Le Débrief: Il se passe quelque chose de plus grave que ce qu’on croit

Bangui, la capitale centrafricaine, une ville d&serte où règne le chao
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Le Débrief: Il se passe quelque chose de plus grave que ce qu’on croit

Le Débrief: Il se passe quelque chose de plus grave que ce qu’on croit

 

La Centrafrique, ce n’est plus seulement le centre de l’Afrique. Elle se révèle surtout comme le cœur de l’Afrique qui souffre. Dimanche, France 24, la télé française, a passé un document dans son émission de grands reportages intitulé « Reporters ». Là, on a pu percevoir la réalité de ce qui se trame dans ce pays. A travers les témoignages des uns et des autres, mais aussi à travers des images qui sont plus parlantes que n’importe quel discours.

 

Dans ce reportage, on y découvre un pays décousu (le mot n’est pas fort), où les morceaux trainent çà et là... Des populations fortement apeurées et sans abris. Des bandes armées qui revendiquent chacun un pouvoir en accusant les autres d’atrocités. Des forces internationales presque toutes débordées, impuissantes. L’aéroport, un champ de ruine et un vaste camp de réfugiés. En voyant ce film et ses scènes de chao, on a du mal à croire qu’il existe encore un Etat en Centrafrique.

 

Lundi, 123 Ivoiriens avaient réussi à fuir. Ils ont atterri à Abidjan après avoir voyagé en vol spécial grâce au gouvernement ivoirien. Après des complications de dernières minutes, dues à l’enlisement de la crise, un deuxième groupe d’Ivoiriens a pu être ramené à Abidjan, jeudi. Une vingtaine d’autres Ivoiriens sont restés sur le sol centrafricain. Avant l’opération de rapatriement, au moins deux ressortissants ivoiriens avaient déjà été tués. Tous ou presque ont tout perdu dans cette crise multiforme.

 

On est en effet loin de la crise au Mali où les principaux protagonistes, l’Etat malien et les djihadistes, étaient connus et clairement identifiés. On est même loin de la crise ivoirienne, où il y avait un volet civil mais où chaque bloc semblait cohérent et compact. En Centrafrique, on a l’impression de ne pas avoir de ligne de front. On n’a pas d’un côté le gouvernement et de l’autre côté des rebelles. On n’a pas d’un côté ceux qui se battent et de l’autre côté des forces impartiales.

 

Les forces françaises parties pour instaurer la sécurité en désarmant les milices et tout individu porteur d’arme semblent être confrontées à des provocations qui deviennent ingérables, et en ajoutent au conflit. Elles sont même accusées de ne désarmer que des membres de la Séléka, au profit des milices anti-balakas qui combattent l’ex-rébellion au pouvoir. La Séléka qui se ferait aider par l’armée tchadienne est accusée de massacrer les chrétiens. Les anti-balakas et leurs alliés d’ex-éléments des forces armées nationales, eux, sont accusés d’atrocités sur les musulmans. Des incidents entre des contingents de la force africaine MISCA ont déjà été enregistrés.

 

La Centrafrique peut-elle s’en sortir de sitôt ? Le mal semble être plus profond. Il se passe quelque chose de plus grave que ce qu’on croyait. Selon le Haut-Commissariat des Nations Unis pour les réfugiés (HCR), la situation d’insécurité est plus qu’alarmante, et les civils sont pris au piège dans une crise profonde. Si on ajoute à cela, l’idée de sécession évoquée par le chef d’une des factions de la Séléka, la situation devient explosive. « Dans un délai d’une semaine nous allons prendre la décision, tous les nordistes musulmans, de demander la scission de la République centrafricaine en deux : le Nord et le Sud », avait-il déclaré il y a une dizaine de jours.

 

Dans ces récentes apparitions, le nouveau Chef de l’Etat installé depuis mars 2013, Michel Djotodia, donnait l’impression de garder la main. Mais la réalité des faits est plus têtue. D’ailleurs, une rumeur persistante ces derniers jours le disait en fuite. La charge présidentielle parait si insupportable en Centrafrique, en ce moment. Après avoir combattu pour le pouvoir, les leaders de la Séléka doivent être en train de se demander comment gagner la vie. A commencer par les leurs. Chaque jour, chaque instant, de combat armé qui s’impose à tous. Désormais.

 

Paix et sécurité à toutes et à tous, cette semaine !



Barthélemy KOUAME
barthelemy.kouame@fratmat.info