Chine: ‘’Les médias ne sont pas le 4è pouvoir…’’

Chine: ‘’Les médias ne sont pas le 4è pouvoir…’’

Chine :‘’Les médias ne sont pas le 4è pouvoir…’’

En République populaire de Chine, la presse n’est pas considérée  comme le 4e  pouvoir parce qu’elle ‘’ne peut pas résoudre les problèmes économiques, ni ceux de l’emploi, encore moins les problèmes sociaux’’,à en croire Gong Zhengwen, vice-président de la station de télévision et de radio de Hunan. Avant d’ajouter que même si par son reportage, ‘’on peut punir le mal et exalter le bien’’.

Le journaliste dans ce pays d’Extrême-Orient est perçu comme ‘’un transmetteur de vérité de la société’’, entendu comme celui qui donne et privilégie les faits.  ‘’ La vérité est la vie de la presse. A n’importe quel moment, le faux est le plus grand ennemi de la presse’’, soutient-on. Le journaliste est aussi ‘’un conducteur de l’opinion publique’’. Les médias principaux ‘’sont les producteurs de l’opinion publique et une partie de cette opinion. Ils ont à charge de la conduire‘’. Selon une enquête, malgré la perte d’audience des médias principaux (radio, télévision, journaux) et l’affaiblissement de leur influence quant à leur crédibilité publique, ils laissent l’internet derrière eux. A en croire cette enquête, 55% de personnes doutent des nouvelles données sur la toile. Après un grand événement, ‘’les gens croient le Cctv (la Chaîne nationale chinoise), le Journal du peuple(quotidienNdlr)’’. Le journaliste doit être aussi ‘’un surveillant de la société’’. Pour les Chinois, les médias traditionnels ne doivent pas se contenter de chanter la prospérité tous les jours (tout est beau, tout est bien). Ils ne doivent pas se comporter non plus comme l’internet ‘’qui découvre, tous les jours, les ténèbres’’.

A propos de ce que le parti attend des hommes de médias, le secrétaire général du Pcc, Xi Jimping, ’demande aux commissions du parti, à tous les échelons, de soutenir les médias afin qu’ils fassent des reportages sur les affaires qui violent les intérêts du public et les conduites qui violent la discipline du parti’’. Enfin, pour la société chinoise, les médias sont ‘’les défenseurs de la stabilité de la société harmonieuse’’. En effet, la presse assume une grande responsabilité dans le maintien de la stabilité. ‘’La construction de la société harmonieuse’’est l’objectif principal du parti et du gouvernement de la République populaire de Chine, depuis que ce pays a décidé de s’ouvrir au monde et ce, après la mort de Mao Zedong, en 1976. Les Chinois sont convaincus que si ‘’le printemps arabe’’, les ‘’révolutions libyenne ou égyptienne’’, la guerre en Syrie, etc. ont lieu dans leur pays, ‘’ils vont conduire au grand désordre et au recul de la société chinoise’’. C’est pourquoi ‘’les journalistes doivent privilégier l’unité nationale, la stabilité, diffuser des informations positives et transmettre l’énergie positive’’. Pour ‘’les événements sensibles’’ et ceux qui sont‘’en rapport avec la stabilité et l’harmonie de la société’’, la loi fait obligation aux médias d’être particulièrement attentifs et d’éviter des reportages qui peuvent ‘’conduire au déchirement social’’. C’est, entre autres, la raison pour laquelle les Chinois luttent de toutes leurs forces contre ‘’l’aliénation’’ des journaux internationaux et que les réseaux sociaux internationaux (Facebook, Twitter, etc.) sont coupés au détriment de celui de la Chine : www.sine.com (en chinois). ‘’La suppression des réseaux sociaux aide à corriger l’image de la Chine’’, selon Yindi Ling, rédacteur en chef adjoint de la radio et de la télévision de la province de Hunan, qui ajoute que ceux qui publient les rumeurs sur l’internet sont punies par les lois du pays.

