Société civile : L’ordonnance des référés qui tranche

Dr Christophe Kouamé et Sidiki Bakayoko
Dr Christophe Kouamé et Sidiki Bakayoko
Dr Christophe Kouamu00e9 et Sidiki Bakayoko

Société civile : L’ordonnance des référés qui tranche

Le conflit de leadership qui déchire, depuis près d’un an, la Convention de la société civile ivoirienne (Csci) découle uniquement de l’interprétation que les uns et les autres se font de l’ordonnance des référés n°3763 du 31 juillet 2012 (voir notre édition d’hier). Cette décision judiciaire est intervenue sur requête du Dr Kouamé Christophe, en vue de voir rétracter l’ordonnance 3216 du 4 juillet 2012 ordonnant l’annulation du congrès qui a vu son élection. Et si sa demande est recevable, cela voudra dire que l’ordonnance 3216 est annulée, conférant ainsi toute sa légitimité au congrès des 3, 4 et 5 juillet qui a porté le Dr Kouamé Christophe à la tête de la Csci. Et que par conséquent, son élection au poste de coordonnateur national de la Csci s’est faite régulièrement. Mais si, par contre, l’ordonnance 3763 n’accède pas à la procédure de tierce à opposition ainsi engagée, il faudra alors se rendre à l’évidence que l’ordonnance 3216 du 4 juillet qui annule ledit congrès est probant. Ce qui signifie, en clair, que l’élection du Dr Kouamé Christophe est invalidée par la justice. Et que Sidiki Bakayoko, qui a été élu au cours d’un congrès extraordinaire autorisé par une autre décision de justice qui n’a pas été, rétractée, demeure le coordonnateur légitime de la Csci. Chacune des deux parties estime que la fameuse ordonnance 3763 lui est favorable et se réjouit de ce qu’elle n’ait pas été l’objet d’appel par l’adversaire. Mais en fait, que dit concrètement cette ordonnance ?

Comme on le sait, toute ordonnance de référé se compose de deux chapitres très importants. Le premier qui  donne les indications, l’origine et l’auteur de la décision situe sur le contexte, le caractère, la recevabilité et les motivations de la décision en faisant connaître la position du juge sur des points principaux ayant trait au fond de l’affaire. Le second et dernier chapitre de l’ordonnance judiciaire est constitué de ce qu’on appelle en terme juridique « la Minute ». Il s’agit ici de la conclusion qui donne sans équivoque la décision finale qui ressort de la procédure. Dans l’affaire qui nous intéresse, chacune des parties s’arc-boute sur un chapitre de l’ordonnance 3763 pour se proclamer coordonnateur national de la Csci.  Le Dr Kouamé Christophe et les siens, s’accrochent au premier chapitre. Et retiennent un passage précis libellé comme suit : « … En dépit de la signification de ladite ordonnance (Ordonnance 3216 du 4 juillet 2012), la convention générale élective s’est tenue et un coordonnateur de la Csci a été élu de sorte que l’ordonnance est devenue sans objet. Au surplus, cette ordonnance n’a jamais prescrit l’occupation du siège de la Csci par des forces de l’ordre, qui y sont probablement en vertu d’un autre type de décision. Il s’ensuit que l’ordonnance susvisée ne produit aucun effet à l’égard de la Convention de la société civile ivoirienne dite Csci, susceptible d’être suspendu. Dès lors, son action est mal fondée et sera rejetée comme telle… ». Nous présentant ainsi l’ordonnance, le Dr Kouamé Christophe et les siens se sont abstenus de tout commentaire sur la mention suivant le chapitre qui les intéresse. Cette mention donne ceci: «Sur les dépens : La Convention de la société civile ivoirienne dite Csci (au nom de laquelle ils ont engagé la procédure en référé) succombe ; elle supportera les dépens ».

Quant à Sidiki Bakayoko et ses partisans, ils brandissent la conclusion de la même ordonnance 3763 pour dire qu’ils ont « gagné ». Le contenu de la dernière partie de la décision se présente comme suit : « Par ces motifs. Statuant en audience publique, par décision contradictoire, en matière de référés et en premier ressort ; au principal, renvoyons les parties à se pourvoir ainsi qu’elles aviseront mais dès à présent, vu l’urgence et par provision ; déclarons recevable l’action de la Convention de la société civile dite Csci ; la disons mal fondée ; l’en déboutons ;mettons les dépens à sa charge ; ainsi, fait dit et jugé publiquement, les jours, mois et an que dessus ; et avons signé le président et le greffier ». Sur ce chapitre, précisons que la copie de l’ordonnance avec les mêmes numéros et mentions que nous avons reçue du Dr Kouamé Christophe diffère d’une nuance près d’avec celle remis par son adversaire. En effet, avec le document du Dr Kouamé, il apparaît la mention «La disons cependant fondée» en lieu et place de «La disons cependant mal fondée». Cette confusion suscite tout de même une interrogation. Le juge peut-il débouter lorsque sa décision est précédée de la mention «La disons cependant fondée» ? Simple interrogation.

Landry Kohon