Me Bamba Cheick Daniel, président de la Fit : “ Je vise une médaille d’or à Mexico ”

Me Bamba Cheick Daniel
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Me Bamba Cheick Daniel

Me Bamba Cheick Daniel, président de la Fit : “ Je vise une médaille d’or à Mexico ”

À peine débutez- vous votre second mandat que vous obtenez l’organisation de la prochaine Coupe du monde. Et pour couronner le tout, vous êtes champion du monde francophone. Vos sentiments après tous ces succès.

Tout ceci procède de la confiance qu’accordent désormais le gouvernement et le Chef de l’Etat au taekwondo ivoirien, à l’organisation qui l’encadre, pour que le ministre Alain Lobognon accepte que nous postulons à l’organisation de la Coupe du monde. Surtout dans un délai aussi rapproché que celui qui nous sépare du mois de novembre 2013. Je dis confiance parce que la capacité d’organisation de la Fédération ivoirienne de taekwondo a dû certainement rassurer le gouvernement, le ministre et toutes les autorités ivoiriennes pour que le vœu que nous avons émis en 2012 soit une réalité et soit soutenu par tout le monde. Le niveau du taekwondo ivoirien parmi l’élite mondiale et africaine a dû convaincre le gouvernement ivoirien. Ces deux éléments ont été déterminants pour que le gouvernement accepte que nous organisions la Coupe du monde. Je ne peux qu’être un président heureux et comblé quand cette marque de confiance vous est décernée. Cela est rassurant pour le taekwondo ivoirien. Surtout que nous ambitionnons de construire le palais du taekwondo à Abidjan. Avant notre première sortie internationale, je l’avais annoncé, de manière prémonitoire, que nous irions au Vietnam pour récupérer le trophée. Les jeunes sont venus, ils ont vaincu. Je repars encore heureux, surtout avec le capital de confiance qu’ils ont ainsi engrangé. Avoir pu les frotter au taekwondo de haut niveau avant que nous n’allions au Mexique et que nous accueillions la Coupe du monde chez nous est une bonne chose. Je suis heureux que notre taekwondo ait pu apporter la preuve qu’il n’est pas dans le peloton de queue des équipes nationales.

 

Vous disiez tantôt que vous envisagiez de faire rebondir le taekwondo ivoirien. Avec ce résultat, peut-on dire que vous avez atteint votre objectif ?

 

Nous sommes à mi-parcours. Nous ne pouvons pas dire que nous avons atteint notre objectif. Il ne faut pas dormir sur ses lauriers et penser que nous sommes maintenant au top niveau. C’est encourageant. Nous devons nous remettre sur le métier et nous remettre en cause. Nous devons pouvoir  constamment analyser nos failles et continuer de travailler d’arrache-pied. C’est lorsque nous aurons, un jour, obtenu une médaille d’or aux mondiaux généraux que nous serons satisfaits. Pour le moment, nous sommes champions d’Afrique, champions du monde francophone. Nous visons maintenant une médaille d’or, par exemple, à Mexico.

 

Êtes-vous satisfait de la performance de vos athlètes ?

 

Oui, je suis satisfait. On ne peut pas avoir trois médailles d’or et dire qu’on n’a pas d’athlètes de bon niveau. Je suis content, mais il semble qu’il y a beaucoup de choses à faire au niveau des espoirs. Ils sont hésitants et prompts à reculer. Ils ne veulent pas trop s’engager pour éviter la riposte de l’adversaire. Je n’ai pas vu un engagement total dans leurs attaques. C’est à ce niveau que j’ai pensé que l’imagination n’était pas trop au rendez-vous.  Si nous voulons une bonne relève, nous devons continuer à faire travailler les jeunes de la catégorie espoir. Parce qu’il n’y a plus de petites équipes. La Rd Congo a présenté des combattants de haut niveau. Il nous faut continuer de travailler. Et rattraper tous les scories qu’on voit dans le système d’attaque de nos athlètes. Je suis très heureux parce que ce sont des sommes importantes que le gouvernement a mis à notre disposition. Je suis donc très heureux de présenter le trophée à la nation.

 

Etiez-vous confiant  avant votre arrivée à Hô Chi Minh - Ville ?

 

J’étais confiant. Tout au plus, j’espérais qu’on ne descende pas en dessous de la 2e place. Je sais que les pays asiatiques, le Cambodge, le Laos, que nous avions vu à Lille, en 2009, étaient largement au-dessus de nous. Nous n’avions pas eu l’occasion de les rencontrer de nouveau, si bien que j’étais sceptique. Le Vietnam était à Abidjan l’année dernière, et sachant qu’il était le pays organisateur, il a mis une année à se préparer. Lors des championnats asiatiques, ils étaient presque les meilleurs. Le Laos et le Cambodge sont des pays qui ont une culture du taekwondo. Et je me suis dit que nous allons tout faire pour ne pas être en dessous du résultat d’Abidjan. Mais j’avais dit aussi que nous venions récupérer le titre et les jeunes ont gagné. Ils sont allés au-delà de mes espérances.

