Sana Barry Oumou (directrice centrale de l’Aip) : "L'Aip est sortie du creux de la vague"

Sana Barry Oumou (directrice centrale de l’Aip) : "L'Aip est sortie du creux de la vague"

Sana Barry Oumou (directrice centrale de l’Aip) :  "LAip  est sortie du creux de la vague"

L’Agence ivoirienne de presse que vous dirigez a glané en 2017 de nombreux prix. Comment appréciez-vous ce couronnement ?

Je suis fière des agents de l’Agence ivoirienne de presse (Aip), pour le travail qu’ils effectuent au quotidien dans des conditions difficiles, tant à Abidjan qu’à l’intérieur du pays. Comprenez donc mon bonheur et ma satisfaction, lorsqu’en 2017, nous avons obtenu de nombreux prix et distinctions, tant sur le plan national qu’international. Je voudrais même relever que tout ce bonheur a débuté en 2016 avec le Prix d’excellence Communication (management) qui nous a été décerné. Ce prix a créé une dynamique qui a amené des fonctionnaires à se surpasser. Bien que satisfaite, je reste persuadée que beaucoup reste à faire. Mais nous sommes obligés d’avancer à pas de caméléon à cause du budget.

Pourtant au départ ce n’était pas évident, car j’arrivais dans un milieu qui n’était pas le mien, même si j’ai aimé et appris le métier « sur le tas », je suis journaliste d’agence sans carte professionnelle.  A l’agence, je vous affirme qu’en ce moment-là, tout était à faire et à refaire, y compris le moral de quelques-uns qui sont restés au poste et à qui je dis infiniment merci.

Les journalistes refusaient d’être affectés à l’Aip. Aujourd’hui, nous sélectionnons les meilleurs parmi les nombreux candidats. Avec ma volonté inébranlable de réussir (car je connaissais les tares de l’Aip pour y avoir passé au moins 15 ans comme sous-directrice), je me devais de relever le défi et montrer à ceux qui étaient septiques  que je pouvais m’engager à fond et moderniser l’Agence. Ma plus grande chance a été d’avoir participé à l’audit juridique, organisationnel et fonctionnel de l’AIP entre 2008 et 2010. Donc, je n’étais pas dans un milieu inconnu pour avoir effectué une analyse croisée de toutes les agences performantes d’Afrique et d’ailleurs. Dieu et le travail acharné du personnel remobilisé ont fait le reste. C’est ce qui nous a valu tous ces prix pour la qualité des productions, une source de motivation supplémentaire. Ce qui nous a inspiré pour instaurer cette année, quatre prix internes en fonction des catégories professionnelles (Chef de bureau, Journaliste, Correspondant de presse…) S’agissant du fonctionnement, il serait important de revoir le cadre organique afin de prendre en compte la dimension média de l’Aip.

Quelles sont les innovations que vous avez apportées et qui ont certainement permis à l’Aip d’avoir plus de visibilité aujourd’hui ?

Le produit qui a apporté le plus de visibilité à l’Aip,  tant à Abidjan qu’à l’intérieur du pays, est le flash info par sms sur smartphone ou tablette appelé «  Aip Direct ». A l’intérieur du pays, surtout les populations qui côtoient les chefs de bureau régionaux et les correspondants régionaux de l’Aip qui couvrent leurs activités depuis des années, n’avaient pas le retour d’information. Maintenant, elles sont satisfaites, car elles peuvent lire les informations en temps réel par sms, partout où elles se trouvent et quel que soit leur niveau d’instruction.

A côté du flash info, les principales innovations apportées depuis ma nomination sont entre autres, l’instauration d’un management participatif à 75% avec un grand sens de l’écoute et le respect des agents, toutes catégories confondues; Il y a aussi le site web plus dynamique avec l’introduction de la publicité payante ; L’abonnement groupé du gouvernement au fil de l’Aip ; La mise en place d’une sous-direction Communication et marketing ; La signature d’un arrêté portant octroi de primes mensuelles à tout le personnel de l’Aip pour motiver et améliorer les conditions de vie du personnel ; La charte de déontologie du journaliste de l’Aip ; L’immersion professionnelle annuelle à l’étranger et des stages de formations professionnelles ; La création d’un service dédié aux réseaux sociaux notamment Facebook, Twitter, Instagram,… pour aller vers d’autres cibles et contrebalancer les fake-news ; L’application mobile Aip sur Android ; L’adhésion de l’Aip aux organisations internationales des agences de presse notamment  la Faapa, l’Una et le Congrès mondial des agences de presse.

