David Guèye (directeur adjoint du numérique TV5Monde): "La digitalisation, pour notre chaîne, va au-delà d’une plus-value"

David Guèye, directeur adjoint du numérique TV5Monde
David Guèye, directeur adjoint du numérique TV5Monde
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David Guèye (directeur adjoint du numérique TV5Monde): "La digitalisation, pour notre chaîne, va au-delà d’une plus-value"

David Guèye (directeur adjoint du numérique TV5Monde): "La digitalisation, pour notre chaîne, va au-delà d’une plus-value"

David Guèye, vous êtes Directeur adjoint du numérique à TV5Monde. Quelles sont vos missions ?

Je participe à la stratégie numérique globale de la chaîne mais je suis particulièrement en charge de l’équipe qui réalise nos sites web et applications mobiles ainsi que de l’aspect webmarketing de nos projets.

Comment la culture du digital est vécue au sein de votre structure ?

Plutôt bien. L’ensemble des collaborateurs a pris conscience de l’importance du numérique dans leur métier d’aujourd’hui et dans leur métier de demain. Nous avons un plan stratégique qui a démarré cette année et qui va durer 4 ans. Il est orienté essentiellement vers le numérique avec des axes forts de développement pour tous les services de l’entreprise. Chacun a pu contribuer d’une façon ou d’une autre à l’élaboration de ce plan et aujourd’hui tout le monde se sent impliqué dans sa mise en oeuvre.

Pouvez-vous nous expliquer les grandes étapes de la digitalisation de votre groupe et votre nouvelle offre numérique ?

S’agissant de TV5Monde Afrique, en 2010 nous avons lancé une webTV consacrée aux programmes africains c’est-à-dire un catalogue gratuit de vidéos à la demande sur un site internet dédié. Nous avons également, depuis plusieurs années, une rubrique d’actualité africaine sur notre site information.

L’intention première de la nouvelle offre numérique Afrique est de centraliser ces 2 grands types de contenus (vidéos et articles) au sein d’une offre unique et clairement identifiable. Nous avons aussi développé au fil des années une communauté autour de nos réseaux sociaux (essentiellement Facebook et Twitter) qui dépasse aujourd’hui le million d’abonnés et qui ne cesse de progresser. Les médias sociaux jouent un rôle essentiel dans notre stratégie digitale en Afrique car c’est un moyen de diffusion à part entière et ils nous permettent de toucher une audience plus large et plus diversifiée.

Autour de quels axes, définis par la direction générale de TV5Monde, s’articule cette offre ?

Effectivement les 2 grands axes stratégiques de notre groupe à court et moyen termes sont l’Afrique et le Numérique et idéalement la rencontre des deux. C’est ce qui a donné naissance à cette offre. Il s’agit du nouveau site internet afrique.tv5monde.com mais aussi de l’application mobile gratuite TV5Monde Afrique adaptée à tous les terminaux Android et iOS. Elle bénéficiera d’une ergonomie particulièrement adaptée à la consultation sur "smartphone", mode d’accès privilégié à Internet sur le continent africain.

Nos internautes retrouvent désormais en une seule offre unique toute l’actualité africaine traitée par la rédaction de TV5Monde, tous les programmes de TV5Monde autour de la thématique africaine (séries, films, documentaires et magazines) disponibles dans de nombreux formats de résolution et de qualités différentes afin de s’adapter aux conditions de réseaux variées sur le continent et ailleurs dans le monde. Une des nouveautés est la possibilité, dans l’application mobile, de consommer certains contenus dans un mode "hors-ligne", non connecté, ce qui est un usage particulièrement utile sur le continent.

Nous comptons également développer des contenus exclusifs pour la nouvelle offre numérique, contenus en affinité avec notre cible, pour une consommation optimisée sur mobile. Il s’agira donc essentiellement de programmes courts, autour des thématiques de prédilection de la jeunesse africaine comme l’humour, la musique, le sport ou encore l’innovation.

Quelle est la plus-value de la digitalisation ?

Le développement du Digital pour une chaîne comme TV5Monde va au-delà d’une plus-value, c’est essentiel à notre croissance. Partout dans le monde, y compris en Afrique, le digital devient un support de consommation de plus en plus important. Pour nous, il s’agit de ne pas rater ce virage de la consommation des contenus vidéos qui se fait de plus en plus sur les supports digitaux. Dans certains pays, il y a toute une génération qui désavoue pratiquement la télévision classique. On n’en est peut-être pas encore là en Afrique, mais il faut tenir compte de cette évolution de la consommation qui a tendance à se généraliser.

