Doumbia S. Major (président du Congrès pour le renouveau): ‘’Tout le monde parle de réconciliation, même ceux qui appellent à la haine’’

Doumbia S. Major, président du Congrès pour le renouveau.
Doumbia S. Major, président du Congrès pour le renouveau.
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Doumbia S. Major (président du Congrès pour le renouveau): ‘’Tout le monde parle de réconciliation, même ceux qui appellent à la haine’’

Vous êtes le président du Congrès pour le renouveau africain (Cpr), un parti, dites-vous, d’obédience socialiste.

Dire donc qu’on est d’obédience socialiste, c’est affirmer son amour pour l’humain et pour ses compatriotes, surtout pour les plus faibles. Le Cpr défend des valeurs de partage et de redistribution des ressources et richesses nationales. Nous partons du principe que ce que la nature donne aux nations et à l’humanité appartient à tous. Et que ce qui est collectif doit être utilisé pour le bonheur des peuples.

Pour un Ivoirien, qui n’a pas gardé une très bonne opinion du pouvoir socialiste de Laurent Gbagbo, ne craignez-vous pas de prêcher dans le désert ?

Laurent Gbagbo a clamé le socialisme sans le mettre en pratique. Il n’était pas, pour nous, un socialiste. Le socialisme a plusieurs déclinaisons : le maoïsme, le léninisme, le marxisme, etc. Dans l’idéologie socialiste, il y a une vision de classes et une vision qui transcende les nations. Parce que l’impérialisme et le capitalisme ne trient pas et n'ont pas de frontière. Tant qu’ils peuvent faire du profit sur vous, ils vous utilisent. Le socialisme amène les masses à être unies. Mais quand on voit Laurent Gbagbo, dont le parti embouche le discours d’ivoirité, d’autochtonisme, identitaire, etc., le discours d’hiérarchisation des ethnies, en poussant même à la xénophobie contre les étrangers, on se convainc qu’il ne peut être socialiste. Les socialistes vrais appellent à l’unité des forces des masses sans distinction d'ethnies ou de religions. Ils ne divisent pas le peuple sur la base ethnique.

Serait-ce votre leitmotiv pour 2020 ? Le Cpr aura-t-il un candidat à la future élection présidentielle ?

Notre leitmotiv, c’est la redistribution équitable des ressources. Le Cpr a déclaré effectivement qu’il est candidat pour 2020. Quand on met en place un parti politique, on se dote d’un appareil et on a une idéologie. La nôtre est le socialisme. On a aussi un projet de société qu’on présente aux électeurs. Nous avons dit aussi que notre engagement pour 2020 peut se faire dans le cadre d’une coalition. Cette coalition se fera avec des gens qui sont contre le discours identitaire, la division ethnique  du peuple, pour le développement et pour le partage de la croissance. Nous sommes opposants, mais être opposant ne veut pas dire qu'il faut rejeter tout ce qui est fait par le pouvoir en place. Aujourd’hui, il faut reconnaître ce qui est fait en Côte d’Ivoire. On parle de socialisme et aujourd'hui  il y a les filets sociaux mis en place par le gouvernement du Premier ministre Gon Coulibaly. C'est quelque chose que nous saluons. Alassane Ouattara est certes libéral, mais ça c’est du socialisme. On ne l’a pas vu sous Laurent Gbagbo. Nous ne sommes pas dans les idéologies tranchées. Nous pouvons toujours nous entendre avec les uns et les autres autour d’un minimum. C’est ce qui doit être fait. Aujourd’hui, il s’agit de faire ce qui arrange le peuple.

Que pensez-vous du bilan du Président Ouattara ?

J’ai été très critique vis-à-vis du Président Alassane Ouattara à un moment donné. J’ai vu les choses évoluer. Pour l’observation que je fais, il y a eu beaucoup d’amélioration. Il y a encore des divergences, mais on ne peut pas dire que ce bilan-là est négatif. Des efforts sont faits. Ils sont à saluer. Cette capacité de l’acceptation de la critique et de l’autocritique nous sied. Aujourd’hui, on a la liberté d’expression en Côte d’Ivoire. Il y a quelques années, je n’aurais pas pu rentrer dans ce pays. Il suffisait de critiquer le régime pour qu’on envoie la Fesci attaquer les rédactions, bastonner les juges, etc. C’était un régime de terreur qui dirigeait la Côte d’Ivoire. Le discours officiel, c’était la démocratie, mais dans les faits, on vivait dans la terreur. Aujourd’hui, les gens peuvent circuler du nord au sud, de l’est à l’ouest sans avoir peur des escadrons de la mort. Aujourd’hui, on ne viole pas des femmes à l’Ecole de police pour que la Première dame dise que c’est bien fait pour elles, comme on a entendu Simone Gbagbo le dire par le passé. Entre hier et aujourd’hui, il y a de l’amélioration. Aujourd’hui, on n’arrête pas quelqu’un pour lui réclamer ses pièces. Le discours polluant, stigmatisant d'autres citoyens qu'on présentait comme des sous-ivoiriens a cessé. Ce temps où on utilisait la télévision publique pour rabaisser les gens est un souvenir lointain. Personne n’insulte un autre Ivoirien pour son ethnie ou le catégorise comme sous-ivoirien. Quoique des choses restent critiquables.