 

Comptez-vous toujours sur Zokou Firmin pour le championnat du monde qui aura lieu bientôt au Mexique, même s’il n’a pas brillé au Vietnam ?

 

Il revient avec une médaille d’argent. Ce n’est pas rien dans une compétition internationale. Il était médaillé d’or, il a eu une médaille d’argent. Je compte toujours sur lui. Je crois que nous devons travailler son mental et l’amener à prendre les combats au sérieux, du début à la fin. Il menait son combat et après, il a relâché. Il a minimisé son adversaire. Et quand il s’est rendu compte qu’il avait été rattrapé, la panique lui a fait perdre des points. Il a perdu, certes, mais je sais qu’il est techniquement au-dessus de son adversaire. Je ne désespère pas, mais il faut l’amener à être plus tacticien et à ne pas prendre son adversaire de haut. C’est ce que je lui reproche.

 

Avant de venir à cette Coupe du monde francophone, vous avez fait faire des matches tests à tous les présélectionnés en équipe nationale. Ceci, pour dire qu’on ne vient plus en sélection en se basant sur sa renommée, mais plutôt sur la forme du moment. Allez-vous répéter cela pour Mexico et en faire votre credo ?

 

La rigueur, rien que la rigueur… je ne cesserai de répéter ce mot. La rigueur a été le fondement de ma politique au niveau de la sélection en équipe nationale. Je n’interviens pas dans le choix des athlètes. Aucun membre du comité directeur, en dehors de la direction technique nationale, n’intervient. Pas même les entraîneurs. C’est une commission qui siège eu égard aux documents produits, notamment l’assiduité, la répétition des techniques, le mental, la discipline, les combats entre les athlètes. De manière transparente, l’équipe est constituée. Il ne faut pas changer une méthode qui marche. Elle rassure les combattants et ceux qui ne sont pas sélectionnés savent que ce sont les meilleurs du moment qui le sont. A travers cette méthode, personne ne peut décrier la sélection. Il n’y a pas de poste captif retenu pour telle ou telle personne. Gbagbi Ruth était classée, elle était aux Jeux olympique. Mais le fait d’avoir été sortie à deux reprises par N’Dri Nadège l’a écartée de la sélection pour cette compétition. Nous n’avons pas de vedette. Si Zokou avait perdu face à Karim, ce dernier aurait sa place. Chacun défend sa place crânement et nous comptons continuer ainsi.

 

En l’espace d’une année, vous allez organiser une deuxième compétition internationale, après le Coupe du monde francophone. Qu’est-ce qui fait courir le président de la Fédération ivoirienne de taekwondo ?

 

Je ne cours pas. Le taekwondo ivoirien a besoin d’être connu. Il a besoin de rassurer les Ivoiriens que c’est le sport de masse par excellence après le football. C’est une bonne chose d’animer son pays une fois l’an, surtout que l’organisation d’une compétition de grande envergure ne coûte pas chère. C’est bon d’attirer les jeunes vers la pratique du sport. Nous le faisons tous à la Fédération de taekwondo.  Nous voulons montrer que le taekwondo est beau. Qu’il est rassembleur et peut être pratiqué par tous les jeunes. Nous animons la cité et nous la faisons connaître à travers ce genre de compétitions. Et c’est notre pays qui est médiatisé, fréquenté, etc. La Fédération apporte sa contribution à l’éducation de la jeunesse, à l’ouverture du monde extérieur sur la Côte d’Ivoire. Et celle-ci doit démontrer sa réputation de terre d’accueil, de rencontre de toutes les nationalités. C’est ce que nous comptons faire. C’est ce qui nous amène à fait tout cela.

 

Vous avez été ovationné par tous vos pairs, au Vietnam, pour la bonne organisation de la 8e Coupe du monde francophone en 2012, à Abidjan. Pensez-vous pouvoir être à la hauteur de cette reconnaissance, en novembre, lors de la Coupe du monde,  puisque le temps est très limité ?

 

Nous avons organisé la Coupe du monde francophone en cinq mois. Nous étions des novices lorsque nous le faisions. Maintenant, nous avons une expérience en matière d’organisation. Nous avions reçu 26 pays, alors que pour la Coupe du monde, ce sont 16 nations qui viendront. La charge n’est pas aussi lourde. Nous avons le soutien de l’état. Nous sommes seulement dans une phase d’exécution.

