Comme de vraies maso quoi ! Ou comme des sottes accomplies dans cette autre pub qui passe sur le petit écran : elle présente une flopée de midinettes courant vers une star du coupé-décalé, grand utilisateur d’une pommade au nom aussi quelconque que l’art censé vanter les vertus du produit. Et ce film du cube magique, secret tout aussi fantastique des femmes qui (re)tiennent leurs maris à la maison, loin des serres des étoiles briseuses de foyer. Cette autre œuvre pour du maïs soufflé, tellement délicieux aux papilles gustatives féminines, qu’il ouvre, tel un sésame, le cœur de sa belle au prétendant éconduit. Des pubs d’objets roulants, de substances chimiques éclaircissantes, de contraceptifs, de tôles ondulées, de clips musicaux, de pâtes dentifrices et autres. Nulles, mais qu’importe ! Une mauvaise pub reste une pub. On en parle et par ricochet, ça peut faire vendre.
La palme d’or revient à la dernière trouvaille. C’est une boisson alcoolique, d’orge fermentée et parfumée avec du houblon, nouvelle sur le marché et « fraîche comme les femmes d’ici » qui se présente à nous à travers des posters géants placardés dans tout Abidjan et sûrement aussi à l’intérieur du pays. Vous remarquerez, au passage, l’incongruité du lien supposé entre « les femmes d’ici » et une boisson prétendument « fraîche ». J’ai ouï-dire que cette pub a été censurée, mais vous constaterez avec moi que plus que jamais, à travers la ville et sur le petit écran, le sourire indéfinissable des déesses qui se sont prêtées à la provocation continue de nous narguer.
La farce est monotone, mais, en réalité, elle dénote du peu de talent de ses concepteurs. En troussant la robe de la pudeur par la présentation de la femme comme une chatte miaulant avec que des atouts physiques et en pensant ainsi vendre beaucoup de leurs marchandises, ils font preuve d’une originalité médiocre. Au demeurant, la Côte d’Ivoire est l’un des rares pays au monde où l’on assiste à des campagnes intempestives pour des boissons alcooliques et où aucun refus n’est opposé à des brasseries qui poussent le cynisme jusqu’à s’improviser sponsors de manifestations récréatives ( ?) pour la jeunesse. A quoi sert-il alors de faire la morale aux enfants, de leur parler des dangers de l’alcoolisme, si la télé, la radio, les affiches géantes, au quotidien, claironnent le contraire ? Les stratégies marketing en direction des jeunes consommateurs ont cela de pervers qu’à l’adolescence, l’alcool est perçu comme un symbole de convivialité, de virilité, de liberté, de « fraîcheur » et répond à un besoin d’identification. Il n’y a qu’à voir le nombre de jeunes à la Croix-bleue (centre de désintoxication situé à Adjamé/Williamsville), pour comprendre que l’alcool est devenu un problème de santé publique.
Si l’on s’accommode, hélas, de l’image très dévalorisante de la femme, emblème de la marchandise par le nu et le sourire, cette tolérance des pubs pour produits toxiques risque d’avoir des conséquences très désastreuses sur notre jeunesse. Les associations de consommateurs, toujours très informées des fluctuations du panier de la ménagère, devraient aussi regarder et écouter les médias chauds, observer la pollution visuelle qui sévit sur les pancartes géantes. Les organes de régulation de l’espace audiovisuel gagneraient aussi à bien faire comprendre le code de déontologie de la publicité et, au besoin, à sanctionner les récalcitrants.
par Oumou D
oumou.dosso@yahoo.fr