Persévérer dans l’effort

Plume
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Persévérer dans l’effort

 

Nous en avons eu moins que souhaité. Que faut-il en déduire ? Il faut en déduire que nous devons persévérer dans l’effort de redressement de notre pays et dans les actions susceptibles de le rendre plus attractif. Nous ne sommes pas les seuls à solliciter les investisseurs. Et ces investisseurs iront forcément là où ils se sentent le plus en confiance. Il n’y a pas très longtemps, la Côte d’Ivoire était tout simplement infréquentable. Pendant une dizaine d’années, nous avons vécu au sud du pays, à l’ère des escadrons de la mort, des saccages de biens, surtout ceux appartenant à des Français et généralement aux Européens, des barrages policiers destinés au racket à tous les carrefours, sur tous les ponts, aux entrées et sorties de toutes nos villes. Pendant ce temps, dans le nord du pays, nous vivions sous la coupe des rebelles pillards qui enfermaient des hommes dans des conteneurs exposés au soleil. Le pays n’a été véritablement repris en main qu’à partir d’avril 2011. Cela fait déjà cinq ans. Mais que de travail abattu pendant ces cinq ans ! Notre pays qui se classait dans les bas-fonds de tous les indicateurs de développement remonte peu à peu à la surface. Et en cinq ans, nous sommes passés d’une croissance négative à une croissance à deux chiffres, et toutes les infrastructures sont en train d’être réhabilitées.

Oui, nous pourrions citer à satiété tout ce qui a été réalisé depuis l’avènement de ce pouvoir et dont nous pouvons à juste titre être fiers. Mais tout cela ne suffit pas pour faire le bonheur des peuples, surtout lorsqu’une partie non négligeable de la population vit encore dans la précarité et l’insécurité. Oui, toutes les réussites engrangées ces cinq dernières années ne doivent pas cacher ce qui reste à faire, et, à la vérité, il reste encore beaucoup à faire. La mauvaise humeur exprimée par les Ivoiriens dans les jours qui ont précédé la fête du travail de cette année signifie clairement que nous devons garder les manches toujours retroussées et ne point aspirer au repos. Le message a été parfaitement entendu par le premier des Ivoiriens qui a su apaiser ses concitoyens. Cependant, nous devons garder en tête la nécessité d’être toujours à l’écoute des populations et d’être très attentifs à ne pas décevoir leurs attentes, ou tout au moins, savoir communiquer avec elles. Généralement, nos populations ne demandent pas la lune, mais seulement que l’on ne leur donne pas l’impression de les avoir oubliées ou de les mépriser. Pourquoi ne pas mettre en place une sorte de plan Marshall pour certains quartiers assez emblématiques d’Abidjan et qui ont payé le prix fort pour la libération de notre pays ? De grands travaux ont été réalisés dans la ville d’Abidjan, mais certains quartiers ont le sentiment d’avoir été oubliés. Dans une interview parue dans Fraternité Matin du samedi 21 mai dernier, le sociologue Francis Akindès proposait une discrimination positive dans les zones de grande pauvreté où se développe une nouvelle criminalité perpétrée par des enfants que l’on a surnommés « microbes ». Cette criminalité n’est pas née par suite d’une génération spontanée. Elle a été engendrée par des conditions sociales bien spécifiques et la répression seule n’en viendra pas à bout, si rien n’est fait pour changer les conditions qui l’ont fait naître. Pire, elle risque de s’étendre à d’autres quartiers, rendant toute la ville d’Abidjan invivable.

Le message que nous ont envoyé les investisseurs privés à Paris est aussi celui-ci : nous devons toujours travailler à améliorer ce qui est. Il a beaucoup été question dans les commentaires, de l’environnement des affaires qui a besoin d’être encore plus assaini. Des instruments tels que la Cour arbitrale de Côte d’Ivoire (Caci) ou la Haute autorité pour la bonne gouvernance ont été mis en place. Mais il semble qu’ils ne suffisent pas encore à rassurer les investisseurs privés, même si nous avons gagné des points sur le baromètre de la bonne gouvernance. La leçon à en tirer est que, dans ce domaine, l’effort doit être permanent, tant l’image de la Côte d’Ivoire s’était dégradée. Il est vrai que, bien souvent, l’on affirme des choses qui sont très loin de la réalité, et que la perception que l’on en a se substitue à leur vraie réalité. Nous devons donc travailler à ce que cette mauvaise perception change. En sanctionnant par exemple, ou en nous séparant de ceux dont la mauvaise réputation a atteint des sommets.

Venance Konan