Contradictions principales et secondaires

Venance Konan
Venance Konan
Venance Konan

Contradictions principales et secondaires

Il fallait s’y attendre. Cela aurait été trop beau que le principal parti d’opposition radicale accepte ainsi, sans rechigner, les règles du jeu proposées par le parti au pouvoir. En réalité, le dilemme de cette formation politique va au-delà de sa participation à la Cei. Il s’agit pour elle de savoir si elle participera ou non à l’élection présidentielle, et avec quel candidat. Il y a encore, en son sein, des jusqu’au-boutistes pour qui rien ne doit se faire dans ce pays tant que Laurent Gbagbo, le seul champion en qui ils se reconnaissent sera absent de la Côte d’Ivoire. Or, les chances pour que ce dernier revienne dans ce pays avant l’échéance d’octobre 2015 sont dix fois plus minces qu’un papier de cigarette. D’un autre côté, il y a les réalistes qui estiment que tout en restant fidèles à l’ancien Chef de l’État, la vie doit continuer, et que ce serait condamner le parti à mort en l’excluant des prochaines compétitions politiques. Une fois ces contradictions surmontées et si le principe de la participation à la prochaine présidentielle est admis, la question sera celle du choix du candidat. Qui, aujourd’hui, au Fpi a la capacité de mobiliser les militants encore sonnés par la défaite de 2011 et l’incarcération de Laurent Gbagbo, Simone Gbagbo et Blé Goudé ? Laissons le parti frontiste gérer ses contradictions principales et secondaires, comme on le dit dans le langage des formations politiques de la gauche dont il se réclame. Mais empruntons-lui ce langage pour dire qu’au sein du Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (Rhdp), la contradiction principale est de savoir si le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (Pdci-Rda) présentera ou non un candidat à la prochaine élection présidentielle. Il nous semble acquis qu’à sa prochaine convention, il apportera son soutien à la candidature du Président Ouattara.

La saison des pluies, exceptionnelle cette année, avec les énormes dégâts qu’elle a causés, nous démontre éloquemment que le travail de reconstruction de notre pays est encore plus immense que nous ne l’imaginions. La coalition qui dirige le pays doit, plus que jamais, resserrer les rangs autour du Président Ouattara pour nous conduire vers l’émergence promise. Pour y arriver, il nous faut doter notre pays de solides infrastructures, le connecter encore davantage à nos voisins et continuer d’attirer les investisseurs. Le Chef de l’État a déjà commencé ce travail qui donne les résultats que nous connaissons et dont nous tirons une légitime fierté. Mais le travail qu’il nous reste à abattre est encore plus immense. D’où la nécessité pour le Rhdp de ne pas se laisser distraire par les contradictions secondaires qui ont pour noms : frustrations de certains cadres du Parti démocratique de Côte d’Ivoire, bataille de positions en son sein, accusations d’hégémonisme de la part du Rassemblement des républicains (Rdr), pour ne pas dire sa trop grande gourmandise, relents d’ivoirité, etc. Ces contradictions, aussi secondaires soient-elles, ne doivent pas être ignorées. Mais, comme l’a dit le président Bédié à son arrivée, le vendredi 4 juillet, « des échanges en vue d’un réglage pour une bonne marche du Rhdp vont se faire bientôt. » Ces réglages sont nécessaires et doivent être francs pour balayer les arrière-pensées, afin que les partisans de ce rassemblement aillent expliquer, dès maintenant, la vision de la nouvelle Côte d’Ivoire aux populations. Gardons toujours en mémoire le long chemin qui a été le nôtre depuis la disparition du père fondateur de notre pays, les crocs-en-jambe que les membres actuels du Rhdp se sont faits, les souffrances infligées par les uns aux autres, les exclusions, les anathèmes, avant que les héritiers d’Houphouët-Boigny ne parviennent à l’union actuelle. Une telle lecture de notre histoire permettra, peut-être, d’avoir un peu plus d’indulgence les uns envers les autres et de redresser plus sereinement ce qui n’est pas droit.

Chacun devrait comprendre que quelle que soit la nature des contradictions, il ne saurait plus être question pour les héritiers d’Houphouët-Boigny, de se déchirer à nouveau. Il y va de la stabilité et du développement de notre pays. N’oublions jamais qu’il était le plus avancé et le plus attractif d’Afrique de l’Ouest lorsque cette famille était unie. Notre descente aux enfers a commencé lorsqu’elle s’est divisée. Et la Côte d’Ivoire a recommencé à compter lorsque les houphouétistes se sont remis ensemble.