Migrants de Libye: 70% de personnes touchaient 100.000 Fcfa par mois avant de partir

Migrants de Libye: 70% de personnes touchaient 100.000 Fcfa par mois avant de partir

Ce n’est pas le chômage qui pousse des Ivoiriens à la migration. Les chiffres le disent. « 70% des migrants ivoiriens avaient un emploi rémunéré qui leur rapportait un revenu de 100.000 FCfa par mois en moyenne », a révélé le lundi 19 février, Marina Schrann, chef de mission de l’Organisation internationale pour la migration (Oim). Et la moitié des migrants, une fois rentrés, ont souhaité retrouver leurs anciens boulots.

Face à la presse, à l’hôtel Palm Club de Cocody, Marina Schrann ; le directeur des Ivoiriens de l’extérieur, Issiaka Konaté et la déléguée de l’Union européenne, Marie Molinie ont dressé « le profil » du migrant. Ils ont expliqué pourquoi sa réintégration « n’est pas une chose automatique ». « En moyenne, le migrant ivoirien est un homme qui a entre 18 et 30 ans ; qui, dans plus de 60% des cas, résidait à Abidjan et qui a donc grandi en milieu urbain », a expliqué Marina Schrann.

En effet, 85% des migrants sont issus du « milieu urbain », 70% sont allés à l’école, au primaire, voire au secondaire et trois sur quatre sont célibataires.  Le voyage, généralement, coûte 1.5 million de FCfa financé souvent par le candidat lui-même. Ce qui pousse un citoyen aussi normal à l’aventure : la quête d’un mieux-être et l’image idyllique qu’il se fait de l’Europe.

« Depuis le début, la migration n’a jamais été liée à l’emploi. Elle est liée à ce qu’ils appellent un mieux-être. Mais c’est une notion qui est très confuse. Quel est le niveau qu’on doit atteindre pour avoir la perception d’un mieux-être ? », s’est interrogé Issiaka Konaté qui propose que l’Etat investisse « lourdement » dans la formation professionnelle et « la sensibilisation ». Autrement dit, avoir un fonds ou un emploi, c’est déjà ça. Reste à travailler à agrandir ce qu’on a, ce qu’on fait ou à se former davantage.

D’ailleurs, quand ça ne marche pas ailleurs, c’est le retour. Au mieux, volontaire. L’action conjointe entre le fonds fiduciaire de l’Ue et l’Oim a permis le retour au pays de 1566 Ivoiriens entre mai et décembre 2017. 1000 sont revenus de la Libye, plus de 300 du Niger, pays de transit vers la Libye, près de 200 du Maroc et une cinquantaine de la Mauritanie. Ces 1566 Ivoiriens se composent comme suit : 317 femmes, 1114 hommes et 135 mineurs. Chacun a reçu une assistance psychosociale, un pécule et un hébergement d’urgence.

Toutefois, un migrant, même rentré de Libye, ne doit pas revendiquer plus de droits que les autres citoyens. « Une fois qu’il est pris en charge dans l’urgence, il devient un Ivoirien comme un autre. On ne va pas lui donner un avantage particulier. La réintégration, ce n’est pas récompenser ceux qui sont partis », a précisé Marina Schrann.

S’intégrer est un acte « volontaire » qui suppose parfois d’être formé ou éduqué. Aussi 90 migrants ont-ils déjà bénéficié de formations à l’Agence nationale de la formation professionnelle (Agefop). Car acheter une moto-taxi pour quelqu’un qui ne sait pas gérer ou accorder des millions à qui veut faire de l’élevage sans en avoir une notion, c’est le parfait chemin pour garantir une intégration précaire.

Ce que ne souhaite personne. A commencer par le migrant lui-même. Des appels à propositions sont lancés aux Ong et organismes communautaires qui auraient des formules d’intégration. Notamment pour les personnes vulnérables. « L’Etat fait montre d’une compassion et d’une solidarité extraordinaires », a rappelé Issiaka Konaté. Comme pour dire que chaque migrant doit y mettre du sien. Et de bonne foi.

Benoît HILI