Le Fpi et la réconciliation

Venance Konan
Venance Konan
Venance Konan

Le Fpi et la réconciliation

Dans l’interview qu’il a accordée en exclusivité à Fraternité Matin et à la Rti, il a dit, à propos de la réconciliation, ces phrases fortes que je vous propose à nouveau : « Il y a du travail à faire. Mais il faut pousser ; il y a des progrès. Certains ne sont pas là, mais cela ne veut pas dire qu’ils ne seront pas présents. Ils vont être obligés d’aller de l’avant et ce sera beaucoup plus facile, dès l’instant où on pensera à l’avenir du pays, à l’intérêt national, à l’intérêt des populations et non à celui d’un groupe politique ou individuel. »

Depuis des jours, des semaines, des mois, avant l’arrivée de Kofi Annan, les partisans de Laurent Gbagbo, avec Affi N’Guessan en tête, ne cessaient pourtant de répéter que sans Gbagbo, il ne saurait y avoir de réconciliation dans ce pays. Je suppose qu’en parlant de ceux qui ne sont pas encore présents au rendez-vous de la réconciliation, M. Annan faisait allusion aux partisans de M. Gbagbo ou peut-être à lui-même. Le Fpi, par la voix de son président actuel, dit qu’il n’y sera pas sans son leader. Que devons-nous donc entendre par là ?

« Il n’y aura jamais de réconciliation tant que Gbagbo ne sera pas présent. » C’est ce que Affi N’Guessan et les militants du Fpi répètent partout. Qu’est-ce que cela signifie concrètement ? Sont-ils déterminés à prendre les armes contre M. Ouattara qu’ils estiment illégitime ? Ne veulent-ils plus adresser la parole à tous ceux qui, dans ce pays ou ailleurs, le reconnaissent comme le Président de la Côte d’Ivoire ? Saboteront-ils tout ce qu’il fera dans l’intérêt du pays, parce que pour eux, le seul qui est habilité à agir dans ce sens est M. Gbagbo ? Resteront-ils simplement à bouder dans leur coin, en attendant son retour? Il serait très intéressant que nos amis du Fpi nous expliquent clairement ce qu’ils entendent par cette phrase qu’ils répètent partout. Ils n’ignorent pas que Laurent Gbagbo étant déjà à La Haye, son sort ne dépend plus des autorités ivoiriennes. Aujourd’hui, nous sommes devant deux cas de figure possibles : ou M. Gbagbo est maintenu en détention à La Haye, pour une période que nous ne sommes, pour le moment, pas en mesure de déterminer, ou il est libéré. Que feront le Fpi et les partisans de M. Gbagbo dans le premier cas de figure ? Feront-ils la guerre au reste de la Côte d’Ivoire pour faire tomber celui qu’ils considèrent comme leur bourreau ? Resteront-ils dans leur coin en disant que tout ce qui se passe désormais dans le pays ne les regarde plus, parce qu’ils ne sont plus capables de vivre sans leur idole  près d’eux ?

« Ce sera beaucoup plus facile, dès l’instant où on pensera à l’avenir du pays, à l’intérêt national, à l’intérêt des populations et non à celui d’un groupe politique ou individuel. » C’est le conseil que nous a donné Kofi Annan.

Que veut le Fpi ? Que veulent les partisans de Laurent Gbagbo ? Que veulent-ils que les Ivoiriens retiennent de leurs projets pour la Côte d’Ivoire, si tant est qu’ils en auraient un ? L’avenir du pays, de ses habitants ou uniquement leurs larmes ? Veulent-ils, parce qu’ils pleurent l’absence de Laurent Gbagbo, que les Ivoiriens versent à nouveau des larmes ?

À mon humble avis, sans oublier Laurent Gbagbo, les militants du Fpi et tous ceux qui se réclament de cet homme devraient plutôt chercher à construire une nouvelle Côte d‘Ivoire où tout ce que nous avons vécu ne se reproduirait plus jamais. Trop d’opportunités s’offrent, en ce moment, à notre continent et singulièrement à notre pays pour que nous passions notre temps à nous mortifier dans les larmes et le souvenir d’un seul homme, fût-il très grand. Si Laurent Gbagbo devait revenir libre dans ce pays, le meilleur cadeau que ses partisans pourraient lui offrir serait une Côte d‘Ivoire déjà réconciliée dans laquelle il s’insèrerait.

Venance Konan