En défense, on note dans les bois Zagoly Golié, arrière gauche, Sacré Abialy Léopold, côté droit, l'intrépide Gnahoré Depié Émile, l'axe central étant l'affaire de la paire Lago Patrice Grogbo - Monguéhi Guéhi François. L’histoire est un témoignage. Elle confirmera que tout le bastion défensif ivoirien  communiquait en langue vernaculaire (Ndlr: Bété). Ce qui n'était nullement un problème pour Monguéhi,  le ‘’Guéré’’. Le milieu avait pour tête pensante l'orfèvre François Zahoui, entouré du ‘’destructeur’’  Gadji Céli Saint Joseph avec à ses côtés le relanceur Omar Ben Salah.

Et que dire de l’attaque ? Il y avait le diamant noir, l'enfant de Mankono, Youssouf Falikou Fofana sur l’aile gauche de l’attaque. Le flanc droit étant l’apanage du virtuose N'Dri Kouassi Pascal. Le post-avant des Eléphants était sous la responsabilité du génie Abdoulaye Traoré alias Ben Badi.

De mémoire de supporters (bien que n’ayant pas vu la Côte d’Ivoire sous l’ère Laurent Pokou), je ne crois pas que le football ivoirien ait produit un joueur aussi talentueux que Ben Badi. C'était un artiste, un buteur né, capable d'éliminer en un contre un et même dans un centimètre carré (la comparaison n’est pas osée), n'importe quel défenseur. Bref...

Les Eléphants sont logés dans la poule A avec l'Égypte, pays organisateur, le Mozambique et le Sénégal. Pour leur entrée en compétition, nos pachydermes étrillent les Mozambicains par le score de 3-0. Ben Badi par deux fois et Kouassi N'Dri sont passés par là. Lors du second match, les nôtres plient l'échine face à l'Égypte (0-1). La  qualification ivoirienne pour les demi-finales est compromise vu que le Sénégal entre temps, s'étant joué du Mozambique et de l'Égypte. Notre avenir dans cette Can se jouait alors face au Sénégal lors de la troisième et dernière journée de poule.

Le 13 mars 1986 au Cairo International Stadium (j'étais en classe de cinquième au Collège Aimé Césaire de Yopougon à l’époque). Devant 55 000 spectateurs, Les Eléphants défient les lions de la Teranga ou encore les ‘’Gayendés’’, juste des sobriquets de prestige pour mettre la pression sur le onze ivoirien. Un duel de titans arbitré par le Gabonais Jean Fidèle Diramba. Les connaisseurs du football africain s'en souviennent certainement.

Malgré la qualité de notre effectif, la Côte d’Ivoire toute entière n'était pas du tout sereine (moi non plus face à notre petit écran familial d’alors), vu les redoutables noms qui composaient l'équipe des ‘’Gayendés’’: Cheikh Seck le portier de charme, Thierno Youm le milieu régulateur, Pape Fall, la ‘’patte’’ magique, Roger Mendy de Toulon, la rampe de lancement, Oumar Guèye Sène, Boubacar Sarr, Racine Kane, Mamadou Tew, Oumar Touré, Amadou Diop ou encore l’emblématique Jules François Bertrand Bocandé et ses redoutables ‘’dread looks’’ dévastateurs. Le tout, sous la houlette d’un magique Thierno Youm !

Les deux équipes développent un jeu plaisant dans un match très serré. Point de but à la pause. Il faudra attendre la seconde période et un ballon à lui remis sur le flanc gauche à Youssouf Fofana par Sacré Abialy Léopold (71è min). Dans un débordement dont lui seul a le secret, l’attaquant mimosas donne le tournis à son vis-à-vis avant d’adresser un centre parfait (du reste dévié par François Zahui) à Ben Badi. Le prodige ivoirien ne se fait pas prier pour  loger le cuir dans la lucarne droite du gardien sénégalais. Un contre-pied parfait qui jette un froid glacial sur le stade du Caire. Les filets tremblent. La Côte d'ivoire venait d'ouvrir le score par son prodige révélé au  Stella Club d'Adjamé. Rien ne changera au score jusqu'à la fin du match.

Lorsque le Gabonais met fin à la confrontation, c'est une explosion de joie dans tout un pays qui venait de se qualifier pour les demi-finales. Je crois que de mémoire de supporter des Éléphants, sous la direction technique du sélectionneur César Hector Gonzalès, ce match fut l'un des plus héroïques exploits de nos pachydermes !

Salut les jeunes et sachez que le football n'a pas commencé avec le Fc Barcelone ou encore le Réal Madrid.

(Témoignage d’Ablégué Adjé Romain Moh, supporter des Eléphants lors de la Can 1986 en Egypte.)