Proche – Orient : Obama relance la question de deux états indépendants

Barack Hussein Obama
Barack Hussein Obama
Barack Hussein Obama

Proche – Orient : Obama relance la question de deux états indépendants

Pour le deuxième jour de sa visite en Israël et en Palestine, Barack Hussein Obama a rappelé les poncifs qui fondent ses solutions pour une paix durable au Proche-Orient et notamment entre Israéliens et Palestiniens. Daniel Shek, candidat sur la liste Hatnuah de Tzipi Livni aux dernières élections législatives situe le sens et les enjeux de la tournée du Président américain, qui a revu, malgré son air enthousiaste, ses ambitions à la baisse quant à ses capacités à régler la crise israélo-palestinienne : «Je ne crois pas que Barack Obama s’impliquera beaucoup plus qu’il ne l’a fait lors de son premier mandat. Mais il a choisi un Secrétaire d’Etat, John Kerry, qui, lui, est un grand connaisseur de notre région. Il a déjà annoncé qu’il compte passer beaucoup de temps sur le dossier israélo-palestinien».

Puis d’une constatation sans équivoque, il s’épuise en questionnements. Barack Obama est en Israël. Il y est venu sans propositions et sans initiatives pour relancer le processus de paix israélo-palestinien. Le but de ce voyage n’est-il pas de réchauffer les relations entre Israël et les Etats-Unis, et Benjamin Netanyahou et Barack Obama ?

La colonisation :la pomme de discorde

 Les faits sont loin de contredire sa vision sur cette visite. En visite jeudi à Ramallah, en Cisjordanie, Barack Obama s’est prononcé en faveur d’une solution à deux Etats au Proche-Orient, sans toutefois appuyer le gel de la colonisation israélienne que réclament les Palestiniens. « Sur la base des conversations que j’ai eues avec le Premier ministre Netanyahou et le président Abass, je pense que la possibilité d’une solution à deux Etats continue à exister », a déclaré Obama lors d’une conférence de presse qu’il a conjointement animée avec Mahmoud Abass pendant deux heures et demie.

Il a, par ailleurs, reconnu que «le peuple palestinien méritait la fin de l’occupation et des humiliations quotidiennes qui en découlent » et a fait une profession de foi sous une forme d’insistance : «Les Palestiniens méritent leur propre Etat». Mais les divergences ontologiques sont réapparues sur les moyens que doivent utiliser Hébreux et Palestiniens et les voies que doit emprunter la communauté internationale pour l’édification de deux Etats en Palestine selon le traité de 1947. Quand Obama indique que la question de la colonisation juive en Cisjordanie doit être réglée lors des pourparlers de paix et non par un  gel de la construction, comme l’exigent les Palestiniens, Mahmoud Abass réaffirme que la colonisation est un « obstacle catastrophique sur le chemin de la paix. » 

S’adressant directement aux Israéliens, de retour de la Cisjordanie, dans un discours jugé vibrant par les agences de presse devant des centaines de jeunes à Jérusalem, il a réitéré ses engagements à empêcher l’Iran de se doter de l’arme nucléaire et son appel au départ du président syrien, Bachar al-Assad : «l’Iran ne peut pas obtenir d’arme nucléaire. C’est un danger qui ne peut pas être endigué », a-t-il prévenu répétant que « toutes les options étaient sur la table » pour y parvenir.  Obama, au sujet du conflit syrien, a martelé : «Assad doit partir pour que l’avenir de la Syrie puisse commencer » puis il a également appelé la communauté internationale à classer le Hezbollah chiite libanais, allié de Téhéran et de Damas, comme « organisation terroriste.»

 Le guide suprême d’Iran, Ali Khamenei, s’est dit jeudi, pour la première fois, «  pas opposé » à un dialogue direct avec Washington sur la question du programme nucléaire controversé de Téhéran, tout en menaçant de « réduire en poussière Tel-Aviv et Haïfa » en cas d’attaque israélienne.

Irak : redevenir une puissance régionale

 Dans cette région, dix ans après la guerre, l’Irak tente de redevenir une puissance régionale. Myriam Benraad, chercheuse associée au Ceri-Sciences Po et à l’Institut de recherches et d’études sur le monde arabo-musulman (Iremam), estime que deux dimensions importantes se dégagent de la situation de l’Irak aujourd’hui.

D’un côté, on voit nettement que Bagdad veut de nouveau s’affirmer comme une grande puissance. De l’autre côté, le pays demeure une caisse de résonance des équilibres régionaux. La Turquie et l’Arabie-saoudite soutiennent ainsi les sunnites qui se sentent lésés depuis la chute de Sadam Hussein. Ankara a notamment offert refuge à l’ancien vice-président irakien et sunnite, Tarek Hachémi, condamné à mort en septembre 2012. Mais, fait-elle remarquer, en même temps, l’Irak veut se positionner comme une puissance régionale. On peut le voir sur le dossier syrien lorsqu’en 2011, Bagdad s’est démarquée de la majorité des membres de la Ligue arabe en refusant de voter des sanctions contre le régime de Bachar al-Assad. Son attitude au sein de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) est également significative : de plus, en plus elle tente de contrebalancer l’influence de l’Arabie-saoudite dans l’organisation.

 A l’échelle internationale, le pouvoir irakien tente également de s’affirmer et entend bien ne pas se laisser dicter sa conduite par les Etats-Unis. C’est pour cette raison que Bagdad a opéré un rapprochement clair via notamment d’importants contrats d’armements avec la Russie et la Chine, deux puissances qu’on peut considérer comme rivales des États-Unis. Sur la crise syrienne, Myriam Benraad note qu’il est évident que l’Irak calque sa position sur celle de l’Iran, grand allié de Damas dans la région. Mais Bagdad cherche aussi son propre intérêt en jouant la prudence.

Le gouvernement craint deux choses. D’une part, il a peur que le conflit ne déborde à l’intérieur des frontières irakiennes, ou du moins qu’il ne déstabilise un équilibre communautaire déjà très précaire entre sunnites et chiites. D’autre part, le gouvernement craint que le soulèvement en Syrie ne se solde par l’avènement d’un régime islamiste. Or Bagdad ne souhaite pas cela à ses frontières.

Franck A. Zagbayou