Liberté de la presse/Traoré Moussa (UNJCI): ‘’Le 3 mai, un moment de conscientisation et de sensibilisation’’

Liberté de la presse/Traoré Moussa (UNJCI): ‘’Le 3 mai, un moment de conscientisation et de sensibilisation’’

A l’instar de tous les pays du monde entier, la Côte d’Ivoire célèbre ce 3 mai 2018, la Journée internationale de la liberté de la presse.  Quel sens donnez-vous à cet événement ? Et comment cette journée sera-t-elle célébrée par les journalistes ?

Ce 3 mai 2018, les acteurs des médias vont célébrer la Journée internationale de la liberté de la presse. Elle sera marquée ici en Côte d’Ivoire, par une importante marche devant la Radiodiffusion télévision ivoirienne (Rti), dans la commune de Cocody. Mais, il ne s’agit pas d’une marche de protestation. Ce sera un moment de conscientisation et de sensibilisation. L’objectif, en effet, c’est d’amener l’opinion nationale et internationale à comprendre le sens que revêt ce grand jour. Oui, le 3 mai est effectivement un grand jour pour nous, professionnels des médias. C’est la fête de l’indépendance des journalistes. Nous devons donc nous mobiliser pour faire comprendre que, loin d’être l’ennemi du grand public, le  journaliste est le baromètre de la société. Il faut que, ce jour-là, nous soyons mobilisés pour montrer que la liberté de la presse est sacrée. Cette marche verra la participation du ministre en charge de la Communication, Bruno Koné. L’occasion est toute indiquée pour inviter l’ensemble des Ivoiriens à y prendre part. Elle partira de la Rti, en passant par la Cité des arts, la Cité universitaire Mermoz, la Maison du Pdci, l’église Saint Jean, pour regagner la Rti. Nous attendons au moins mille professionnels, comme c’était le cas les années écoulées. Il faut signaler que le top départ sera donné dès 07h du matin, devant la Rti.

Mise à part la marche, y a-t-il d’autres éléments qui figurent au programme de cette journée?

En plus de la marche, nous aurons deux communications. La première sera faite par le directeur de cabinet du ministre de l’Intérieur et de la Sécurité. Il va nous entretenir sur le modus-vivendi qui permet aux journalistes et policiers d’entretenir de très bons rapports. Ensuite, deux confrères vont se prononcer sur la régulation de la presse numérique.

Dans le classement RSF (Reporters sans frontières), le 25 avril 2018, on a constaté que la Côte d’Ivoire a reculé d’un point. Comment vous l’expliquez? Qu’est-ce qui a coincé ?

Je m’attendais à ce classement émanant de l’ensemble des journalistes du monde entier.  Ce qu’il faut savoir, c’est que ce classement prend en compte la situation des journalistes dans chaque pays, en termes de liberté de la presse. S’il y a des journalistes qui sont assassinés ou emprisonnés, il va s’en dire que le classement va prendre un coup. Cette année, ce qui a causé préjudice à la Côte d’Ivoire, c’est l’arrestation de six journalistes en début d’année. Cette situation a vraiment pesé dans la balance. Mais à mon avis, quand on tient compte du  classement de certains pays, au regard de leur situation vis-à-vis des journalistes, j’estime honnêtement que la Côte d’Ivoire mérite d’être mieux classée. Je suis sûr qu’elle mérite d’être aujourd’hui dans le Top 50.  C’est la raison pour laquelle nous faisons tout pour que nous soyons épargnés par ce qui nous a fait plonger. Cela ne doit plus nous arriver. C’est aussi la raison pour laquelle nous nous félicitons de l’adoption de la nouvelle loi qui met fin définitivement à  l’incarcération des journalistes. Il n’y a pas de raison que la Côte d’Ivoire n’intègre pas le top 50, parce qu’en matière de liberté de la presse, nous sommes mieux lotis que nombre de pays qui sont mieux classés que la Côte d’Ivoire.

L’espoir est alors permis ! Doit-on alors s’attendre à un bond prodigieux les années à venir ?

Oui l’espoir est permis. Le combat que nous menons au quotidien, c’est de mettre tout en œuvre pour briser tous les pesanteurs en vue de permettre à notre pays d’atteindre le top 50.

Pensez-vous que la nouvelle loi qui vient d’être adoptée favorise la situation ? Quel est l’accueil qui lui a été réservé par la communauté des journalistes en Côte d’Ivoire?

Cette loi constitue une avancée par rapport à l’ancienne. Il n’y a pas de débat.  Le fait qu’il n’y ait plus de garde à vue pour les journalistes est une avancée notable. C’est pour cela que nous estimons  que nous sommes en avance, je dirai que nous sommes à des années-lumière par rapport à certains pays qui nous entourent et qui n’ont pas encore fait sauter le verrou d’emprisonnement des journalistes, même s’il y a des choses à parfaire. Mais ce que nous devons retenir, c’est qu’il y a des avancées indéniables. La loi prend en compte la presse numérique. En plus, toutes les peines ont été réduites à la baisse, sans oublier l’absence totale de garde à vue. De ce fait, cet arsenal juridique a été bien accueilli par les journalistes.

Parlez-nous du CNP (Conseil national de la presse). Que devient cette instance de régulation dans la nouvelle loi ?

Le CNP devient l’ANP (Autorité nationale de la presse). C’est bien précis dans la nouvelle juridiction sur la presse. Ce qui est attendu, c’est le décret d’application. Par ailleurs le renouvellement des membres devrait se faire, à mon sens dans les meilleurs délais.

Du CNP à l’ANP, qu’est-ce qui change fondamentalement ?

Beaucoup de choses, à commencer par la composition des membres. Par exemple, au niveau de la presse en ligne, le représentant est logé à la même enseigne que les membres représentant la presse papier. Or figurez-vous que l’ancienne loi ignorait royalement les médias en ligne.

Le 28 avril 2018, l’UNJCI que vous dirigez, a marqué un pas pour faire un bilan à mi-parcours de votre mandat. Une assemblée générale statutaire a été organisée. Quelle sont les décisions qui ont été prises ?

Vous savez, conformément aux dispositions statutaires de l’Unjci,  à mi-parcours du mandat, on doit regarder dans le rétroviseur pour voir ce qui n’a pas marché. Et ensuite corriger ce qui doit l’être. Enfin, faire des projections pour les actions à venir. C’est ce qui a été fait. Les journalistes sont venus nombreux pour exprimer des préoccupations auxquelles on s’attèle à prendre en compte. Pour l’essentiel, on a obtenu un quitus.

Revenons au 3 mai 2018. Mille professionnels des médias sont attendus à la RTI pour célébrer la liberté de la presse en Côte d’Ivoire. Quel appel avez-vous à lancer pour que ce beau monde soit effectivement présent ?  

Effectivement nous attendons mille professionnels des médias, y compris des journalistes, ainsi que l’ensemble des acteurs qui gravitent autour des rédactions. Nous invitons ce beau monde à venir magnifier la liberté de la presse, un droit fondamental universel reconnu. Le sens de cette marche, c’est de montrer que la liberté de la presse est un principe sacré qui fonde le journalisme. Nous devons le dire et le montrer aux yeux du monde. C’est un devoir qui, à mon sens, s’impose à chaque acteur des médias. L’occasion nous est ainsi donc donnée pour le dire, le montrer et le démontrer ce 3 mai 2018.

Interview réalisée par Marcel APPENA
marcel.appena@fratmat.info