Une définition globale de la santé: Vers une définition universelle de l’être humain
Une définition globale de la santé: Vers une définition universelle de l’être humain
La constitution de l’Organisation mondiale de la santé (Oms) a permis, pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, de disposer enfin d’une définition universelle de la santé : ‟ La santé est un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas en une absence de maladie ou d’infirmité. Cette définition multidimensionnelle de la santé et du bien-être fut à l’origine d’un lent processus éducatif qui permit à la communauté internationale de comprendre au fil des décennies, le fait que le cadre technico-économique tracé comme symbole de progrès par la Modernité était décidément bien d’une étroitesse et ne reflétait la réalité que de manière très incomplète. Mais, ce qui est peut-être plus important encore, donner pour la première fois une définition universelle de la santé revenait à offrir également une définition universelle de l’être humain, peu importent ses croyances, sa couleur, ou encore sa relation avec un pouvoir politique quelconque.
En effet, comment mesurer le ‟ complet bien-être ˮ si ce n’est en référence aux valeurs culturelles spécifiques du « sujet » (individu ou groupe) concerné ?
Le passage du concept moderniste de l’homme-machine à celui, si spécifique du nouvel esprit scientifique, de l’homme multi-dimensionnel, caractérisant l’approche globale de la santé doit énormément à l’anthropologie. En dépit du fait qu’elle soit très novatrice au regard des Occidentaux, cette définition s’ajoutait à la vision que les grands systèmes thérapeutiques traditionnels avaient toujours eue de l’être humain.
Ainsi, de manière apparemment paradoxale dans la mesure où elle a permis à l’avant-garde scientifique de s’ajouter aux traditions préindustrielles, cette définition universelle de la santé et, en conséquence, de l’être humain facilita le dialogue entre les représentants des divers systèmes thérapeutiques dans le monde. Ce souci était tout à fait légitime dans la mesure où il répondait aux objectifs de l’Onu qui visent le renforcement de la coopération technique et culturelle entre les nations.
Toutefois, le fait que l’Oms eut également en charge la standardisation des normes relatives à la santé pourrait sembler en contradiction avec cette reconnaissance implicite de la diversité culturelle. Ce n’était pas le cas dans la mesure où cette fonction constitue l’un des moyens les plus objectifs et les plus efficaces pour que l’unité biologique des êtres humains soit enfin reconnue universellement. Des points de vue biologiques égaux face à la science, les humains doivent le devenir aussi du point de vue social et politique. L’une des grandes missions assignées à l’Oms était d’assurer le respect à la fois de l’unité biologique de l’être humain et de la diversité culturelle se manifestant également dans le domaine de la santé.
Par le biais de l’Oms, les Nations unies vont s’équiper pour avancer de solides arguments ayant pour but de mettre fin aux théories racistes aboutissant au ‟ plus grand désastre qui se soit abattu sur l’espèce humaine depuis l’époque glaciaire ˮ. Ce qui a provoqué ce grand désastre, c’est cette approche séparatrice, « élémentariste », qui amena l’ « Homo occidentalis » à oublier le fait que les êtres humains constituent une seule et unique espèce et à la diviser en groupes et en « sous-groupes », dans le but de mieux la « hiérarchiser » en « races » à son seul profit. Poussée à l’extrême, c’est cette logique qui permit aux Nazis la justification de leurs crimes.
Une organisation internationale de la santé a été créée dans le but de corriger l’idéologie funeste de la Modernité sans pour autant que ne soient détruits, les divers progrès techniques qu’elle avait néanmoins permis à la médecine ainsi qu’à la biologie d’accomplir. Le dialogue multiculturel introduit par l’Oms de cette manière dans le secteur sanitaire « ré-humanisa » de façon progressive la médecine ainsi que les services de santé en Occident.
Le principe du feedback (quelle que soit la durée pour que le retour se réalise) sur lequel la cybernétique s’appuie, se trouva vérifié dans les années 1970. Les médecines douces vont renouer alors avec les traditions hippocratiques, elles vont populariser en Occident divers thérapeutiques traditionnels et finir par rencontrer un incontestable succès.
Aujourd’hui, il n’est pas jusqu’à la médecine qui soit devenue multiculturelle. Il est incontestable, la pluri-ethnicité des grandes villes industrialisées a pu jouer un rôle dans ce changement, mais il est indéniable que le rôle formateur de l’Organisation mondiale de la santé dans ce secteur a rendu facile, une évolution considérable des mentalités par le changement de la manière de concevoir l’être humain et les soins qu’il est en droit de recevoir.
BIBLIOGRAPHIE
BRELET Claudine,1995, Anthropologie de l’ONU, Utopie et Fondation, Paris, L’Harmattan.
ABOUA KOUAKOU
abouakouakou@yahoo.fr
Artiste graveur, professeur d’arts plastiques, licencié de socio-anthropologie, titulaire d’un master de la chaire UNESCO pour la paix spécialité développement durable.