Diplomatie/Les années Houphouët : Une relation particulière avec la France

Diplomatie/Les années Houphouët : Une relation particulière avec la France

Diplomatie/Les années Houphouët : Une relation particulière avec la France                                  

Que la Côte d’Ivoire soit restée dans le giron français après avoir obtenu son indépendance politique est le choix d’un homme : d’Houphouët-Boigny, son premier président. Alors qu’en Guinée-Conakry, Sékou Touré refusa dès le 28 septembre 1958,  de faire partie de la communauté française en appelant à voter “non” au référendum l’instituant, Houphouët-Boigny  a plutôt opté pour le  “oui” en Côte d’Ivoire. Ainsi, le “non” sort gagnant en Guinée alors qu’en Côte d’Ivoire, c’est le “oui” qui l’emporte. Ces deux mots vont changer le cours de l’histoire de ces  deux   anciennes colonies françaises  à leur accession  indépendance.

Sékou Touré et Houphouët-Boigny représentent, en effet, deux visions opposées de l’indépendance.  Si le premier, selon ses propres termes “préfère la liberté dans la pauvreté à la richesse dans l’esclavage”, le second quant à lui, n’envisageait pas d’indépendance sans un accompagnement du colonisateur, la France.

Jugeant l’indépendance radicale contreproductive, le premier président ivoirien a décidé de maintenir les rapports avec l’ancien colonisateur. Stratégie payante d’autant qu’avec cette “indépendance négociée, Houphouët maintient le cordon ombilical et construit avec l’ex-colonie  des relations  privilégiées qui permettront  à son pays de bénéficier de l’assistance politique, économique, militaire etc., de l’Hexagone. Ainsi, la France devient-elle le premier partenaire économique et commercial de la Côte d’Ivoire. Du général de Gaulle à François Mitterrand, en passant par Georges Pompidou, Valérie Giscard d’Estaing ; le président Houphouët-Boigny a su entretenir et maintenir le cap.

D’ailleurs, selon une certaine littérature, il serait à l’origine de la “françafrique”, expression consacrée et utilisée d’une manière généralement péjorative pour désigner la relation spéciale, souvent qualifiée de néocoloniale entre le France et ses anciennes colonies.

Liens historiques forts pour une solide coopération économique

Au-delà des liens historiques, il y a une relation étroite entre la Côte d’Ivoire et la France  sous fond de coopération économique  et bilatérale. Après Houphouët-Boigny, Alassane Ouattara qui se réclame de sa philosophie politique a rétabli depuis 2011, des rapports rendus exécrables sous le régime Gbagbo.

La Côte d’Ivoire est aujourd’hui le 2e marché français en Afrique subsaharienne et premier client  et fournisseur de  ce pays en zone franc. Premier investisseur en Côte d’Ivoire à la fois en flux (90 millions d’euros, soit environ 68 milliards de F Cfa) et en stock (2,5 milliards d’euros, soit environ 1400 milliards de F Cfa), la France intervient aussi au travers d’une aide bilatérale significative. Des prêts concessionnels du Trésor et les interventions de l'Agence française de développement (Afd) avec ses financements propres ou au titre du Contrat de désendettement et de développement (C2D) permettent de financer de nombreux projets dans des secteurs très variés. Expertise-France mobilise également une assistance technique importante dans le domaine des finances publiques.

Après une légère baisse de 2016, les exportations françaises vers la Côte d’Ivoire ont augmenté de 10% (1 181 millions d’euros, soit environ 768 milliards de F Cfa) en 2017, grâce à la vente d’avions, aux produits pharmaceutiques qui continuent leur progression et au secteur des machines industrielles et agricoles. Côté entreprises, les chiffres restent élevés. On compte, en effet, environ 200 filiales de grands groupes français en Côte d’Ivoire,  en plus des 500 petites et moyennes entreprises françaises de droit local, faisant du « massif » de l’Uemoa, la plus forte implantation française en Afrique sub-saharienne.

C’est d’ailleurs la troisième destination des investissements directs étrangers français en Afrique de l’Ouest, derrière le Nigeria et le Ghana. En outre, les entreprises françaises sont très présentes dans la construction de projets structurants en Côte d’Ivoire. Par exemple, après le 3ème pont (Hkb) construit par Bouygues, Bolloré a obtenu le marché de la construction du 2e terminal à conteneurs du Port d’Abidjan tandis que le premier train urbain d’Abidjan, un rêve longtemps caressé par Félix Houphouët-Boigny sera réalisé avec des capitaux français et des entreprises françaises pour un coût total estimé à 1.4 milliard d’euros (environ 919 milliards de F Cfa). Sans oublier que c’est la ville de Jacqueville qui a été choisie pour abriter l’Académie internationale de lutte contre le terrorisme.

Francis Kouamé