Afrique du Sud : Les politiques autour de Mandela, mais également en campagne

Nelson Mandela
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Afrique du Sud : Les politiques autour de Mandela, mais également en campagne

En avril 2014, l’Afrique du Sud organisera l’élection présidentielle pour trouver un successeur à Jacob Zuma, au cas où celui-ci ne se représenterait pas. La maladie de Nelson Mandela, premier Président noir du pays et héros de la lutte anti-apartheid, qui cristallise toutes les passions depuis son hospitalisation, le 8 juin, à Pretoria, n’y change rien. Les fréquentes visites, très médiatisées, au père de la nation arc-en-ciel –bien que nécessaires- apparaissent comme un moyen de maintenir la flamme militante. De quoi maintenir autour de Zuma, actuel Chef d’Etat, l’élan  de sympathie que le peuple voue au combattant de la liberté et au défenseur de l’égalité. Il y a quelques semaines, le bain de foule du Président Zuma, dans le township de Soweto, où a résidé Mandela avant son arrestation et son incarcération, avait pris l’allure d’un meeting de mobilisation. D’autant qu’il n’avait évoqué la santé de l’ancien dirigeant de l’Anc à qui il venait de rendre visite dans un hôpital privé de Pretoria.

Forcer de partager

A ce jour, nul ne sait si le président du Congrès national africain (Anc) et successeur de Thabo Mbeki briguera un nouveau mandat de cinq ans. Puisque l’annonce n’a pas encore été faite officiellement. En plus, dans une déclaration, il y a quelques années, il laissait entrevoir qu’il ferait un seul mandat, note Rfi. Cependant, le récent remaniement ministériel opéré le 9 juillet, et concernant neuf portefeuilles dont quatre ont été attribués à de nouveaux titulaires, laisse présager qu’il nourrirait l’intention de demeurer à son poste. Puisque la presse indique que la principale victime de sa décision est son ancien rival lors du congrès de décembre 2012, le richissime ministre du Logement, Tokyo Sexwale, « pour faire avancer (le) changement ».

Et si Zuma devait se représenter, il aurait toutes les chances de l’emporter parce que son parti, l’Anc, demeure toujours favori, avec 2/3 de l’électorat favorable. A défaut, le vice-président de l’Anc, ex-syndicaliste reconverti dans les affaires où il s’est enrichi, Cyril Ramaphosa, est pressenti comme un probable successeur.

L’ancien président de la Ligue de jeunesse de cette formation politique durant quatre ans, le populiste et tribun, Julius Malema, 32 ans, qui en a été radié, début 2012, par le conseil de discipline, pour « indiscipline » et propos jugés haineux et violents, tente de prévenir le raz de marée de l’année prochaine. A défaut d’empêcher la réélection du président de l’Anc, qui sera également le candidat du parti à la Présidence de la République, il pourrait jouer les trouble-fêtes. C’est la raison du lancement, très bientôt, du parti « anticapitaliste et anti-impérialiste », économic Freedom Fighters-Combattants pour la liberté Economique (Eff), comme il l’a annoncé, jeudi, à la presse. Cette formation « serait un mouvement de gauche radical, anticapitaliste anti-impérialiste qui devrait participer aux élections », rapporte l’Afp. Ainsi, un rassemblement national des partisans de Juluis Malena est prévu, les 26 et 27 juillet, à Soweto, pour décider formellement du lancement de son parti. En retrait de l’activité politique depuis son exclusion suivie de déboires judiciaires, il ferait alors un retour sur la scène nationale. Il a bâti sa notoriété en développant des thèmes provocateurs, notamment la nationalisation des mines et la réforme agraire sur la base d’une expropriation sans compensation des grands propriétaires fermiers qui sont des Blancs. Hier allié de Jacob Zuma dans sa quête du pouvoir contre Mbeki, Julius Malema s’est ensuite braqué contre le Président. « Ces mines que nous voulons nationaliser, nous n’allons pas les payer. Personne ne va être rejeté à la mer, mais les Blancs doivent se préparer à partager. S’il n’y a pas de partage, vous serez forcés à partager », a-t-il prévenu.

Un discours qui avait été qualifié de raciste et contraire à la philosophie du père de la nation arc-en-ciel, Nelson Mandela, qui a décidé de léguer une nation multiraciale et multiculturelle. « Eff est l’héritier de la lutte » contre l’apartheid, a relevé l’ex-président de la Ligue de jeunesse de l’Anc. Pour montrer qu’ils demeurent auprès des pauvres alors que la direction de l’Anc est accusée d’affairisme, ses amis et lui promettent de payer les frais des honoraires des avocats qui défendent les familles des 34 mineurs qui ont péri dans les mines de platine de Marikana. Malema y avait, en son temps, organisé une manifestation de protestation aux côtés des  ouvriers après ces tueries de la police qui ont rappelé les pires moments de l’apartheid.

La justice aux trousses de Malema

Ses déboires judiciaires sont loin d’être finis, après son exclusion du parti présidentiel et la vente de sa superbe villa par le fisc pour se faire rembourser. Lui qui accuse ses anciens responsables de corruption est poursuivi pour avoir monnayé son appui pour l’obtention de marchés publics. Ce qui lui vaudra un procès du 18 au 29 novembre. « Plus tôt le procès sera terminé, mieux ce sera », a-t-il déclaré, lors d’une nouvelle comparution, les 20 et 21 juin, devant un tribunal de Polokwane, capitale de la province du Limpopo, où des faits de « corruption, racket et blanchiment d’argent » lui sont reprochés.

C’est le 18 décembre 2012 que Jacob Zuma a été réélu à la tête du parti avec 75 % des suffrages par 4500 délégués. Son vice-président Cyril Ramaphosa a obtenu, quant à lui, 76,4 % des voix. Le Kwazulu-Natal, la province d’origine du Président, compte plus de délégués. Le magazine Forbes évalue la fortune de Cyril Ramaphosa à 675 millions de dollars. Sa richesse et le fait qu’il soit membre du conseil d’administration de la société Lonmin, la compagnie minière qui exploite le platine à Marikana, seront exploités contre lui par Julius Malema durant la campagne. Le comité de discipline de l’Anc a exclu définitivement ce dernier, le 12 avril, après de multiples appels, pour avoir notamment interrompu une réunion des dirigeants du parti, en août 2011. Egalement pour avoir appelé à un changement de régime au Botswana. Enfin, pour avoir accusé le président Zuma de ne pas avoir de politique africaine.

Paulin N. Zobo