Chronique : Finalement, c’est "saint", "sain" ou "seins" Valentin?
Avec ou sans protection, ils sont entrés en collision après effraction dans le jardin aux fruits défendus. Mais on ne fait pas irruption en amour ; on n’y entre pas pieds joints et mains liées. Combien ont bâti la trame de leur histoire sur les draps d’un soir ? Combien se sont connus nus avant même de penser à se couvrir ? Combien se mangeront crus après avoir tout consommé ? Et puis, des amoureux du même sexe célèbrent-ils aussi la Saint Valentin ? Saint Valentin, qui est tu ? D’où viens-tu ? Que caches-tu ? Et dire qu’y en a qui ne connaissent même pas l’histoire. Combien connaissent le sens profond d’une fleur selon sa couleur ? Entre le poulet flambé et la carte postale, le choix est total. Fini la poésie à l’eau de rose ; on ne vit pas d’amour et d’eau fraîche. Terminées les envolées lyriques aux contours oniriques ; on ne rêve pas d’avenir quand le présent nous offre déjà tout. Pourquoi remettre à demain ce qu’on a à portée de main ? Après s’être rencontré dans la rue, on passe par la chambre avant de faire connaissance au salon. Ça a l’air bidon, mais c’est comme ça ! Depuis que Saint Valentin nous a pris la tête, il n’y a que la fête qui compte ; la fête de la belle et de la bête.
Quand je vois des couples de plus de cinquante ans de vie commune continuer à cheminer ensemble, mon cœur se met à battre. Quand je vois ces vieillards croulants s’amouracher comme des collégiens, je perds mon latin. Comment font-ils pour ne pas s’essouffler ? Quel est leur secret ? Aujourd’hui, chaque année avec ses amours ; chaque jour nous joue des tours ; on ne « court » pas la même fille deux fois ; ça passe ou ça casse ! Entre deux SMS où quelques clins d’œil sur WhatsApp, on peut brouiller le réseau et embrouiller la « go ». On fera l’essentiel dehors avant d’aller voir les parents. Et on s’étonne d’être « carent » au beau milieu d’une traversée conjugale mal conjuguée. Et si Saint Valentin n’était qu’un vilain malin venu de loin pour nous dévoyer du bon chemin ? Et si tout cela n’était que pour ça, alors là, il faut remettre tout à plat ! Non, on ne peut pas s’amuser de l’amour avec l’amour au point de le faire. On ne peut pas jouer aux amours avec l’amour au risque de le réduire à un simple jeu. A Saint Valentin, on ne fait plus de vœu ; on veut ! A Saint Valentin, on ne garde plus la flamme du feu ; on l’éteint en jouant au pompier. De toute façon, à quoi sert de raviver une flamme qui s’éteint quand tout autour, il y a bien d’autres plus rayonnantes ? Que faire d’une fille qui donne tout sur l’autel sacrificiel de Valentin, aussi saint paraît-il ?
Et si Saint Valentin n’était qu’un symbole, mieux, une école ? Et si ce n’était qu’un bon prétexte qui transcende le sexe pour penser perception même du sexe ? Et s’il nous appelait à la méditation sur notre relation ? Et si Saint Valentin n’était pas qu’une fête, mais une occasion de tête à tête à visage découvert ? Nous comprendrions qu’au-delà de la chair qui faiblit et du muscle qui raidit, il y a un sens inédit. Malheureusement, depuis qu’AIMER est devenu un verbe à tout faire, on y fourre tout ; il se bourre de tout. Comme c’est fou d’aimer sans s’aimer ! A Saint Valentin, la sainteté est confiée aux entêtés de l’amour embêté. Finalement, dites-moi : c’est « saint », « sain » ou « seins » Valentin ?
Clément ZONGO
clmentzongo@yahoo.fr