Théâtre / Luis Marques (metteur en scène): Pour un projet délivré de ses pesanteurs

Théâtre / Luis Marques (metteur en scène): Pour un projet délivré de ses pesanteurs

Théâtre / Luis Marques (metteur en scène): Pour un projet délivré de ses pesanteurs

"Don Quichotte », la pièce de théâtre négrifiée avec marionnettes. Ou « Kaidara », le chef d’œuvre d’Amadou Hampaté Ba co-adapté avec Claude Gnakouri déjà, lors des années Imako théâtri, ou encore « Cavally », et bientôt certainement «  Hommage à Dadié »… Bien de projets comme s’il en pleuvait. Force est de se réjouir de la réapparition des spectacles sur les planches depuis quelques temps en Côte d’Ivoire. Et de constater que ces pièces de théâtre portent le sceau d’un metteur en scène à forte capacité d’indignation et augurent par voie de conséquence d’une sorte de retour sur les lieux des rimes.

 

Il est de retour après 10 ans passés au Burkina Faso. subséquemment à la quinzaine d’années passée ici en Côte d’Ivoire. Il revient exercer le métier de metteur en scène, qu’il a appris en faisant, lui. Lui ? C’est Marques.
Luis Marques. Métis européen de père Espagnol et de mère danoise. Fils de fonctionnaire international à l’Unesco et d’interprète, rien d’héréditaire (même social) ne laissait présager une disposition particulière pour le théâtre. peu en place, hyperactif à la maison, il est pris pour comédien par sa mère qui a l’idée de l’emmener à une audition, un casting lancé par une de ses copines.

 

L’idée tourne au vinaigre et se fait impécunieuse. Transis de peur ou de quelque chose de similaire, le petit garçon ne s’en sort pas bien et comprend (du moins croit-il) que pour le théâtre ou le cinéma, il n’est point fait. Il se tient alors loin de cet univers jusqu’au jour où, parti accompagner à sa séance de répète, un comédien d’ami de classe, il lui est demandé, à l’improviste, par robert Cordier, l’atypique prof de théâtre, véritable sourcier excellant dans l’enrôlement, d’essayer quelque chose : -Vas y ! Fais comme si tu as perdu tes clés et cherche-les. Joue moi ça que je voie mon garçon Luis simule à la perfection. Le résultat plaît. Congratulé, il vient de gommer son échec premier, et de faire céder la poignée de la porte des triomphes à venir. à la réalité, ce n’était pas un test, un rôle de composition : ses clés, Luis avait l’habitude de les perdre.
Le jeune homme n’avait fait qu’être. Être vrai. Et ce sera sa devise, il jouera et fera jouer le vrai, ce qu’il ressent, ce qui saisit ses tripes.

 


La clé du déclic Il suivra tout comme son ami de classe les cours de théâtre atypique. Mis en confiance, à Meudon et sèvres (hauts de seine, France) ses espaces de scolarité, il sera retenu à l’issue d’un casting pour jouer dans « Hors la loi ». puis à un cours d’anglais, il est touché par un texte de l’auteur dramatique américain, Arthur Miller réputé pour construire des personnages toujours mus par l’appétence de nouer des liens d’appartenance à une société américaine laquelle a tendance à les frapper d’ostracisme. Ce n’est pas à « Mort d’un commis voyageur », la préférée de Sijiri Bakaba, mais plutôt à « Vu du pont », « A view from the bridge » que s’attaque Luis. Les stigmates du contact d’avec Robert Cordier faisant effet, la mise en scène est déjetée et essorée de tout son sérieux. décalée, elle est applaudie à tout rompre. Les rafales d’applaudissement lui font grand bien, l’élève. Luis croît et y croit désormais. Il a 17 ans et se met à enchaîner les mises en scène.

 


L’année qui suit, le bac en poche, il s’inscrit à la sorbonne à paris III pour entreprendre des études de Cinéma. Il en profite pour jouer dans des pièces, dévorer des bobines de films, tenter des mises en scène, tourner les pages de nombreux livres; bref, il se forme. Vit sa passion. obtient une licence en cinéma. Il écoute aussi surtout parler tonton Bakary, le meilleur ami de son père. « C’était mon deuxième Papa, mon Dieu ». Un dieu malien, professeur d’université dont l’art oratoire, l’amour de son Afrique qu’il racontait à l’aide d’histoires variées séduit Luis. Le jeune homme glisse vers les planches pour obtenir une maîtrise en Anthropologie théâtrale.

 

C’est fait. pour le diplôme d’études approfondies (dea), il lui faut trouver des réponses à l’origine de cet art, à son indispensabilité, à ses démembrements. Il lui faut venir à la rencontre de cette Afrique dont parle si bien tonton Bakary. Ça tombe bien, l’Afrique connait le multipartisme et la fondation houphouet-Boigny offre cinq bourses aux étudiants désireux de faire des travaux sur l’Afrique.


ALEX KIPRÉ