Préserver les acquis

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Toutes les populations de la région du Moronou sont invitées à se mobiliser massivement, en vue de réserver un accueil chaleureux à monsieur le Premier ministre. » J’ai lu ce communiqué dans Fraternité Matin du samedi dernier. Cela fait environ vingt ans que les populations de cette région attendent que cette voie, d’une cinquantaine de kilomètres, soit réhabilitée. Elle s’est totalement fermée depuis des années, obligeant les usagers en partance pour Kotobi, Bongouanou, M’batto, Ouellé, Mbahiakro, Prikro ou Daoukro, à faire un long détour par Bonahouin.

Affi N’guessan, qui est originaire de cette région, (il a même été maire de Bongouanou), a été Premier ministre de  ce pays, et pendant les dix ans où son parti a dirigé  ce pays, cette route est restée en l’état, c’est-à-dire, totalement impraticable. Cette voie, après celle qui va d’Adzopé à Abengourou, qui vient d’être totalement réhabilitée, va être à son tour refaite. Qui, habitant ou vivant dans le Moronou, l’Iffou ou l’Indénié n’est pas heureux de voir ces routes à nouveau praticables ? Qui, dans ce pays n’est pas heureux de circuler sur des routes où l’on gagne du temps, où l’on n’abime pas sa voiture ? J’ai pris l’exemple de cette route que l’on va arranger, parce que cela est d’actualité; mais il y en a beaucoup d’autres qui ont été construites ou réhabilitées depuis l’arrivée au pouvoir d’Alassane Ouattara, partout dans le pays. Au temps d’Houphouët-Boigny et d’Henri Konan Bédié, la Côte d’Ivoire s’enorgueillissait d’avoir le meilleur réseau routier d’Afrique de l’ouest. Cela a contribué aussi à ce que l’on a appelé le « miracle ivoirien ». Sous Gbagbo, tout ce réseau routier n’a plus été entretenu et circuler dans notre pays était devenu un vrai calvaire. Mais dire que la route précède le développement n’est pas simplement une formule. C’est une réalité.

Bien sûr, je sais que vous serez nombreux à me répondre que la route ne se mange pas et ne paie pas les factures d’électricité. Moi je persiste à dire que si la route ne se mange pas, elle fait par contre manger. à condition que l’on ait envie de gagner sa vie par soi-même et non sur le dos des autres. Quel investisseur, ivoirien ou étranger, irait construire une usine dans un endroit où il n’y a pas de route ou d’électricité ? Parlons justement d’électricité. Admettons que la Compagnie ivoirienne d’électricité (Cie) en fait trop, et qu’elle a vraiment augmenté ses factures plus qu’il ne fallait. Mais qu’est-ce qui justifie que l’on saccage ses locaux, ceux de certaines banques, d’une préfecture, la résidence d’un maire, etc.?  Je crois que nous vivons là les séquelles de cette période où chacun faisait ce qu’il voulait, pillait, volait ou violait qui il voulait, en toute impunité. Il est temps que l’autorité de l’État s’affirme. Il est vraiment temps.  Non pas seulement pour ces actes de vandalismes et de pillages, mais aussi pour tout le reste. Les Ivoiriens ont le sentiment, basé sur des faits réels ou sur des fantasmes, que là-haut, il y a un immense laisser-aller, où chacun prend ce qu’il peut, et qui fait que l’on oublie ceux d’en-bas. Je crois que le problème de ces jours-ci est beaucoup plus une question de communication au niveau de la Cie. Cela peut être corrigé rapidement. Mais lorsqu’un mécontentement à propos des factures d’électricité débouche sur des pillages de maison, de préfectures, de banques, on est obligé d’avoir une autre lecture. Ces mouvements ne cachent-ils pas autre chose ? Si oui, quoi ? Une lecture plus fine s’impose. Qui a commis ces actes de vandalisme ? Où ont-ils été commis ? Une lecture rapide me fait penser que certains Ivoiriens ont cru qu’Alassane Ouattara était un magicien qui allait d’un coup de baguette magique changer leur vie, sans qu’ils ne fassent d’effort.  Et ils se sentent frustrés de ne pas voir ce miracle arriver. Ils ne réalisent pas que le fait que notre pays soit à ce niveau aujourd’hui, après tout ce qu’il a subi, est déjà le miracle qu’a accompli Alassane Ouattara. Ce que nos compatriotes doivent comprendre maintenant, c’est que l’autre miracle qui changera réellement leurs vies, est le travail qu’eux-mêmes fourniront. Tous les Ivoiriens doivent retenir cela : l’émergence qu’Alassane Ouattara nous promet ne nous sera pas offerte. Ni par lui, ni par aucun autre pays ou institution. Elle viendra de notre travail, de notre sueur. Que les habitants de Bouaké intègrent le fait que le temps où ils ne payaient pas de factures d’électricité est bien révolu. Que les Ivoiriens intègrent le fait que plus rien ne leur sera offert gratuitement. Et qu’ils réalisent, comme me l’a dit un jour un ambassadeur européen, que leur pays est, en Afrique, l’un des rares où l’on peut boire l’eau du robinet sans crainte, et où les coupures d’électricité durent le moins longtemps. Chacun peut vérifier cela par ses propres moyens. Internet sert à cela aussi.

Venance Konan