Didier Otokoré (ancien international ivoirien) : « Il faut une charte du footballeur ivoirien »

Didier Otokoré (ancien international ivoirien) : « Il faut une charte du footballeur ivoirien »

Didier Otokoré (ancien international ivoirien) : « Il faut une charte du footballeur ivoirien »

 

Que pensez-vous de l’exode des talents dans le championnat ivoirien ?

C’est la loi du sport. Cela se passe partout dans le monde et la Côte d’Ivoire n’est pas une exception. Je ne suis pas surpris. Certains ivoiriens se plaignent qu’il n’y a pas de bons joueurs en Côte d’Ivoire. Je dirai plutôt qu’il y a de bons joueurs mais pas de bonnes équipes, c’est cela la différence. On copie exactement ce qui se fait ailleurs, notamment sur la France. On critique toujours le championnat français, mais chaque saison, il y a de jeunes joueurs qui s’exportent.

 

Ce phénomène est-il le signe que le championnat ivoirien est de bonne valeur ?

J’insiste pour dire que la Ligue1 est un bon championnat. Sauf qu’il y a un manque d’organisation.

 

Ces départs massifs n’impactent-ils pas négativement sur la qualité du spectacle ?

Cela n’a rien à voir. C’est plutôt un problème d’organisation. Les joueurs partiront toujours et cela ne peut pas empêcher le championnat d’être bon.  Que ce soit le ministère des sports, la fédération, les dirigeants de club, tout le monde doit se remettre en cause  pour une meilleure organisation de notre football. Il faut qu’il y ait un vrai professionnalisme. On ne peut pas concevoir qu’au mercato, il y ait des dirigeants qui mettent  à la porte des joueurs qui sont sous contrat. Il y a eu 111 joueurs qui ont été abusivement licenciés parce que nous sommes dans un championnat où il n’y a aucune règle. Chacun fait ce qu’il veut. Si donc, un joueur, a l’opportunité d’aller monnayer son talent à l’étranger, il n’hésitera pas. Mais si les choses sont bien organisées, le joueur est régulièrement payé et qu’il y a un contrat en bonne et due forme, tout le monde sortira gagnant, le club et le joueur. Il ne faut donc pas se plaindre.

 

Quelles sont vos propositions concrètes pour ne pas perdre tous ces talents ?

Il faut des états généraux du football en Côte d’Ivoire. Nous sommes dans un professionnalisme qui ne dit pas son nom. Il faut que tous les dirigeants des instances du football s’asseyent pour mettre en place un cahier de charges pour le football ivoirien.

Pour un professionnalisme vrai, il faut une charte du footballeur. Avec un salaire minimum, un contrat etc… Cela protège également le dirigeant. Lorsqu’il existe  un contrat, lorsque le joueur est vendu, le club est gagnant. C’est l’absence de tout cela qui entraîne la prolifération de managers véreux qui leur donne de l’espoir et qui ne respectent pas après, leurs engagements.

Nous sommes en 2019, je ne peux pas concevoir qu’il y ait des joueurs qui soient payés à 60 000 Fcfa, sous le prétexte que c’est le Smig, en Côte d’Ivoire. Le football est un sport particulier. Il y a le Smig partout dans le monde mais, il y a des joueurs qui sont payés à des milliards. Il faut un salaire minimum. Et je pense qu’en Côte d’Ivoire, le minimum qu’on devait donner à un joueur de Ligue1, c’est 250 000 Fcfa. A partir de cet instant, on le responsabilise et vous verrez que tout va changer.

 

Doit-on imposer un minimum de saison en Ligue1 aux joueurs, avant de partir ?

Sur quelle base doit-on le faire ? En percevant un salaire de 50 000 Fcfa par mois ? Il faut être cohérent. Avec tous les risques que comporte le football, on ne peut pas accepter un tel salaire. C’est normal que les joueurs partent et cela n’empêchera pas le championnat d’être bon. Il faut que le ministère des Sports, la fédération et les dirigeants s’organisent pour mettre en place une charte du footballeur professionnel en Côte d’Ivoire et organiser le football.

 

Cela est-il suffisant pour empêcher la fuite des talents ?

Ce n’est pas pour empêcher, mais à partir du moment où le joueur est sous contrat, chacun aura son véto. Si un club a besoin de son joueur, il peut  signer avec un nouveau club et être prêté pour repartir la saison prochaine. Il y a beaucoup de choses qui peuvent se faire. Mais s’il est payé à 50 000 Fcfa, il partira sans même négocier dès qu’il aura une offre. A notre époque, nous n’étions pas professionnels, mais il y a des joueurs qui percevaient 500 000 Fcfa, voire un million de Fcfa de salaire.

Interview réalisée par

Céleste Kolia