
La dot, interdite dans la loi ivoirienne, mais toujours pratiquée
La dot, interdite dans la loi ivoirienne, mais toujours pratiquée
Selon l’ article 20 de la loi N° 64-381 du 7 octobre 1964 sur le mariage, « l’institution de la dot, qui consiste dans le versement au profit de la personne ayant autorité sur la future épouse, par le futur époux ou la personne ayant autorité sur lui, d’avantages matériels conditionnant la réalisation du mariage traditionnel, est immédiatement abolie ». Ses articles 21 et 22 prévoient des sanctions pour tous ceux qui vont contre cette loi.
Doit-on alors changer la loi ?
Elle dit ceci : « sera puni d’un emprisonnement de six mois à deux ans et d’une amende double de la valeur des promesses agréées ou des choses reçues ou demandées, sans que ladite amende puisse être inférieure à 50000 francs, quiconque aura, en violation des dispositions de l’article précédent, soit directement, soit par personne interposée, que le mariage ait eu lieu ou non : sollicité ou agréé des offres ou promesses de dot, sollicité ou reçu une dot ; usé d’offres ou de promesses de dot ou cédé à des sollicitations tendant au versement d’une dot. Sera puni des peines portées à l’article précédent, quiconque, agissant comme intermédiaire, aura participé à la réalisation des infractions prévues audit article ». Cette loi va encore plus loin en disant qu’en cas de divorce selon l’article 23, «les dots versées à l'occasion des mariages contractés antérieurement à la promulgation de la présente loi ne pourront donner lieu à répétition. Toutefois, en cas de divorce prononcé aux torts et griefs exclusifs de l'épouse, le tribunal pourra en ordonner la restitution partielle ou totale ». Dans la réalité, cette loi semble complètement ignorée, volontairement ou involontairement depuis plus d’un demi-siècle. En Côte d’Ivoire, les femmes ne jurent que par la dot. Certaines considèrent qu’elle est beaucoup plus importante que le mariage civil ou religieux par exemple. Et pourtant, cette pratique est juridiquement interdite sur l’ensemble du territoire ivoirien et sanctionnée de forte amende. Le rêve premier d’une jeune fille ou même d’une femme en Côte d’Ivoire est d’être dotée par la famille de l’homme qui la courtise. Cette pratique traditionnelle est tellement bien ancrée dans les mœurs qu’elle prend même le pas sur la loi, qui l’interdit pourtant. Doit-on alors changer la loi ? La réhabiliter ? Ou bien au contraire, se décider à la faire réellement appliquer ?
La dot accordée à l’homme
Selon le code civil français, en son article 1406, « la dot est donc la fortune accordée à l’homme par son épouse ou par un autre individu pour le compte de l’épouse, dans le but de soulager le mari du poids du mariage ». Cette disposition législative de la loi française a sûrement influencé les législateurs, quatre ans après l’indépendance de la Côte d’Ivoire. Cette pratique française allant à l’encontre des coutumes ivoiriennes était de nature à cette époque à perturber la compréhension des choses des familles ivoiriennes. De ce fait, on peut très bien imaginer la logique dans laquelle s’est positionné le législateur, lorsqu’il a interdit cette pratique coutumière dans le droit ivoirien. Ce n’est un secret pour personne, la plupart des lois de nos jeunes Etats démocratiques en construction sont calquées sur les lois françaises, en ce qui concerne les pays africains francophones. Cette disposition du code civil français en son article 1406, qui fait obligation à la femme de donner sa fortune à l’homme dans le cadre du mariage, doit faire hurler bon nombres de femmes en Côte d’Ivoire. « Donner la dot à un homme pour qu’il m’épouse ? » doivent se dire certaines femmes. Mais pourquoi, cela ne serait-il pas possible, vu les sommes faramineuses qui sont parfois demandées de manière exagérée ? La dot doit-elle se faire uniquement à l’endroit de la femme ? Pourquoi elle ne pourrait-elle pas se faire également dans l’autre sens, au bénéfice du marié ?
Macaire DAGRY
Mise en exergue
En Côte d’Ivoire, les femmes ne jurent que par la dot. Certaines considèrent qu’elle est beaucoup plus importante que le mariage civil ou religieux par exemple. Et pourtant, cette pratique est juridiquement interdite sur l’ensemble du territoire ivoirien et sanctionnée de forte amende