Le parti, les chaînes de télévision et la concurrence

La Chine télévisuelle est subdivisée en quatre grands niveaux : le niveau central (Beijing, Shanghai …) la province (Hunan), la commune (Changsha) et le district. Au niveau central, plus d’une dizaine de chaînes nationales couvrent tout le territoire. Elles mettent l’accent sur les activités du parti et du gouvernement. Ceux-ci contrôlent tous les reportages et les programmes.

Les autres télévisions, équipées en Hi-tech, -ce sont des télévisions satellitaires- occupent, pour la plupart, le segment du divertissement, des séries télévisées locales, et aujourd’hui, constatant les limites d’une chaîne qui fait du divertissement son credo,  s’ouvrent sur la culture (émission sur les proverbes chinois par exemple).

Ces chaînes n’organisent pas de débats politiques contradictoires et ne critiquent pas non plus les actions du gouvernement. Tous les contenus des programmes sont strictement contrôlés par le gouvernement et le Parti communiste chinois, à travers l’administration de la radio, du film et de la télévision qui en font de  puissants outils de propagande. ’Il faut savoir satisfaire les besoins du public et ceux du gouvernement’’, soutient une animatrice vedette d’une chaîne régionale qui échangeait avec quelques membres de la délégation ivoirienne.

Ce qui laisse la place à une concurrence féroce entre les chaînes sur le segment du divertissement et des jeux, avec pour maître-mot, l’innovation. Selon Li Yaowu de la station de télévision et de radio de Hunan, ‘’l’innovation perfectionne la culture. La culture généralise la valeur. Et d’ajouter : ‘’Ce sont les programmes les plus créatifs qui survivent’’.

En avril 2011, la Hunan satellite television, pour faire face à la demande stratégique de son innovation globale, a fusionné le centre   de recherche et le programme étranger pour créer le Centre d’innovation et de recherche.

Missions : prendre racine à l’avant-garde du secteur de la télévision internationale, suivre étroitement l’évolution de la concurrence intérieure et outre-mer, rassembler les ressources des programmes et les bonnes idées (de par le monde), devenir le support le plus puissant de l’innovation de la chaîne dans une situation concurrentielle, recueillir les informations d’innovation du monde et les transformer en force productive de la télévision par une coopération internationale, etc.

Pour ce faire, la responsable du Centre, Yan Fan, participe, chaque année, aux fêtes et expositions de télévisions internationales comme  le forum des médias asiatiques ATF à Singapour, la fête de télévision Mipcom à Cannes (France) etc., pour recueillir des informations, des ressources et de bonnes idées. Elle a aussi lancé des forums et des formations systématiques pour renforcer les échanges et la coopération entre sa chaîne et les producteurs de télévision de tous les pays.

Toutes ces mesures ‘’visent à favoriser la capture, l’exploitation et le rassemblement des dernières informations en matière d’innovation dans le monde entier’’. Ce sont, en réalité, ‘’les régions les plus dynamiques dans l’idée créative (esprit créatif Ndlr) de télévision comme l’Europe, l’Amérique du nord et l’Asie-pacifique’’. Ce qui a permis également d’importer des émissions comme Take me out de Grande-Bretagne, The showdown show du Japon, I’m a singer  de Corée du Sud, afin de les transformer ‘’ à la sauce chinoise’’  en tenant compte de la vision du Parti, de la culture et des bonnes pratiques chinoises.

Aujourd’hui, la plupart de ces émissions caracolent en tête des taux d’audience (tous les 300m, un appareil installé reçoit le signal de chaque famille et est connecté à un serveur central), loin devant celles de la chaîne nationale avec tous les moyens de l’Etat. Ce qui attire de nombreuses publicités et autres sponsors,  donc d’importantes ressources financières. A titre d’exemple, le budget de la télévision régionale de Hunan comportant 79 millions d’habitants, est estimé à 700 millions de Yuans, soit près de 57 milliards de Fcfa, supportés entièrement par la chaîne à travers la publicité.

SYLVAIN NAMOYA,

envoyé spécial en Chine