Et le bilan du point de vue des infrastructures…

Pour moi, il ne peut y avoir de développement sans route. La route, comme on le dit, précède le développement. Mais nous disons que concomitamment, il faut prendre en compte le volet social. Il faut une politique sociale hardie. C’est en cela que nous avons salué les filets sociaux qui s’apparentent aux Rmv que nous avons proposés. Il faut penser au coût de la vie. Il faut relever le Smig de 60 000 à 100 000 ou 110 000 FCfa. Cela peut se faire dans le cadre d’une concertation nationale avec les syndicats et le patronat.

Peut-on imaginer une alliance du Cpr, avec le Comité politique mis en place, avec votre ancien ami de la Fesci?

On ne fait pas la politique avec des slogans. Un comité politique n’est pas un parti politique. Quand on veut faire la politique, on la fait avec un parti et une idéologie qu’on met en pratique pour le bien du peuple. On ne va pas en politique en faisant abstraction de son passé. Il y a des valeurs et des pratiques démocratiques. Notre ancien ami du syndicat étudiant a un bilan de la gestion du Nord et des zones CNO.  Personnellement, je pense que ce bilan, sur les plans humain et économique, ne mérite pas que je lui accorde ma confiance pour l’extension de ce qu’il a fait au nord sur toute l’étendue de la Côte d’Ivoire. Je crois que c’est un véritable danger pour la Côte d’Ivoire que de lui confier l’avenir de nos enfants. Quelqu’un qui a géré le nord et qui, dans sa gestion, a mis en place une régie financière-La Centrale-qui a littéralement mis en coupes réglées cette zone-là, et qui l’a pillée sans reverser un franc dans les caisses de l’Etat. L’argent a été utilisé à des fins personnelles. Cela s’appelle crime économique. Quand tu prends l’argent qui appartient à tout le monde, c’est pour travailler au profit de tout le monde. Il n’y a pas eu de dispensaire dans le nord, il n’y a pas eu de forage, ni d’école et de route. Alors qu’on a pompé l’argent de cette partie du pays. Aujourd’hui, on se promène pour constater l’étendue des dégâts, qui ne sont rien d’autre que la résultante de ce qu’on a posé comme acte dans la zone. Notre ami agit comme un criminel qui revient sur les lieux de son crime et qui veut se faire passer pour une personne charitable qui a de la commisération, de la compassion pour ses victimes.

En mettant à nu les pratiques de votre ancien camarade dans le nord, ne craignez-vous pas d’être pris à partie par ses partisans?

