Musique/Nouvel album: « Ideology », le nectar qui sonne le retour de Ken Adamo !

Musique/Nouvel album: « Ideology », le nectar qui sonne le retour de Ken Adamo !

Musique/Nouvel album: « Ideology », le nectar qui sonne le retour de Ken Adamo !

 

30 ans de carrière, une hibernation volontaire et solidaire au profit des artistes, en tant que leader et producteur. Le cow-boy de la musique ivoirienne est de retour avec une bombe…rythmique.

Dans une quinzaine de jours, la planète-musique ivoirienne voire au-delà, connaîtra une mini-révolution copernicienne avec les premiers soupçons sonores et visuels de « Ideology » (Idéologie), l’album de 14 titres en préparation pour la fin de l’année de Ken Adamo. Et ce, à travers un premier single fort coloré et musicalement abouti, rompant les amarres avec la country-music pure et dure, sans en en perdre l’Adn toutefois, rythme avec lequel il s’était révélé au grand public, à l’été 1987. Un second single suivra, avec des clips à l’appui avant la sortie de l’album.

 

Ainsi, quasiment 30 ans jour pour jour, après ce baptême du feu printanier, l’artiste dont le dernier album date de 1996, avec entre-temps, des comebacks reportés pour diverses raisons, a décidé à quelques jours de la sortie de l’acte 1 de son retour au-devant de la scène, d’organiser une séance d’écoute en toute primeur, à Fraternité Matin, le 16 août. Et pour cause : « En 1987, après une émission à la télévision avec Roger Fulgence Kassy, celui-ci me conseillait de venir à Fraternité Matin, à travers son titre Ivoir’Soir pour une interview avec un jeune journaliste de l’époque qui était le meilleur de sa génération. Et quand celui-ci faisait barrer en manchette, le lendemain : « Ken Adamo, la révélation de l’année », c’était le départ d’une belle et grande carrière qui se poursuit jusqu’à ce jour… ».

 

Du mythe de la guitare avec VK…

Ce que Ken Adamo, entre-temps qui préside depuis plusieurs années aux destinées de l’Union nationale des artistes de Côte d’Ivoire (Unartci) après avoir succédé au charismatique Gadji Céli, ne dit pas, c’est que le journaliste dont il parle n’est autre que Venance Konan. L’actuel Directeur général du groupe Fraternité Matin, devenu entre-temps, tout aussi une référence médiatique internationale et auteur à succès, Grand prix littéraire d’Afrique noire. Mieux, lors de cette entrevue d’il y a trois décennies, c’est avec une fierté inouïe que le musicien émergent d’alors (re) voit depuis son retour de France où il a décroché avec brio un doctorat en droit, l’idole de son enfance. En effet, étant le seul possesseur d’une guitare dans la localité de Ouellé (centre-est du pays) alors qu’il était élève en classe de 3e, Venance Konan suscite l’admiration, entre autres concitoyens, du gamin Ken. Au point de détourner ses corvées domestiques pour venir caresser le mythique objet du grand-frère, tout aussi brillant à l’école. « C’est décidé, je ferai tout pour faire de bonnes études, avoir ma guitare et être une vedette… ». Cette profession de foi, Ken Adamo y donnera corps de vie à travers un parcours scolaire et universitaire au cours duquel il se passionne pour la country-music qui laisse trôner en reine la guitare, avec pour icônes les Kenny Rogers, Don Williams et autres Dolly Parton…

 

naît le Blues de Ouellé

S’il peut paraître superfétatoire d’évoquer ce bond en arrière, il est tout à fait idoine d’y sacrifier pour comprendre la démarche artistique qui sous-tend le come-back de Ken Adamo. Dont la culture du live acoustique empruntée à la country-music lui est chevillée au corps. Un incubateur qui lui a permis de lire et écrire la musique, s’ouvrir aux autres genres classiques et modernes (jazz, rock, salsa, funk, soul, reggae…) mais aussi aux courants électro, afro-jazz et afrobeat, sans compter avec des incursions fort réussies dans la recherche appliquée sur les musiques du terroir, ainsi que dans l’arène des musiques urbaines africaines à l’instar de l’éclectique coupé-décalé. Bref de la variété contemporaine universelle !

