernement israélien. Arrivera-t-on à sortir un jour de ce cycle de haine ?

Les deux leçons que l’on devrait tirer de ce séisme sont, d’abord, la destruction du mythe de l’invincibilité de l’armée israélienne, et ensuite, le rappel aux opinions publiques, israélienne et internationale, surtout arabe, que le Palestinien ne se dissout pas dans les accords entre Israël et certains pays arabes. Depuis les guerres de 1948, puis surtout celle dite des « six jours » en 1967, l’État d’Israël avait acquis la réputation d’avoir l’une des meilleures armées et l’un, sinon le meilleur service de renseignement du monde.

Ces deux atouts lui avaient permis de mettre au pas tous ses voisins et de leur imposer sa paix, et surtout d’écraser toute résistance dans les territoires palestiniens. Du moins le croyait-il jusqu’au samedi 7 octobre.

Israël croyait avoir réglé le problème palestinien en décrédibilisant l’Autorité palestinienne et en construisant des grands murs qui empêchaient sa population et le reste du monde de voir ce que vivait le peuple palestinien. Gaza était qualifié de prison à ciel ouvert. Les populations qui y subissaient un blocus depuis 2016, étaient privées de tout, et étaient régulièrement bombardées chaque fois qu’Israël avait un problème interne à régler.

En Cisjordanie, la situation n’était guère meilleure. Non seulement la colonisation avait rendu toute idée d’État palestinien complètement impossible, mais les colons faisaient subir aux populations arabes les traitements les plus inhumains. Leurs terres, leurs maisons leur étaient arrachées, et il ne se passait pratiquement pas un jour sans qu’un Palestinien, enfant, jeune, combattant ou non, femme ou vieillard ne soit tué par un colon ou un soldat. De temps à autre, les Américains fronçaient les sourcils et c’était tout. Même les États arabes fermaient les yeux.

Voici que les Palestiniens viennent de se rappeler, de façon dramatique, violente, cruelle, à l’attention du reste du monde. Ils n’ignorent pas comment Israël va réagir. Ils s’en moquent. Comme on le dit en Côte d’Ivoire, « cabri mort n’a plus peur de couteau. » Les jeunes palestiniens de Gaza ou de Cisjordanie ne vivent plus depuis longtemps. Pour bon nombre d’entre eux, la mort est préférable à la vie qu’ils mènent. Nous venons d’entrer dans un cycle de violence dont les ondes de chocs risquent de se faire sentir très loin de l’épicentre.

Déjà l’on rapporte qu’un policier égyptien a tué un couple de touristes israéliens et leur guide égyptien. Jusqu’où s’arrêtera l’horreur ? Il faudra que dès à présent, des hommes et des femmes de bonne volonté imaginent comment en sortir. Car il n’y a pas d’autre voie que d’en sortir. La force ne règle pas tout. Israël vient de découvrir que lui aussi a des points de faiblesse.

Les Palestiniens que l’on croyait écrasés, anesthésiés, viennent de démontrer qu’ils sont capables de frapper Israël avec la plus extrême violence, que nulle part en Israël, aucun Israélien ne peut se sentir totalement en sécurité. La Grande- Bretagne et la France ont mené une guerre de cent ans. La France et l’Allemagne ont connu trois guerres, les unes toujours plus meurtrières que les autres. Tous ces pays sont les meilleurs alliés aujourd’hui. Pourquoi la paix ne serait-elle pas aussi possible sur ce bout de terre dite sainte ?

Le 10/10/23 à 09:16
modifié 10/10/23 à 09:16