Showbiz : Agana Rootsteady : « Alpha Blondy et moi, une affaire d’héritage… »

Showbiz : Agana Rootsteady : « Alpha Blondy et moi, une affaire d’héritage… »

Showbiz : Agana Rootsteady : « Alpha Blondy et moi, une affaire d’héritage… »

Intitulé « Black to the future », le 4e album d’Agana Rootsteady, sort cette semaine sous le label abidjanais de Dream-Maker. Fort de 8 titres dont 2 remix, cette proposition musicale du fils aîné d’El Hadj Koné el Saoud alias Alpha Blondy, sonne comme celle de la maturité artistique de Koné Alpha Guy Ismaël, la quarantaine rayonnante et assumée.

Les mélomanes ivoiriens pourront, à travers trois showcases qui suivront la dédicace officielle de l’opus, le 20 octobre, à partir de 14h à la Fnac de Marcory Cap Sud, d’abord, le même soir au Parker Place en Zone 4, puis le 27 au Bao café de Cocody Cité des arts, et enfin au Pam’s des deux-Plateaux, début-novembre, des vocalises aux thèmes aussi militants que spirituels d’Agana. Agana qui, à la question de savoir s’il place sa trajectoire sous l’ombre tutélaire de son père ou, à tout le moins, entend trouver le succès populaire sous son mentorat, est catégorique, un tantinet philosophe, démontant la théorie psychanalytique du Complexe d’Œdipe : « Ai-je ou dois-je éliminer le père pour exister » ? Une interrogation ontologique qui s’érige comme une affirmation d’une personnalité voulant rompre les amarres avec un mimétisme béat. Il n’empêche, Alpha Junior assume, toutefois, l’aura de son père et revendique même sa succession.

« J’ai un nom et pas besoin de chercher un prénom. Je suis Agana tout-court. Je m’assume. J’ai un héritage. Lourd ou pas, à moi de me former pour le porter, sans être prétentieux ou égocentrique. Car, vous êtes sans ignorer qu’Alpha Blondy a beaucoup d’enfants de par le monde. Ici, en Côte d’Ivoire, vous avez, entre autres, Tiken Jah, Ismaël Isaac, Kajeem, Spyrow… Tous autant qu’ils sont, peuvent prétendre à son héritage…artistique. Mais c’est à moi de revendiquer, avec tout son amour, sa sagesse, sa vision humaniste, son héritage ». De cet héritage, à maints égards, Agana, sans l’avouer, peut se targuer d’avoir un regard optimisme sur la Côte d’Ivoire. Qui, au gré des crises et conflits protéiformes, à l’en croire, suit un cycle dont le terme enjoué serait tout proche. Le tout fondé sur la fraternité agissante et l’hospitalité qui doivent se repositionner comme l’Adn des Ivoiriens.

Porté au plan technique par les arrangements de Don Guy, le bien-nommé chef d’orchestre du Zo-Gang de Meiway, cet album irisé aux sonorités roots de rocksteady (ancêtre médian du reggae après le ska), il vogue, tout aussi, sur les vagues high-life, aloukou, mais aussi gospel et soul. Avec cerise sur le gâteau, au niveau de la saturation de la guitare d’un certain… Vieux Briscard. Celui porta l’âme printanière du zoblazo de Meiway et autres Deza, ainsi que de nombreux groupes du Ghana voisin. 

L’écoute dudit album a retenu toute notre attention. Chaque titre  dessine bien les contours du « Rootsteady » un mélange engagé de "roots, rock et reggae" avec des basses hyper lourdes, des cuivres et des chœurs à profusion dont les nuances identifient la singularité d’Agana. Cet opus est un reggae rugueux et incandescent. Un brin poète, dans « Au-revoir », ce sentiment semble contrasté. Car, s’adressant aux siens dans l’au-delà, il lui est répondu en écho et sans chœur que « La mort est parfois meilleure à la souffrance et la honte ».

Agana est, sans nul doute,  qui hérite  d’une grande gueule de sa pratique de l’art dramatique, est de cette génération qui veut être au cœur de l’arène. Son reggae d’une rare authenticité, son attitude insoumise, son propos réfléchi nous indiquent qu’une défiance de la jeunesse passée mature agite le continent africain aujourd’hui pour faire reconnaître son talent, sa quête d’excellence et ses valeurs endogènes.

Agana s’est fait connaître pour la première fois sur la scène musicale par son album « The Day ». Cela se passait en 1995 en Côte d’Ivoire, son pays natal. Agana, dès son jeune âge, a baigné dans l’univers du reggae tout en recevant une éducation des plus rigoureuses dans la pure tradition africaine. Il se passionne d’abord pour la peinture, puis passe au théâtre où il joue le rôle de Jésus-Christ dans « Le Paradis infernal », une pièce de l’écrivain et dramaturge ivoirien Tiburce Koffi qui remporta le prix Gabriel Germinet de RFI en 1996.

REMI COULIBALY