 

Vous étiez face à la Tunisie, au Gabon, qui était en pole position pour l’organisation de la Coupe du monde. Qu’est-ce qui a joué en faveur de la Côte d’Ivoire ?

 

Le plus, pour la Côte d’Ivoire, c’est que dans un passé très récent par rapport à l’organisation, nous avons été ovationnés par nos pairs et Abidjan est devenue un repère grâce à l’organisation de la Coupe du monde francophone. Le Gabon venait de changer de président. Son nouveau bureau ne rassurait pas pour qu’en cinq mois, il puisse organiser cette Coupe du monde. La Côte d’Ivoire, de par son histoire avec le taekwondo, est de loin l’aînée du Gabon. La Fédération ivoirienne de taekwondo date de 1973. Nous avons 200 clubs, alors que le au Gabon n’en a pas beaucoup. Nous sommes les fondateurs de l’Union africaine de taekwondo. Nous avons toute une histoire. Nous avons été les premiers à demander l’organisation de cette compétition. S’il y a un pays qui est bien placé de par son ancienneté, le nombre d’adhérents, sa présence aux Jo, sa présence à la Fédération internationale de taekwondo, c’est bien la Côte d’Ivoire. Justice lui a été faite. La Côte d’Ivoire a été la terre d’accueil du taekwondo en Afrique. Il y a une coïncidence heureuse parce que les 40 ans de la Fédération mondiale coïncident avec les 40 ans du taekwondo en Côte d’Ivoire : 1973-2013. Donc si une Coupe du taekwondo doit avoir lieu en Afrique, c’est tout à fait normal que ce soit ici.

 

Qu’est-ce que cela vous fait de savoir que vous serez la première fédération africaine à organiser une Coupe du monde, comme l’Afrique du Sud au football ?

 

C’est un honneur, une reconnaissance du rôle de la Côte d’Ivoire en Afrique, dans le monde, par rapport à la diffusion, à la promotion du taekwondo. A cette occasion, nous allons poser la première pierre du palais et fêter les 40 ans du taekwondo en Côte d’Ivoire. Et nous rappeler aussi tous les anciens qui sont allés, en 1975, créer la fédération mondiale et qui sont allés, la première fois, avec l’équipe nationale, lancer le projet olympique. Nous n’avions pas pensé à cela lorsque nous introduisions notre dossier de candidature. Ce n’est qu’après l’obtention de l’organisation de cet événement que nous avons réalisé que nous avons reçu le premier maître du taekwondo en Afrique, Me Kim. Et cela arrive au bon moment. C’est une marque de respect et de considération pour notre pays.

 

Quelles sont les perspectives du taekwondo ?

 

Les perspectives, c’est faire en sorte que l’œuvre de mes devanciers ne disparaisse pas. Le taekwondo, ce n’est pas seulement un sport de combat. C’est aussi une école d’éducation. S’il est bien organisé comme en Corée, et dans les pays qui ont cette culture, c’est une école d’édification de l’homme. Si la réforme de l’enseignement du taekwondo prend, que nous avons un palais du taekwondo et que chaque enfant le pratique à l’école, nous aurons, petit à petit, des citoyens pétris de rigueur, disciplinés qui ont le respect de l’aîné, des parents, des institutions, etc. C’est cela que doit servir le taekwondo et c’est ce qu’il peut offrir à la Côte d’Ivoire.

 

Nous sommes à environ cinq mois du déroulement de la Coupe du monde. Pensez-vous pouvoir réunir les moyens financiers nécessaires à l’organisation de la compétition ?

 

Pour la Coupe du monde francophone que nous avons eue à organiser, le gouvernement a donné 140 millions de Fcfa et les sponsors ont contribué à hauteur de 85 millions. Pour la Coupe du monde à venir, nous pensons pouvoir l’organiser avec 250 ou 300 millions. Nous ne sommes pas dans les chiffres de milliards. Même si la Côte d’Ivoire est en difficulté, ce n’est pas 300 millions qu’elle ne peut pas avoir. Il y a de nombreuses structures qui pourront nous aider. Si l’Afrobasket a lieu, nous allons hériter de l’infrastructure. Il n’y a, pas d’inquiétude à se faire à ce niveau. Nous nous étions battu, à l’époque, pour avoir la salle du Palais des sports pour la Coupe du monde francophone. Nous n’avons pas besoin de parquet au taekwondo. Nous avons nos tatamis que nous utilisons.  

 

Interview réalisée

 

au Vietnam par Élisabeth Goli