Relecture d’une élection

Venance Konan
Venance Konan
Venance Konan

Relecture d’une élection

Commençons par féliciter la Cei qui n’a essuyé aucune critique négative, mais a, au contraire, été félicitée par tous les observateurs de cette présidentielle 2015. Bien sûr, les candidats qui ont jeté l’éponge ont invoqué sa composition et sa supposée partialité pour justifier leur retrait, mais personne n’a été dupe. Ils ont juste cherché à éviter l’humiliation. Il y a aussi l’inénarrable Mamadou Koulibaly qui, tout au long du processus, aura choisi de jouer le mauvais garnement de l’école, celui qui lance des boules puantes dans la classe ou met des punaises sur les bancs de ses camarades, en cherchant à perturber le scrutin du début jusqu’à la fin. Les Ivoiriens ont eu là une bonne occasion d’apprécier son manque évident de maturité. Il est difficile de croire que cet homme a dirigé notre Parlement pendant dix ans. Avec le cas Mamadou Koulibaly et les limites intellectuelles dont ont fait preuve certains candidats, il serait certainement judicieux que nous réfléchissions, dès à présent, sur la manière de faire en sorte que des plaisantins ne viennent pas utiliser l’élection présidentielle comme terrain de jeu. Le choix du chef de notre pays est une affaire trop sérieuse pour que n’importe quel farfelu vienne s’y exhiber.

Par ailleurs, pour la première fois, aucun candidat n’a contesté les résultats donnés par la Cei et confirmés par le Conseil constitutionnel auquel nous associons ces félicitations. Personne n’a oublié le discours d’anthologie délivré par le président de cette  institution le jour de la prestation de serment du Président de la République. Notons que lors de la dernière présidentielle, la Cei, dirigée par le même président, n’avait pas du tout démérité. Le problème est venu de ce que le perdant de l’élection qui était le Président en exercice et chef suprême des armées n’avait pas voulu reconnaître sa défaite.

Poussons maintenant un grand barrissement d’autosatisfaction après les félicitations que le Conseil national de la presse (Cnp) a adressées à la presse de service public, dont Fraternité Matin, pour notre couverture impartiale de la campagne et du scrutin. Bien sûr, en plusieurs occasions, le Cnp nous a rappelé à l’ordre, mais si dans l’ensemble, il s’estime satisfait, nous n’en sommes que plus heureux.

à présent, quels sont les points saillants que l’on pourrait retenir de ce scrutin ? Comme il fallait s’y attendre, le nord et les bastions traditionnels du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (Pdci-Rda) ont massivement voté pour le candidat du Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (Rhdp). Comme quoi, contrairement aux calculs faits par les stratèges de ceux que l’on a appelé les frondeurs ou les « irréductibles » du Pdci-Rda, le président de ce parti a toujours beaucoup d’autorité et d’influence au sein de sa formation politique et ses militants adhèrent totalement à ses décisions. Au moins l’un des frondeurs du Pdci-Rda avait misé sur le fait que Bédié n’aurait pas été suivi par la majorité de ses militants qui auraient alors reporté leurs voix sur lui. On remarque aussi la progression du taux de participation et de l’adhésion à la politique du Président Ouattara dans les régions de La Mé et des Montagnes, qui étaient traditionnellement acquises au Front populaire ivoirien (Fpi). On peut y voir les effets des visites du Chef de l’état dans ces régions, surtout dans les Montagnes où il s’est rendu au moins trois fois, et du travail effectué par les cadres Rhdp de ces régions sur le terrain. On pourrait y voir aussi le réalisme des populations qui ont compris qu’elles ne peuvent pas bâtir leur avenir sur le passé que représente aujourd’hui Laurent Gbagbo. Que leur proposent les tenants du « Gbagbo sinon rien » ? Rien, justement! Alassane Ouattara, lui, leur promet un avenir meilleur. Le choix est vite fait. En outre, les personnes qui parlent d’un échec de la réconciliation nationale devraient mieux méditer le taux de participation de ces régions de l’ouest et de La Mé. C’est surtout dans l’ouest montagneux que l’on parle de crimes qui auraient été commis par des forces loyales au Président de la République, ces crimes pour lesquels l’on parle de justice des vainqueurs. Et pourtant, là-bas, l’on a refusé d’obéir au mot d’ordre de boycott de l’élection. à Duékoué, par exemple, le taux de participation a été de 53,20% et celui de toute la région du Guémon de 51,59%, et le candidat Alassane Ouattara y a obtenu 78,57%.

Notons aussi le recul du taux de participation dans des communes comme Abobo, Adjamé ou Koumassi qui étaient traditionnellement acquises au Président Ouattara. Les maires de ces communes devraient faire leur examen de conscience et se demander s’ils ont fait et bien fait tout ce qu’ils avaient à faire pour que leurs administrés se sentent heureux de vivre dans ces communes.

Venance Konan