Rien ne peut me faire peur, quand je suis dans la vérité. Les personnes payées pour injurier sur les réseaux sociaux le sont par des individus qui ne supportent pas la vérité. Ils attaquent d’honnêtes citoyens. Et je voudrais saluer votre directeur général, qui en a été victime récemment à la suite d’un éditorial qu’il a publié et qui rappelait l’incongruité de la démarche de notre ami. Venance Konan est à saluer parce qu’il a reconnu ses erreurs dans l’histoire et s’est mis du côté des forces de défense des valeurs républicaines. Il a dit qu’on ne doit pas diviser les fils de la nation avec des discours identitaires. Ceux qui le critiquent aujourd’hui sont ceux-là mêmes qui embouchent le discours d’ivoirité. C’est cela la vérité. Il faut qu’on dise la vérité dans ce pays pour éviter l’imposture. Des gens qui ont eu à gérer une partie du pays, qui ont pris des gens qui étaient en prison et qui les ont exécutés de manière sommaire, sans que ces derniers aient droit à un procès équitable. Un démocrate respecte la justice, la vie humaine, la liberté d’expression, le bien commun. Je parle avec des preuves, sur la base de faits. Quand je dis qu’ils ont pris Koné Morel, un étudiant, qu’ils ont mis en prison, puis extrait de la prison pour le tuer, c’est la vérité. Il ne faut pas s’attaquer à ma personne, il faut plutôt démentir les faits. Quand je dis que Koné Moussa Barbu a été pris en prison à Bouaké et qu’ils sont allés l’exécuter sommairement (Amnesty International en a parlé), c’est avéré. Des gens ont été arrêtés et mis dans des conteneurs. Ils ont été exposés au soleil pour qu’ils meurent déshydratés et par asphyxie. Ce sont des faits. Quand vous avez été à la tête du commandement de toutes ces actions, vous ne pouvez pas venir dire aux Ivoiriens que vous êtes un démocrate. Loin de là. Quelqu’un qui a été capable de prendre les biens communs pour s’enrichir, acheter des maisons. Quelqu’un qui dit qu’il est socialiste comme nous, mais qui accepte des rentes viagères cumulées jusqu’à 24 millions de FCfa dans un pays où le Smig est de 60 000 FCfa, je ne le vois pas comme un socialiste, à plus forte raison comme quelqu’un qui pourrait parler au nom du peuple.

Vous n’êtes donc pas disposé à lui apporter un sac de riz, vu qu’il est au chômage, comme l’ont fait nombre de ses amis ?

Ces histoires-là sont des injures au peuple. Déjà, vous êtes député, vous avez des rentes que vous cumulez et vous lancez un appel trompeur au peuple pour dire que vous êtes au chômage. C’est de l’imposture. Je ne prendrai pas mon argent pour le donner à quelqu’un qui a un salaire supérieur au mien. Il y a de la tromperie dans cette démarche. Il faut respecter le peuple. La politique, ce n’est pas que de la communication, du marketing, etc. Elle repose sur le socle de la vérité, de la  constance et  de la cohérence. Quand on dit qu’on ne partage pas les idéaux d’un groupement dont on est le porte-parole à l’Assemblée nationale, sous prétexte qu’on a des convictions, on ne doit pas attendre qu’on te dise de partir. On ne peut pas non plus demander à être chef d’un groupe dont on ne veut pas être membre. C’est de l’incohérence. Il s'est chassé lui-même de la présidence de l'Assemblée nationale.  C'est donc  dégoûtant de voir cette démarche malhonnête qui consiste à se  pavaner après pour  dire que tel est ingrat, tel n’est pas reconnaissant. C’est l’hôpital qui se moque de la charité. C’est le chef des ingrats qui parle de l’ingratitude, surtout quand on sait comment il a remercié IB qui l'a appelé auprès de lui en 2000.

Il prône aussi la réconciliation. Il demande pardon à toute la nation. Qu’en dites-vous ?

Tout le monde parle de réconciliation en Côte d’Ivoire, même ceux qui appellent à la haine tous les jours sur les réseaux sociaux. Il ne s’agit pas de tenir un discours, les actes sont plus parlants. Quand on garde les biens des gens par devers soi, on ne peut pas parler de réconciliation sans les avoir, au préalable, restitués. Tu refuses de donner le corps de mon enfant, comment je peux être réconcilié avec toi ? Jusqu’à ce jour, les corps de Koné Moussa et de Koné Morel sont gardés par ces personnes. Si Guillaume veut montrer qu’il est sincère dans son désir de réconciliation, qu’il restitue ces corps à leurs familles. Nous-mêmes, lui avons tendu la main. Mais il a la rancune tenace. La réconciliation de Guillaume Soro est une réconciliation purement politique. Comment approcher le peuple bété pour avoir quelques voix là-bas, comment aller vers tel ou tel peuple pour piocher des voix, tout cela est purement politique, une instrumentalisation du discours de la réconciliation.

Vous avez également critiqué la ‘’vieille’’ classe politique qui doit passer la main...