Après 25 ans d’existence, quelle est la part d’audience cumulée par votre chaîne ? Et quel a été l’apport de cette stratégie dans son accroissement?

En 2017, TV5Monde Afrique a rassemblé chaque semaine 53,5% de téléspectateurs africains âgés de 15 ans et plus, et conserve son rang de première chaîne internationale sur cet indicateur. Pour ce qui est de l’audience de la chaîne, nous cumulons plus de 29 millions de téléspectateurs en audience cumulée hebdomadaire.

Il est clair que nos actions sur le digital servent cette croissance et la notoriété de la chaîne car nous faisons la promotion de la chaîne et des programmes qu’elle diffuse de manière très régulière sur nos sites et nos réseaux sociaux. Il est cependant très difficile de mesurer exactement l’impact de ses actions sur l’audience de notre antenne.

Votre chaîne de télévision a élargi son offre de contenu sur Internet. Comment entendez-vous être un acteur de taille sur ce média ?

TV5Monde Afrique a un positionnement unique sur le marché pour ce qui est de son offre vidéo digitale. Nous proposons un catalogue de vidéos accessibles partout, en streaming, dont certaines sont téléchargeables et le tout gratuitement ! Dans l’univers francophone et même anglophone en Afrique, nous sommes les seuls à faire cela. Des acteurs plus ou moins nouveaux comme Iroko ou TracePlay, ou d’autres plus classiques comme Canal+ ont aussi des offres mais elles sont toutes sur un modèle payant.

Nous comptons bien nous démarquer avec cette spécificité. De plus, la qualité des contenus que nous proposons est également un atout. Nous sommes diffuseurs de productions africaines francophones, notamment de fictions, et c’est ce qui fait notre spécificité. Certains de ces programmes sont des exclusivités TV5Monde !

Sur le plan commercial, comment utilisez-vous ce nouvel univers qu’est le digital pour vendre vos offres ?

TV5Monde a une mission de service public et à ce titre, nous ne commercialisons pas nos contenus. Notre vocation est de diffuser la culture francophone gratuitement sur le continent et ailleurs dans le monde. Notre objectif est de diffuser nos contenus à un public le plus large possible et notre stratégie digitale participe activement à cet objectif.

Quel sera, selon vous, l’avenir des chaînes de télévision en Afrique face au fort développement du marché numérique sur le continent ?

Je pense que l’écran de télévision est et demeurera encore un support de diffusion important en Afrique. Cependant, il est indéniable que les chaînes de télévision doivent aujourd’hui composer avec les réalités de la consommation des vidéos qui est de plus en plus « à la demande ». Les offres numériques des chaînes doivent venir en complément de l’offre TV traditionnelle et donner une seconde vie aux programmes. L’importance des réseaux sociaux est également à ne pas négliger pour les médias. C’est un moyen de diffusion pour les chaînes de télévision, qui offre des possibilités de communication et d’interaction que l’écran de télévision ne permet pas. Il est indispensable aujourd’hui de maintenir le lien avec les téléspectateurs qui sont aussi de plus en plus des internautes.

Entre les 8 et 9 avril 2015, votre chaîne a été l’objet de cyberattaque et vous avez promis d’investir au moins 10 millions d’euros dans la cybersécurité. Pratiquement deux ans après, quel est l’état de cet investissement ? Désormais, peut-on affirmer que TV5Monde est à l’abri de toute attaque ?

Effectivement, nous avons bien été contraints d’investir à cette hauteur depuis 2015 et nous savons que les nouvelles mesures de sécurité mises en place au sein de notre entreprise continueront à nous coûter cher. Le travail de sécurisation de nos systèmes est long, fastidieux, contraignant et onéreux. Mais nous ne pouvons hélas pas faire l’économie de cet investissement. Personne n’est à l’abri et le risque zéro n’existe pas. Aucun système informatique n’est parfait. On ne peut donc pas dire (pas plus que n’importe quelle entreprise) que nous sommes désormais à l’abri de toute attaque. Néanmoins, nous mettons tout en oeuvre pour assurer notre protection.

Interview réalisée par CHEICKNA D. Salif

salifou.dabou@fratmat.info