
2e édition du Festival Abla Pokou: A l’école de la reine-fondatrice Baoulé
2e édition du Festival Abla Pokou : A l’école de la reine-fondatrice Baoulé
C’est du 2 au 5 juin que se tient la 2e édition du Festival Abla Pokou à Sakassou, localité située à 45 Km à l’ouest de Bouaké (région de Gbêkê). Annonçant la tenue de l’évènement de haute portée patrimoniale le 3 mai, à Abidjan, le commissaire général, Jean-Louis Kouassi, a indiqué qu’à cette occasion, la capitale du royaume du sous-groupe Walèbo et dépositaire du trône royal de toute l’aire baoulé, réunira ses quelque 5 millions de membres et de locuteurs des six régions et 19 départements aux fins d’une introspection mnémonique sur la philosophie et l’action politique sous toutes ses coutures léguées par la reine-fondatrice du peuple baoulé (Akan), Abla Pokou. D’où le thème générique du Festival: « Abla Pokou, d’hier à aujourd’hui, femme battante et épanouie: Nation prospère ! ».
A juste titre, le Comité d’organisation donnant mandat à un Comité scientifique pluridisciplinaire, entre autres innovations majeures de cette édition, à en croire Jean-Louis Kouassi, aux fins de décerner des « Prix d’excellence Abla Pokou » à des femmes reconnues pour leur leadership communautaire, social, culturel, intellectuel, à même d’impacter positivement l’essor local, national voire international de la société.
A l’image de l’acte sacrificiel de la reine Abla Pokou, porteuse de paix, de cohésion sociale et de coexistence pacifique qui devraient inspirer la Côte d’Ivoire dans sa trajectoire actuelle. Bien plus, au titre des innovations et donnant force de vie à la posture selon laquelle l’épanouissement intégral de la femme rimerait avec beauté, un concours puisant ses critères dans la pure tradition baoulé, dénommé « atonvlè » et marquant le passage de la jeune fille au statut de femme, sera une attraction attendue avec intérêt.
Par ailleurs, les avantages comparatifs des alliances et parentés à plaisanteries dont le peuple baoulé est fort imprégné, les pratiques écologiques, l’histoire et l’inventaire des attributs royaux authentiques des Baoulés, etc., sont quelques temps forts de la 2e édition du Festival Abla Pokou dont l’épicentre sera la place publique jouxtant la Cour royale de Sakassou.
Face à la portée patrimoniale, culturelle, touristique et interculturelle du festival, les ministres de la Culture et de la Francophonie, Maurice Kouakou Bandaman, du Tourisme, Siandou Fofana viendront aux côtés de leur collègue de l’Emploi et de la Protection sociale, Jean-Claude Kouassi, parrain du festival, apporter la caution institutionnelle. Accompagnés en cela par la Chambre des rois et chefs traditionnels de Côte d’Ivoire qui viendra soutenir la tête couronnée du Walèbo, Nanan N’Ga Tanou, reine des Baoulés. Toutes choses qui justifient, s’il en était besoin, à maints égards, l’implication de l’Unesco. Dont le siège abidjanais abritera la cérémonie de lancement officiel la troisième semaine du mois en cours.
D’ores et déjà, notons avec le Commissariat général que durant les quatre jours du festival, l’expression culturelle baoulé s’exprimera dans toute sa diversité à travers les danses traditionnelles, l’art culinaire, la poterie, l’art du tissage. Concernant les danses traditionnelles, les festivaliers prendront grand plaisir à voir ou à revoir le Goli de Bendêkouassikro, l’adjémlé de Kpatanou, le Bédouo d’Assandré, le Gbôh de Gnamienkro… Autre temps fort, ce sont ces conférences publiques, à l’instar de l’année dernière, prononcées sur « L’organisation du pouvoir politique en pays baoulé », « L’histoire authentique du Royaume baoulé d’hier à aujourd’hui » et « La contribution de la tradition et de la culture dans le développement de la Côte d’Ivoire ».
Quand histoire et légende se conjuguent au présent !
Vers la fin du XVIIe siècle et au début du XVIIIe siècle, à la suite de multiples guerres entre les tribus Akan du Ghana, et à la suite des conflits dynastiques à l’intérieur du royaume Ashanti à la mort du roi Osei Tutu, des vagues successives de populations ont émigré vers l’ouest de l’autre côté du Kumwin (fleuve Comoé) pour trouver la paix.
Deux batailles décisives en 1701, la première à Edunku puis à Feyase voient la déroute des armées Denkyira. Malgré la mort tragique du roi Ntim Gyakari, les Denkyira, avec à leur tête Badu Akrafi Brempon, résistent désespérément, mais ce dernier est capturé à son tour par les Ashantis. La migration denkyira se fera alors de façon massive dans toutes les directions. Vers Mpoho dans le Wassa, en Akyem et sur la côte. Une partie importante des migrants passe par les territoires de l’Aowin et du Sefwi pour s’établir définitivement dans le futur baoulé. Ce fut le peuplement Alanguira qui se fera entre 1701 et 1706.
À la suite du décès de l'Asantehene Opoku Ware I, Kusi Obodom se fit introniser puis assassina Dako, l'héritier légitime, frère d’Abla Pokou. Le massacre des partisans et parents de la victime va aboutir à la grande division du royaume fondé par Osei Tutu. C’est ainsi qu’une partie de la population ashanti, éprise de paix et de justice, conduite par la reine Abla Pokou, s’est installée dans le centre de la Côte d’Ivoire d’aujourd’hui pour fonder le royaume Baouléman.
Au prix de concessions dont, au-delà des faits historiques scientifiques et avérés, la légende soutient que la Reine aurait sacrifié son unique fils (ou neveu) dans le fleuve Comoé duquel un pont instantané à dos d’hippopotames aurait permis à la Reine et ses sujets épris de paix d’échapper aux poursuivants armés.
Sur le chemin d’exil, les Baoulés ont fait escale à Tiassalé où Tano Adjo, une des sœurs de la Reine s’est installée. Arrivées dans la région de Bouaké, Pokou et sa suite se sont installées à Niamonou dans le N’drannouan. À sa mort, sa nièce Akwa Boni lui succède.
Celle-ci a conquis de nouvelles terres, donnant au Baouléman sa configuration géographique actuelle, couvrant environ 30 000 km² et s'étend de Bouaké à Tiassalé en passant par Tiébissou, Yamoussoukro et Toumodi, de Béoumi à Daoukro et Dimbokro, entre le Bandama blanc et le N'Zi. Ayant quitté Niamonou, Akwa Boni a créé un village, Walébo (Oualèbo), plus à l'ouest. À sa mort en 1790 dans le Yaouré, sa dépouille a été ramenée dans le village pour y être inhumée. Ce village a été rebaptisé Sakassou. Sa région et son peuple ont gardé le nom Walèbo (Oualèbo).
REMI COULIBALY
Restez connecté sur le site web de Fraternité Matin