Stade d’Abidjan: La chute d’un grand champion

L'équipe du Stade d'Abidjan.
L'équipe du Stade d'Abidjan.
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Stade d’Abidjan: La chute d’un grand champion

Les Bleu et rouge se sont battus pour retrouver l’élite au terme du championnat en cours. Mais leur rêve s’est brisé, mercredi, avec le nul obtenu face au Club omnisports de Bouaflé (1-1).

Ce n’est pas la joie dans la grande famille stadiste. Deuxième au classement dans la poule B avec 32 points +12, le Stade se devait de battre le Club omnisports de Bouaflé lors de la 20e journée et espérer une défaite de Sol Fc d’Abobo (leader avec 38 points +12) contre le Club omnisports de Korhogo pour entretenir l’espoir, à deux journées de la fin des hostilités.

Hélas ! Le destin en a décidé autrement.  Non seulement il été tenu en échec (1-1) par les hommes venus de la Marahoué, mais, en plus, le leader a étalé les Korhogolais (4-2), mercredi dernier, au Complexe sportif d’Abobo. Assurant, du coup, sa montée en Ligue 1. Avec désormais 41 points + 14, les protégés de Sanogo Souleymane ne peuvent plus être rattrapés par les Stadistes (33 points +12).

Redescendu en division inférieure la saison précédente, le Stade s’était donné les moyens lors de la deuxième phase de la compétition (il avait mal commencé la saison en terminant sixième lors de la manche aller), en vue  de signer son retour dans l’élite. Mais entre le rêve et la réalité, le fossé est profond et voici les ex-champions d’Afrique désillusionnés.

Dirigeants, supporters, joueurs et encadrement technique sont malheureux, cafardeux. « Nous avons mal commencé le championnat et au dernier moment, nous n’avons pas pu rattraper le temps perdu. Le Stade, ce club mythique, ne mérite pas ce sort (…) », regrette Bakayoko Ibrahim, quatrième vice-président du club et un des meilleurs joueurs que le Stade ait connus. Avant d’ajouter que le coach actuel Akessé Lewis (choisi par consensus) a de la compétence et mérite d’être encouragé. « Il faut lui donner les moyens financiers et matériels, l’aider à effectuer des stages de recyclage. Je suis convaincu que s’il travaille dans de bonnes conditions, il réussira ».

Par ailleurs, il dénonce, comme de nombreux observateurs, la vieillesse des Partenaires (supporters) du Stade. Ils ont, selon lui, du mal à se mobiliser. Bakayoko pense que c’est aussi un handicap pour le club qui souffre du manque de chaleur de ses supporters lors des matches.

Le Stade d’Abidjan va donc prolonger son séjour «en enfer». Une situation qui n’honore pas du tout ce grand club qui a fait les beaux jours du football ivoirien dans les années 1960 à 1970. Il faut rappeler qu’en 1966, les Bleu et rouge, sous la houlette de Luc Olivier (un technicien rigoureux), s’étaient adjugé la Coupe d’Afrique des clubs champions (voir encadré). Cet entraîneur avait su mettre en place une équipe cohérente et orgueilleuse, avec des joueurs talentueux tels que Déhi Maurice, Joseph Bléziri, Zadi François, Konan Henri, Ezan Emmanuel et Guy Cissoko.

En 1977, le Stade, avec de jeunes loups comme Zahui Madou Laurent, Ignace Guidy, Koffi Kouadio Jules et Téty Gnabo Julien, avait mis la sous-région à ses pieds en remportant la Coupe Ufoa. Dans la même compétition, Zahui et ses coéquipiers ont été finalistes malheureux en 1999.

Sur le plan national, le Stade a été cinq fois champion et vainqueur de la coupe nationale. Sans oublier sa couronne en coupe Félix Houphouët-Boigny en 1985. En 1994 et 1995, les Stadistes ont été finalistes malheureux dans la même épreuve. Bref, le Stade est un grand nom du football sous-régional et africain qui est en train de mourir à petit feu.

« Cela fait très mal de voir ce club dans une telle situation. Nous en souffrons tous. Le Stade, par le passé, était envié parce qu’il avait, à sa tête, un dirigeant passionné : Me Konan Mondon Julien. Il était à l’écoute des joueurs et des encadreurs techniques. Il savait faire des recrutements judicieux. Il y avait mis le prix pour s’offrir des joueurs de renom. Entre autres, les internationaux ghanéens Koffi Badu et Albert Asase. Sans oublier l’international nigérian Stephen Keshi (paix à son âme). Nous rivalisions avec l’Africa et l’Asec (également constellés de joueurs étrangers de grande valeur). Aujourd’hui, nous n’avons plus cette race de dirigeants. Depuis que Me Mondon est décédé, le Stade a du mal à retrouver ses marques », regrette Zahui Madou Laurent (l’homme au bandeau), ancien milieu international de l’équipe, que nous avons joint par téléphone.

Pour lui, le Stade, sans sponsor et sans dirigeant passionné, subsiste difficilement et n’a pas les moyens de sa politique. « Il faut être costaud financièrement pour recruter des joueurs de valeur. Mais, à ce niveau, le Stade est malade. Et tant que le club continuera de tirer le diable par la queue, d’exister sans sponsor, j’avoue qu’il demeurera dans cette situation ».

Organisation et solidarité

De Zahui à Dré Moïse, en passant par Bakayoko et bien d’autres enfants du Stade d’Abidjan, il est temps de mettre une bonne organisation en place autour du club. « Il faut que la communication passe et que tout le monde se donne la main pour sauver le Stade qui est une grande famille », préconise Kien Dré Moïse, ancien attaquant du club (meilleur buteur du championnat lors de la saison 1982-1983).

« Que le président S. Souleymane, choisi par les sages, tende la main aux autres membres de la famille. Ses seuls moyens et idées ne suffiront pas pour bâtir un club solide. Un rajeunissement des Partenaires s’impose. Il faut des idées novatrices pour le bonheur du Stade », conseille Doudou Clarisse, une inconditionnelle supportrice bleu et rouge, comptable dans une grande société de la place.

JEAN-BAPTISTE BEHI