Cpi, les avocats de Gbagbo : « Il n’y a pas eu de blocus du Golf »

Cpi, les avocats de Gbagbo : « Il n’y a pas eu de blocus du Golf »

Cpi, les avocats de Gbagbo : « Il n’y a pas eu de blocus du Golf »

Accroche : Les avocats tentent de déconstruire l’accusation de crimes contre l’humanité devant la Cpi et de mettre hors de cause les mises en cause.

Le procès de l’ex-président Laurent Gbagbo et de l’ex-leader des jeunes Charles Blé Goudé a repris hier, à La Haye, par les observations orales des avocats. En appui à une requête qu’elle a introduite devant la Cpi, la défense des deux accusés tente d’obtenir un non-lieu, en s’évertuant à montrer  que les charges sont insuffisantes.

 « Le narratif de l’accusation est fragile parce qu’il ne repose pas sur les résultats d’une enquête sérieuse. C’est le narratif des autorités ivoiriennes qu’il nous sert. Il n’y a pas, de notre  point de vue, véritablement des preuves », a estimé, d’entrée, Me Emmanuel Altit, dénonçant « un narratif préconçu ». « La question est de savoir si le dossier est vide ou pas », a rappelé le chef de file des avocats de Laurent Gbagbo.

« Le procureur n’a pas mené d’enquête autonome et indépendante. Il s’est contenté d’éléments de preuves de mauvaise qualité, anonymes, peu fiables, non authentifiés, non vérifiables, indirects. Il apparaît alors que le procureur n’a pas été capable de répondre aux failles que la défense a mises en lumière dans ses soumissions. En particulier, concernant les quatre incidents principaux », a renchéri l’avocate, Me Jennifer Naouri. Par incidents principaux, elle entend, la répression de la marche à la Rti, le bombardement du marché d’Abobo, la tuerie des femmes d’Abobo et les tueries de Yopougon.

« Il n’y a pas eu de blocus (du Golf) », a dit Jennifer Naouri, estimant qu’il s’agissait d’un « seul véhicule de surveillance » posté dans le voisinage de l’hôtel du Golf dans le cadre d’un dispositif sécuritaire et visant à éviter d’éventuelles « frictions » entre les populations riveraines et les Forces républicaines de Côte d’Ivoire (Frci).

A l’en croire, le procureur « s’est précipité de trouver des témoins », à propos de la marche des femmes, au point de prendre pour témoins des « militants du Rdr ».

Par ailleurs, des dirigeants du Rdr, selon elle, auraient rencontré des victimes des bombardements du 3 mars 2011 dans lesquels 7 femmes ont péri. Parmi ces dirigeants, certains auraient participé à l’organisation de la marche.

« Il apparaît donc que de nombreux témoins et la liste de victimes obtenue par le biais du collectif concernant les incidents de Yopougon sont peu fiables parce qu’ils résultent d’une opération politique mise en place par les responsables du Rdr », a-t-elle accusé.

L’avocate doute même de la fiabilité des certificats de décès, des permis d’inhumer et des extraits d’actes civils, dans la mesure où ces documents ont été établis ou fournis par la mairie d’Abobo, puisque la municipalité était aux mains du Rdr.

Jennifer Naouri parle de « faiblesse des expertises », s’agissant de l’autopsie des corps pratiquée par le médecin légiste ivoirien, le Pr Yapo Hélène Etté.

« Les témoignages du professeur Etté n’apportent rien », a-t-elle martelé, sans concession. « Il est matériellement impossible pour le témoin d’avoir effectué, en binôme, tous les examens. C’est le bon sens », juge l’avocate. Pour elle, soit le médecin expert « ment », soit il a « bâclé » l’autopsie.

La marche de l’opposition devant la Rti le 16 décembre 2010 ? « Une marche normale », selon Jennifer Naouri qui prétend que les incidents survenus ont été « périphériques ».

Le collectif des avocats tentera ainsi, plusieurs jours durant, de battre en brèche les faits de « crimes de guerre », de « crimes contre l’humanité » et de « plan commun » sur lesquels repose l’accusation. Début octobre, le bureau du procureur avait, de son côté, apporté des observations supplémentaires de nature à prouver la culpabilité des deux accusés.

Benoît HILI