Anne Désirée Ouloto, cadre de l’Ouest " Nous avons pu obtenir une trêve de 8 jours avec les protagonistes "

Anne Désirée Ouloto, cadre de l’Ouest " Nous avons pu obtenir une trêve de 8 jours avec les protagonistes "
Anne Désirée Ouloto, cadre de l’Ouest " Nous avons pu obtenir une trêve de 8 jours avec les protagonistes "

Anne Désirée Ouloto, cadre de l’Ouest " Nous avons pu obtenir une trêve de 8 jours avec les protagonistes "

Dans cette interview, elle parle de la démarche entreprise pour trouver des solutions durables au conflit.

-Vous aviez conduit une mission à l’Ouest du pays en vue de règlement du conflit opposant les wè aux Baoulé. Quelle est la situation sur le terrain ?

La situation est présentement calme. Mais, il faut reconnaitre qu’il y a eu de vives tensions. Pour l’heure, nous avons pu obtenir des protagonistes, une trêve de 8 jours pour permettre au gouvernement de repartir vers ces communautés avec une feuille de route, une démarche que nous voulons inclusive et participative. Cette démarche les a rassurés .Nous avons eu aussi l’opportunité au cours de cette mission de parler directement avec ceux qui, en réalité sont les acteurs principaux de cette crise tant du côté des populations guerré et du côté des populations baoulé qui vivent à l’intérieur de la forêt. Ces populations qui ne sont pas sorties de cette forêt depuis deux mois ont accepté de venir pour qu’on discute. C’est avec elle que nous avons convenu de nous revoir dans une semaine. Le temps pour le gouvernement de faire une analyse profonde de la situation et de leur proposer une démarche que nous la voulons participative. Parce que nous croyons que grâce à la volonté de toutes les parties nous pourrons régler   ce conflit. Cette résolution doit se faire sous l’autorité du gouvernement. C’est une mission du gouvernement que je conduisais qui avait à son sein des cadres Wè du Cavally, des élus et cadres baoulé du Grand centre, du ministre de l’Intérieur et de la Sécurité et du Consulat du Burkina Faso. C’est la première fois qu’on effectuait une telle mission qui nous a permis de parler avec les principaux acteurs et d’amorcer le processus de pardon. Il y a eu beaucoup de violence qui ont entrainé de nombreuses victimes. Le gouvernement condamne ces actes de violence. Chacun doit savoir que nul n’a le droit de se faire justice. Nous avons lancé un message à l’apaisement, à la retenue. Et surtout un message de paix. Nous souhaitons que la voix du gouvernement soit entendue.

- Quels sont les principaux acteurs de cette crise ?

Ce sont les populations gueré et baoulé. Les Burkinabè jusque-là sont présentés comme des victimes de cette crise. En réalité, nous refusons qu’on stigmatise les personnes   qui sont en conflit en disant que c’est une crise qui oppose les Gueré aux Baoulé, vice versa. Il s’agit de mauvais comportement d’un certain nombre d’individus à l’intérieur de ces différentes communautés qui agissent contre les intérêts des communautés. Le débat doit se situer à ce niveau. Il est donc nécessaire de circonscrire ce conflit pour éviter d’aller dans tous les sens. C’est la raison pour laquelle nous avons décidé de toucher du doigt les causes principales du conflit. Nous avons commencé à discuter justement avec les personnes qui posent problème. Cette situation peut avoir des conséquences dramatiques sur la cohabitation entre ces deux peuples frères qui vivent en parfaite harmonie sur ces terres depuis plusieurs années.

-Quel est le nombre de victimes recensées présentement ?

Nous enregistrons cinq personnes tuées au cours de la semaine dernière. Auparavant il y a eu deux personnes tuées. Soit un total de sept personnes qui ont perdu la vie. On a également deux personnes blessées graves dont une internée à la Pisam. Sans compter la dizaine de personnes blessées admises à l’hôpital général de Gyuiglo. Trop de sang a donc coulé. Il faut mettre fin à cette situation.

-Quelles sont les principales raisons de ce conflit ?

Il est important de laisser le gouvernement continuer les investigations pour déceler les causes profondes de ce conflit meurtrier. Ce que nous savons c’est qu’il s’agit d’un problème à l’intérieur d’une forêt classée. En clair, c’est une forêt qui n’appartient ni aux Gueré, aux Baoulé, encore moins aux Burkinabè. C’est un espace appartenant bien évidemment à l’Etat de Côte d’ Ivoire. Malheureusement, aujourd’hui, le pays est confronté à des problèmes occasionnés par les infiltrations dans cette foret. Le gouvernement Ouattara se retrouve aujourd’hui dans une situation difficile parce qu’il hérite. Ces populations sont sur ces espaces depuis plus de trente ans. Malheureusement, on constate de nos jours que ces problèmes se sont transformés en différends communautaires. Tout le monde cherche à savoir comment ces personnes ont pu s’installer dans une forêt classée pendant plusieurs années sans réaction des autorités compétentes. Aujourd’hui, le gouvernement dirigé par le Premier ministre Amadou Gon Coulibaly veut apporter une solution définitive à ce problème. Mais, dans un premier temps, il faut parer au plus pressé en réglant les préoccupations humanitaires. Nous priorisons pour le moment le retour à la paix, le vivre ensemble, la fraternité …Ensuite, l’Etat prendra des dispositions pour faire respecter les forêts classées. Le plus urgent est de mettre en priorité la vie des populations qui se trouvent dans cette région.

-Que va –t-il se passer après les 8 jours de trêve ?

En tant cadre de la région et membre du gouvernement, nous vous apprenons que les cadres élus et chefs traditionnels Wè sont en concertation. Bref, tout le monde à l’Ouest est mobilisé pour une issue pacifique à cette crise. Les communautés baoulé également avec à leur tête, l’ancien Premier ministre Jeannot Kouadio-Ahoussou, président de l’Association des cadres et élus baoulé sont également à pied-œuvre pour trouver une solution pacifique à la crise. Le gouvernement prend aussi un certain nombre de dispositions à l’effet de régler les problèmes de fond. Notamment les questions liées au foncier et au respect des forêts classées. Ce sont des problèmes spécifiques qui ont besoin des réponses spécifiques. Pour le moment, nous faisons la facilitation pour un règlement rapide de la question dans l’équité, dans la justice au profit de tous. Les gens doivent savoir que ce problème est complexe mais pas insurmontable. Car, nous sommes mobilisés pour apporter des solutions durables. Nous devons éviter de politiser cette crise. C’est un problème communautaire et non politique. Le Président de la République, Alassane Ouattara est déterminé à résoudre ce problème dans toutes ces dimensions. C’est pour cela que nous avons besoin de temps de réflexion et également, nous avons besoin d’une démarche participative et inclusive. Dans la résolution de ce conflit, le dialogue aura une place prioritaire. Parce que sans dialogue, il sera difficile de trouver des solutions durables.

Interview réalisée par

BROU   PRESTHONE