L’union, avant tout

Plume
Plume
Plume

L’union, avant tout

 

En tout état de cause, tous les Ivoiriens savaient qu’une telle chose était dans l’ordre du possible dans leur pays. Nous avions d’ailleurs lancé un débat sur ce sujet dans notre journal et de nombreux lecteurs avaient fait de judicieuses propositions pour faire face à cette menace. Nous avions tous vu ce qui s’était passé au Mali, puis au Burkina Faso. Nous savons ce qui se passe quotidiennement au nord du Nigeria, au Cameroun, au Niger, au Tchad, au Kenya, en Somalie, en Tunisie, en Libye… Nous nous y attendions, tout en espérant que cela ne se produirait pas. Nous savons que nos services de renseignements ont déjà déjoué plusieurs attaques de ce genre, mais que peut un état contre cette nouvelle hydre ? Que peut un état contre un jeune homme d’une vingtaine d’années dont le cerveau a été lavé par un autre homme, diaboliquement intelligent, pour le persuader que sa vie sera encore meilleure s’il se fait tuer après avoir lui-même tué le plus de personnes possible?

Nous avons tous du mal à comprendre comment des jeunes gens qui auraient pu mener une belle vie sur terre la rejettent pour en espérer une autre, peuplée de femmes éternellement vierges, malgré tous les assauts qu’ils leur feront subir, et de fontaines de miel. Nous avons du mal à comprendre que l’on les convainque que pour accéder à un tel monde, il faille d’abord tuer d’autres hommes et femmes. Mais il en est ainsi. Nous ne comprenons pas, et chaque jour, Boko Haram, l’état islamique, Aqmi, Al Shebab, et tous les djihadistes du monde entier lancent des attaques meurtrières contre tous ceux qui ne voient pas le monde à travers leurs lunettes. Des états aussi puissants et outillés sur les plans technologique et humain que les états-Unis, la France, l’Espagne, la Russie, la Chine, l’Inde, le Pakistan n’ont pu échapper à ce genre d’attaques. Nous avions espéré en être exempts, mais hélas ! Cependant, cette épreuve que nous devons traverser ensemble doit être l’occasion pour notre peuple de démontrer qu’il en est réellement un. Il y a des sujets qui peuvent nous diviser. Mais il y en a qui doivent nous unir, au-delà de toutes nos chapelles, qu’elles soient politiques, religieuses, ethniques ou autres. La menace terroriste est une cause qui doit nous unir, car c’est unis que nous y ferons face. Nous n’avons pas d’autre choix, parce que le terrorisme ne cherche pas à prendre un pouvoir auquel certains pourraient rêver de participer. Non, il veut juste tuer, détruire. Dans les territoires qu’ils ont conquis en Syrie, en Irak et en Libye, c’est la mort que les terroristes servent tous les jours aux populations. L’un d’eux a même tué sa propre mère sur la place publique parce qu’elle a osé lui demander de quitter le groupe état islamique. Pour ces djihadistes, cette vie sur terre n’en est pas une. La vraie vie dont ils rêvent pour eux et pour nous tous se trouve après la mort. Ils ont renoncé à leur propre vie et méprisent celle des autres.

Alors, aujourd’hui, nous devons taire toutes nos petites et grandes querelles et nous unir dans cette lutte qui est devenue sacrée. Nous devons nous unir dans notre pays et nous unir aux autres pays qui font face aux mêmes menaces pour le combat. Si nous ne nous y prenons pas dès à présent, nous laisserons une gangrène s’installer qui deviendra un monstre incontrôlable comme Boko Haram au Nigeria. Mais dans ce combat, nous devrons faire attention à ne stigmatiser personne en fonction de la couleur de sa peau, de son habillement ou de la taille de sa barbe. évitons les amalgames et déductions faciles. Si Laurent Gbagbo se trouve en procès, en ce moment, à la Haye, c’est parce que ses partisans ont tiré des conclusions un peu trop hâtives face à certaines situations. Ce que nous appelons, c’est l’union sacrée, mais surtout le discernement.

Venance Konan