 

Toutes choses qui, au-delà de l’album « Ideology » à venir, agrée à l’adhésion de férus de musiques comme Ken Adamo et qui ont décidé de l’accompagner dans son band au nom tout aussi évocateur : « Le Blues de Ouéllé ». Car pour l’artiste, un brin philosophe, tout est idéologie sur fond de l’idée qui précède l’action. Et, pour lui, l’idée-maîtresse, c’est partager, donner et recevoir, s’enrichir en s’ouvrant au monde. Loin, très loin des idéologies sectaires et nombrilistes, obscurantistes et réductrices.

 

Arnold, le fils de Joëlle C, Ras Goody, Josey… dans le coup ?

Pour en revenir à la texture de « Ideology », titre éponyme de l’opus, il incombe d’arguer que c’est un véritable cocktail sonore voguant sur les vagues d’arpèges de guitares afrobeat, style juju à la Fela, avec des partitions vocales enjouées dont des chœurs fort limpides. Le tout tenu à la baguette par des roulements de caisse claire à la batterie. Chanté en baoulé à l’instar de « Yo ndédé », ce titre-là fort éclectique, se laisse toutefois dominer par sa rythmique rub-a-dub (ou early dancehall), en référence au style reggae mis en lumière par les disc-jockeys jamaïcains et très en vogue dans les années 1990. Normal donc qu’il soit interprété en duo avec Ras Goody Brown, l’un des reggae-makers ivoiriens des plus doués et inspirés aux capacités vocales hors du commun.

 

Autre merveille à se délecter dans l’opus de Ken Adamo, c’est Arnold, le fils de la défunte chanteuse Joelle C qui tient la guitare basse ? Excellant dans la « walking bass », la « basse qui marche », le très jeune virtuose laisse l’ouïe être séduite par une ligne de basse qui consiste à jouer tous les temps en créant une mélodie. Plus concrètement, il fait « une walk » c’est-à-dire qu’il joue des mélodies en noires. D’autant plus qu’en jazz, le bassiste tient le tempo du groupe, et les autres membres du groupe jouent souvent un peu derrière, c'est-à-dire qu’ils donnent la sensation (subtile) de jouer un peu en retard.

 

Par ailleurs, de Josey, la chanteuse à voix la plus en vue actuellement dans le microcosme ivoirien, à Bailly Spinto, en passant par Noel Dourey et bien d’autres artistes avec lesquels il a collaboré, Ken Adamo enrichit son ouverture pour un réel plaisir des mélomanes. Il en est ainsi du dialogue des cultures qu’il met en boîte entre la flûte traditionnelle bété et l’ahoko dans une partition expérimentale à nulle autre pareille. L’incidence recherchée étant, tel que le font les disc-jockeys actuellement en vogue, de servir aux mélomanes ce qu’ils attendent.

 

Un maestro dans l’arène

Producteur, arrangeur, businessman multicarte affichant plus d’une centaine d’artistes nationaux à ses états de service, Ken Adamo qui, parallèlement s’est préoccupé presqu’une décennie durant du bien-être social de ses pairs à travers l’Unartci, sans l’avouer, est revenu prendre sa place. Un peu comme pour faire taire les basses-messes de certains jeunes artistes qui ignorent ses talents artistiques. Le tout, un peu comme il l’explique dans « Yo ndede » (dépêche-toi) où il invite sa dulcinée à rejoindre à l’aube ses quartiers après une nuit de romance loin des yeux indiscrets, pour expliquer que les grandes choses se construisent, la nuit, sous une pluie battante, loin des regards sceptiques. Et que la formule latine « Ad augusta per angusta » traduit à l’envi, car signifiant en français : « Vers les sommets par des chemins étroits ». Il faut en déduire que la gloire ne s'acquiert pas facilement.

REMI COULIBALY