Je vais vous relater un fait qui montre l’importance de l’abonnement groupé du Gouvernement. Une personnalité qui, après avoir lu une dépêche de l’Aip sur sa localité, nous a interpelés pour savoir si le problème relaté par l’Aip était réel, car elle pensait avoir résolu cela dans sa région. Nous lui avons confirmé que les dépêches reposent sur des faits vérifiés et vérifiables, sans parti pris, sans commentaire.

On imagine que des difficultés existent tout de même ?

Les difficultés sont inhérentes à toute structure, dès que l’on résout un problème, un autre surgit. Les plus grandes difficultés sont entre autre : Un budget de fonctionnement insuffisant pour accomplir les missions de l’Aip malgré l’augmentation de nos ressources propres, car nous sommes un établissement public à caractère administratif ; La longue procédure administrative avant d’effectuer une mission à l’étranger. Alors que nous sommes un organe de presse, pour nous rendre dans un pays en Afrique, il nous faut une communication en conseil des ministres avec la signature de 5 ministres plus l’attestation du Gouvernement et en Europe, la signature de 4 ministres. Vous voyez donc notre quasi-impossibilité à faire une mission de couverture des évènements hors du pays, surtout lorsque nous sommes informés souvent une semaine avant le déplacement. L’absence de personnel fonctionnaire en TIC (Webmaster, ...)

Au récent séminaire gouvernemental sur la communication, le gouvernement a dit compter sur les médias de service public pour donner un peu plus de visibilité à ses actions. Quelle part compte jouer l’Aip ?

Au séminaire gouvernemental du lundi dernier, la création d’un comité de pilotage dans lequel l’Aip est membre, a été annoncée. En plus, nous avons écouté les objections formulées individuellement par les membres du gouvernement sur la communication. Cela a été très enrichissant pour moi, car je suis repartie avec de nombreuses idées de rectification de la couverture des évènements par les agents de l’intérieur du pays et même ceux d’Abidjan. Dès l’après-midi, j’ai eu une séance de travail avec le sous-directeur de l’information. Ce qui m’a désolé est de constater que certains oublient que chaque organe a sa place et peut suppléer l’autre, il faut utiliser l’Aip à l’intérieur du pays où elle a un réseau de 80 agents chargés de la couverture, un seul organe ne peut tout faire. Nous avons commencé à déployer des caméras dans plusieurs régions. Nous avons noté que le gouvernement a besoin de tout savoir le positif comme le négatif.

 Quelle Aip comptez-vous offrir les jours à venir?

Il m’est toujours difficile de parler des perspectives, car cela dépend de plusieurs facteurs exogènes. Toutefois, mon souhait le plus ardent est la mise en place du multimédia (texte, son, image) et le renforcement de l’utilisation des nouveaux médias, l’audit du réseau de l’information et de la communication pour plus de performance à ce niveau pour un meilleur référencement en vue de booster les ventes et la publicité, la modernisation du circuit électrique et téléphonique. A cela je voudrais ajouter l’acquisition d’un siège définitif pour l’Aip. Le ministre de la Communication, de l’Economie numérique et de la Poste, nous a donné des gages que ce problème est en passe d’être résolu avec une agence clé en main.

J’imagine que vous êtes très optimiste pour la suite ?

Je voudrais saisir cette opportunité pour féliciter à nouveau mes collaborateurs, car le métier de journaliste d’agence est difficile. C’est un métier de journaliste de l’ombre, de travailleur de l’ombre. On ne nous connaît pas, mais cela ne doit pas émousser notre ardeur et notre compétence, car la récompense est toujours au bout de l’effort. Avec ces nombreux prix et distinctions obtenus, je leur dis que l’Aip  est sortie du creux de la vague. Donc, continuons à faire toujours plus et mieux. A nos abonnés, je les remercie pour leur fidélité et leurs critiques constructives qui nous permettent d’améliorer la qualité de la production. Les observateurs avertis reconnaissent que le fil de l’Aip s’améliore d’année en année et les agents de plus en plus professionnels.

Interview réalisée par SYLVAIN NAMOYA