Le problème s’est posé au niveau de la Commission électorale indépendante (Cei), où on peut dire aujourd'hui que le plus difficile a été résolu. Le gouvernement a, en effet, accepté le principe de l’équilibre, comme souhaité par la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples. Pendant ce temps, un certain nombre de partis politiques, notamment le Pdci-Rda, qui ont choisi comme porte-parole Bamba Moriféré, disent qu’il faut qu’il y ait une concertation nationale comme en 1999-2000. Une concertation où le gouvernement se met de côté et laisse les associations et les partis politiques décider. Ils exigent qu’il faut changer la Constitution, la Cours suprême, la Cei. Dans un autre sens, ces mêmes mettent à l’écart les nouveaux partis dans le débat. Pour eux, la condition pour être membre de la nouvelle Cei, est d’avoir des députés à l’Assemblée nationale. J’en ai rigolé, puisque je trouve qu’ils ne sont pas cohérents. Ils critiquent la Cei qu’ils qualifient d’incompétente, en mettant en doute la régularité des élections qu'elle a organisées, et utilisent les députés obtenus lors des élections passées comme élément de légitimité pour écarter les autres partis. Il est inconcevable que ces personnes parlent en notre nom. Concernant le Pdci-Rda, le pays lui a été confié sous le Président Houphouët-Boigny, qui a réalisé de nombreux travaux. Lorsqu’il leur a légué l’héritage, qu’en ont-ils fait ? Pour nous, la politique s’identifie par une vision, une idéologie et la pratique qui doivent donner des résultats. Le résultat indiscutable est que notre pays est aujourd'hui un pays sous-développé et c'est le résultat de leur politique. Notre pays était au même niveau que la Corée et la Chine dans les années 1960, il resté en arrière au niveau du développement. Au niveau de l'unité nationale, on constate tous que le pays est aujourd’hui divisé. C’est le fruit de leur gestion. Avec ces échecs, ils veulent aujourd’hui parler encore en en notre nom ! Bamba Moriféré était notre formateur politique. Il m’a formé. Aujourd’hui, je suis président d’un parti politique. Sa fille Affoussiata Bamba est responsable dans le parti de Soro Guillaume. Et il veut continuer de discuter des postes politiques avec nous ? Il y a un temps pour la retraite ! Bamba Moriféré, votre temps est passé, vous êtes dépassé ! A ces aînés, je dis : nous vous avons confié le destin de notre pays et le résultat est négatif parce qu’il est resté sous-développé et divisé.

Beaucoup souhaitent que la Cei soit uniquement composée de membres de la société civile ? Croyez-vous à sa crédibilité ? Quelle est votre opinion sur la question ?

Le problème de légitimité de la société civile est une réalité. En 2000, j’étais membre de la Commission consultative constitutionnelle. Nous avons constaté que des partis politiques ont créé des associations satellites pour faire écho de la ligne de leur parti. Ce sont donc ces associations qui ont contribué à la rédaction de la Constitution dont la majorité était la ligne de certains partis politiques majoritaires. Aujourd’hui, il y a débat sur la neutralité de la société civile en Côte d’Ivoire. Mais nous avons dit qu’il peut avoir un contrebalancement. C’est-à-dire prendre les associations de diverses idéologies, les mettre ensemble pour qu’elles puissent se neutraliser en interne. C’est pour cela que nous avons proposé les chrétiens, les musulmans, le patronat, les associations caritatives, la Chambre des rois et chefs traditionnels, les transporteurs, la chambre des métiers, la chambre d’agriculture, la magistrature. Nous sommes contre l'idée d'une concertation ou conférence nationale sur la Cei, c'est une idée saugrenue et anachronique venant de Moriféré et du Pdci-Rda. Ils se braquent juste pour faire croire que le pays est à feu, donc il faut une concertation nationale, cela ne peut pas marcher. Le pays n’est pas comme en 2000 où il y a eu concertation nationale parce que le pays était en crise, la Constitution était suspendue, il n’y avait pas d’Assemblée nationale et le régime qui était là en 1999 était militaire. Il n’avait pas de légitimité. D’où la mise en place de la constituante. Aujourd’hui, le régime qui est en place est issu d'élections auxquelles le Pdci-Rda a participé, donc pourquoi mettre en place une constituante pour écrire les textes de la Cei ?

Pour vous, le débat est donc ailleurs et non sur la Cei… ?

