Recyclage des déchets électriques et électroniques en Côte d'Ivoire: Le soutien des ONG au gouvernement

Recyclage des déchets électriques et électroniques en Côte d'Ivoire: Le soutien des ONG au gouvernement

Cela s’appelle, prendre le taureau par les cornes. Pendant longtemps, le spectacle des appareils électriques et électroniques en fin de vie déversés en plein air avant d’être dépouillés de façon informelle de toute composante valorisante puis rejetés dans la lagune ou enfouis sous terre semblait relever de la fatalité. Il en est de même des pneus usagés brûlés en plein air avec des rejets toxiques fragilisant l’écosystème comme la santé des populations.

Après plusieurs mois de rencontres avec les différentes parties prenantes et de sensibilisation sur la nécessaire gestion efficiente des déchets électriques et électroniques, le gouvernement est passé à l’action, en lançant, en novembre 2018, un projet de gestion des déchets d’équipements électriques, électroniques (DEEE ou 3DE) et des pneus usagés.

Ce projet, exécuté en partenariat avec la Société générale de surveillance (SGS) et la Société africaine de recyclage (SAR), est opérationnel depuis le 4 août, dans sa phase expérimentale devant durer jusqu’en novembre prochain. Lors d’une cérémonie organisée hier à Abidjan, plus de 200 organisations de la société civile ivoirienne regroupées au sein de la Fédération des réseaux et associations de l’énergie, de l’environnement et du développement durable (Fereadd) ont produit une déclaration dans laquelle elles apportent leur plein soutien au projet initié par le gouvernement pour mettre un terme au chaos observé jusque-là dans la gestion des D3E.

Présent à cette rencontre, le Coordonnateur du Programme national de gestion des déchets, Jacques Kouassi Koffi a dévoilé tous les pans de ce projet qui fait désormais obligation aux importateurs de présenter un certificat de paiement de l’éco-redevance avant tout dédouanement des produits en Côte d’Ivoire. A l’en croire, le projet se décline en trois modules.

Le premier consistera à enregistrer les produits importés en Côte d’Ivoire et s’assurer que lorsqu’ils sont déclarés comme étant des produits de seconde main, ils ne sont pas en réalité des 3DE ou déchets pneumatiques interdits d’exportation selon la Convention de Bâle à laquelle la Côte d’Ivoire à l’instar de nombreux pays du monde ont adhéré.

S’agissant du deuxième module, il s’agira de collecter pour le compte de l’Etat, auprès des fabricants ou des importateurs, l’écotaxe sur les produits concernés importés en Côte d’Ivoire neufs et de seconde main en vertu du Principe Pollueur-payeur et du Principe de la responsabilité étendue du producteur (REP).

« Ces deux premiers modules seront implémentés par la Société générale de surveillance (SGS) dont le contrat de prestation de service a été signé le 20 septembre dernier », a précisé le représentant du ministre de l’Environnement et du Développement durable.

Quant au troisième module, il verra la mise en place d’un système de gestion des déchets efficient et professionnel comprenant l’installation de centres de collecte dans des endroits clés du pays ainsi que le traitement et le recyclage industriel des objets collectés.  Ce module sera mis en œuvre par la SAR, et devrait démarrer en janvier prochain, selon M. Jacques Koffi. Tout a été mis en œuvre, également, pour éviter que les coûts des appareils renchérissent, car il s’agit juste de récolter des éco-redevances qui figurent déjà sur les factures que l’on sert aux acheteurs, et c’est la mission qu’aura à remplir la SGS, a relevé M. Koffi.

A la clef, ce sont plus de 5000 emplois verts qui devraient être créés, par ce projet qui «va permettre sur le plan environnemental de réduire significativement les nuisances liées à ces déchets et permettre à la Côte d’Ivoire de faire une grande avancée dans le domaine du développement durable ». ce sont pas moins de six objectifs parmi les 17 Objectifs de développement durable  de l’Onu qui devraient être atteints avec ce projet a renchéri M. Koffi.

Reconnaissance des ONG au gouvernement

Le président de la Fereaad, M. Jules Loukou Koffi a quant à lui, traduit la reconnaissance des organisations de la société civile au gouvernement et souhaité prendre une part active à son implémentation sur l’étendue du territoire national. « La Fereaad, au motif de son implication depuis les premières phases de discussion du projet avec les différents acteurs étatiques et privés, entend jouer un rôle décisif dans l’opérationnalisation des activités prévues en vue de soutenir la volonté de l’Etat d’assurer aux populations un cadre de vie plus sain, une meilleure protection de l’environnement et de favoriser également la création de milliers d’emplois », a-t-il soutenu.

L’éco-redevance qui a désormais cours en Côte d’Ivoire, n’est pas une nouveauté au plan mondial. En Europe, une directive de l’UE l’a instaurée depuis plus d’une décennie. Lors de l’achat d’un nouvel appareil en magasin ou sur internet, chaque consommateur paye ainsi une « éco-participation » qui varie selon le produit acheté et le type de traitement qu’il nécessite une fois en fin de vie.

Conformément à la loi, l’éco-participation est indiquée sur les étiquettes de manière visible et séparée du prix du produit. Ainsi, le financement du recyclage et de la dépollution des appareils est transparent. En France, par exemple, l’éco-participation est versée à un éco-organisme agréé par l’Etat, comme ESR  à travers son service Eco-systèmes, qui prend en charge les appareils usagés pour les dépolluer et les recycler.

Le système adopté par la Côte d’Ivoire est en cours au Ghana, depuis l’année dernière, et devrait être adopté prochainement par la Guinée et le Togo.

Valentin Mbougueng