Justice: Les assises reprennent

Les magistrats qui siégeaient à  la Cour d’appel d’Abidjan au moment de la dernière audience des assises.
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Justice: Les assises reprennent

Suspendues depuis plusieurs années dans les juridictions pénales du pays, les audiences des cours d’assises reprennent. Et c’est le tribunal de première instance de Yopougon qui, depuis hier matin, a donné le top départ. Présidée par Abou Coulibaly, cette session, la toute première dudit tribunal qui s’est tenue en présence des responsables au plus haut niveau de la cour d’appel d’Abidjan, ainsi que d’une foule immense composée des représentants de la société civile, a, à son rôle, 43 affaires inscrites. Des affaires criminelles et autres délits annexes qui portent notamment sur le viol, l’assassinat, la tentative de meurtre, le vol en réunion à main armée. Dans leurs interventions respectives, le président de la cour et l’avocat général, représentant le Parquet général, ont exposé sur ce que recouvre de particulier la cour d’assises dans le fonctionnement de la justice répressive en matière pénale. C’est un véritable cours de droit qui a été donné aux participants qui ont pris d’assaut la grande salle des audiences.

Pour le représentant du ministère public, l’avocat général Bakayoko Ousmane Moïse, les faits portés devant la cour d’assises et les peines encourues par les accusés sont  d’une telle gravité que le législateur a décidé de ne pas les laisser à la seule compétence des professionnels du droit que sont les magistrats. Ce pourquoi, à travers les jurés retenus parmi les citoyens vertueux, le peuple se trouve pleinement associé aux membres statutaires de cette haute juridiction. Il fait savoir que la cour d’assises de Yopougon qui s’ouvre, statuera sur des affaires criminelles du tribunal de cette commune et de ses sections détachées de Dabou et Tiassalé. Par le passé, leurs procédures criminelles n’étaient jugées qu’au siège de la cour d’appel d’Abidjan (Palais de justice du Plateau).  Pour sa part, Me Beugré Adou Marcel, avocat représentant le bâtonnier en exercice, demande aux autorités compétentes de faire en sorte que les avocats commis d’office soient dotés de moyens pour accomplir leur mission de défense des accusés.

Après avoir pris acte des réquisitions du représentant du Parquet général, le président de la cour, Abou Coulibaly, conformément aux usages d’une rentrée solennelle comme celle du jour, est intervenu pour non seulement situer le contexte de la cérémonie, mais aussi et surtout pour faire des observations. Il se réjouit de ce que par l’ouverture de sa session de cour d’assises, le tribunal de Yopougon « atteint son accomplissement plénier de ressort territorial judiciaire ». En cela, il rejoint le représentant du Parquet général pour rendre un hommage appuyé à l’autorité de tutelle. A savoir le Garde des Sceaux, ministre de la Justice, des Droits de l’homme et des Libertés publiques qui, selon lui, en autorisant la tenue de la première session des assises de Yopougon, apporte ainsi sa touche personnelle à l’avènement d’une justice de proximité.

Parlant de ce qui fait l’originalité de la cour d’assises, Abou Coulibaly ouvre une lucarne sur le rôle et la raison fondamentale du recours à des jurés, ces citoyens représentant l’opinion publique aux côtés des magistrats professionnels. Tout en mettant en exergue l’importance de ces « juges » occasionnels, le haut magistrat évoque ce qui suit : « La présence des jurés explique également que les arrêts rendus par la cour d’assises ne peuvent être l’objet d’un appel, car on présume le bien-jugé chez cet aéropage de citoyens ». Pour lui, cette association de professionnels et de non professionnels du droit, donne aux arrêts desdites cours plus de cohérence et d’harmonie, en dépit de quelques critiques doctrinales.

La cérémonie de rentrée solennelle de la cour d’assises de Yopougon, faut-il le dire, a révélé un autre fait. A savoir que les magistrats professionnels censés être dans des toges rouge et blanche ne l’étaient pas tous. Renseignement pris : il y aurait un déficit de ce genre de toges coûtant plus d’un million de francs l’unité et qui ne se confectionnent qu’en Europe. Le président et l’avocat général, les seuls qui en possédaient, les auraient empruntées.

Landry Kohon