Je leur ai dit qu’on peut faire une concertation nationale avec toutes les organisations citées plus haut pour discuter de problèmes en rapport avec le développement social. Cela va commencer par les rentes viagères parce que beaucoup d’entre eux, se revendiquant de partis d’opposition, bénéficient de rentes viagères pharaoniques dans un pays où le Smig est à 60 mille F cfa. C’est injuste. Ces personnes se sont fixés, depuis l’Assemblée nationale, des salaires énormes et à vie dans un pays où lorsque les autres perdent leur emploi, ils ne bénéficient pas d’assurance chômage. Nous devons y mettre fin. Ils n’abordent pas cette question parce qu’elle les concerne personnellement. Nous allons parler des salaires parce qu’il faut qu’il y ait une justice salariale en Côte d’Ivoire. En France, le Smig est à 1200 euros, donc le président de la République ne touche pas plus de dix fois le plus bas salaire du pays. Alors que chez nous, des gens sont payés à sept, huit, neuf millions Fcfa avec un Smig de 60 mille Fcfa, soit plus de 100 fois le Smig. Ce n’est pas acceptable. Nous voulons que le Smig soit à 100 ou 110 mille, mais aussi que le plus gros salaire ne soit pas plus de trente fois ce montant. C’est-à-dire trois millions de F cfa au maximum. Dans ce contexte, si ceux qui dirigent le pays veulent augmenter leur salaire, ils devront également augmenter le Smig étant donné qu’il y a un rapport entre les deux. Nous estimons, en effet, qu’il faut sortir du Smig et passer au Smic (Salaire minimum interprofessionnel de croissance), qui est indexé sur le coût de la vie. Nous devons parler de l’assurance chômage. Lorsque des personnalités, je viens de faire allusion à une, perdent leur poste, ils ont automatiquement des rentes, tandis que des travailleurs qui totalisent des années de fonction ne bénéficient de rien lorsqu’ils perdent leur emploi. Nous voulons parler de la réorganisation du système de santé, de la mise en place des agences régionales de santé et de la prévention sanitaire. Nous souhaitons qu’il y ait un numéro identifiant unique. Nous avons aussi proposé de parler de la création d’un certificat de citoyenneté qui permettra d’attester qu’un citoyen est assidu, qu’il vote régulièrement, etc. Ce document lui permettra de bénéficier d’aides sociales s'il est pauvre. Cette carte va lui être exigée à l'instar de la carte de position militaire lorsqu’il voudra se présenter à des concours. Parce qu’on ne peut pas apporter des aides sociales à quelqu’un qui refuse de voter. Pour nous, la question de l’adressage, du numéro identifiant unique, de la bancarisation des citoyens, de l’école gratuite, sont autant de questions qui méritent d’être débattues au cours d’un dialogue national. Pour nous, ce sont ces questions qui doivent être au cœur du débat et non les questions de la Cei portées par une vieille classe politique qui ne pense qu’à ses rentes et ses privilèges. Nous voulons mettre au centre du débat national les vraies préoccupations du peuple.

Avez-vous des appréhensions sur 2020, échéance de la prochaine élection présidentielle ?

Je suis très serein. C’est vrai que certains s’excitent en sillonnant le nord pour manipuler les populations. La stratégie de ceux-là, c’est de semer le chaos, inciter à des mutineries et conduire le pays dans une forme de djihadisme, prendre une partie du pays en otage. Cela ne va pas prospérer. Les Ivoiriens ne sont plus dans cette dynamique. Ils ont vu ces personnes aux affaires et savent que lorsqu’elles mangent, elles ne pensent pas aux autres. Pendant qu’elles délaissaient les gens dans la misère à Bouaké, elles scolarisaient leurs frères aux États-Unis et achetaient des maisons pour leurs deux femmes en France. Ce ne sont pas ces individus qui vont dire qu’ils parlent au nom du peuple. Notre combat est celui de l’unité nationale, du partage des richesses, de l’amélioration des conditions de vie des populations. Nous appelons les Ivoiriens à la réconciliation. Il ne faut pas que nos compatriotes se laissent manipuler par des individus qui ont dirigé ce pays pendant un demi-siècle. Nous les avons vus ici pendant cinquante ans, distribuant les richesses par famille et entre alliés. Nous avons vu d’autres, qui ont géré le pays pendant dix, sans pouvoir mettre en place un simple restaurant du cœur pour les pauvres, aucune œuvre sociale ou caritative pour les habitants des quartiers précaires alors qu’ils partaient soigner leurs dents au Maroc, pendant que nos hôpitaux étaient vides. Leurs femmes partaient faire leurs emplettes aux Usa pour faire leur petit déjeuner au moment où le peuple criait famine. On a même eu des émeutes de la faim sous leur régime et ils ont tiré sur des populations qui criaient famine à Yopougon. Ceux-là sont disqualifiés. Nous sommes là et parlons de réconciliation et de paix. Nous appelons à la réconciliation entre fils du pays. Rassemblons-nous comme ce fut le cas sous le Président Félix Houphouët-Boigny.

Interview réalisée par
Amédée ASSI