Promotion de l’huile de palme : “ Les capacités des raffineries locales sont supérieures à la production nationale d’huile brute ”
La capitale économique ivoirienne abrite, dans quelques jours, le premier Congrès africain de l’huile de palme (Apoc). Où en êtes-vous avec la préparation de ce grand rendez-vous ?
L’organisation de cet important évènement pour la filière huile de palme se déroule assez bien dans l’ensemble. C’est la première édition et nous avons forcément quelques préoccupations, notamment les formalités d’accueil et le protocole pour les personnalités invitées. Mais, nous sommes à pied d’œuvre pour y trouver des solutions idoines.
Outre les planteurs villageois, on annonce, entre autres, les producteurs industriels, les transformateurs, les distributeurs ainsi que les bailleurs de fonds. Et les organisations non gouvernementales qui sont à la pointe de la campagne de dénigrement contre l’huile de palme?
Nous voulons réunir tous les acteurs de la filière huile de palme afin de leur permettre d’échanger sur l’actualité et les défis auxquels son développement est confronté. Nous avons l’ambition de démontrer à tous que la culture du palmier à huile est véritablement une activité qui s’inscrit dans la lutte contre la pauvreté, la destruction de l’environnement et des écosystèmes. Elle contribue efficacement aussi à la sécurité alimentaire. Cela dit, il faudrait plutôt encourager les acteurs à promouvoir la production de l’huile de palme durable au lieu de soutenir un dénigrement systématique qui fait des amalgames regrettables et injustes.
Quel sera le rôle de la communauté scientifique à ce symposium?
Justement, nous avons besoin de sommités scientifiques pour apporter la contradiction aux dénigrements tous azimuts organisés pour ternir l’image de l’huile de palme qui est accusée de détruire massivement les forêts, de perturber les écosystèmes et d’être à l’origine des maladies cardiovasculaires. Nous aurons le privilège d’accueillir des biochimistes, des agronomes, des spécialistes de l’agroalimentaire, des environnementalistes, etc., en provenance d’instituts de recherche de renommée mondiale notamment d’Asie, d’Amérique, d’Europe et d’Afrique.
Vous envisagez la mise en place d’une plate-forme d’échanges entre tous les acteurs de la filière sur le continent.
Pourquoi?
Nous estimons qu’il serait plus intelligent de regrouper tous les pays africains qui sont finalement confrontés aux mêmes problèmes afin de mutualiser nos ressources et apporter des solutions concertées et appropriées. L’enjeu, c’est d’assurer le développement durable de la culture du palmier à huile en Afrique qui est désormais porteuse des ambitions futures.
La filière huile de palme ivoirienne est dans une relative léthargie.
Que fait votre faîtière pour résoudre les problématiques liées aux techniques culturales, à la promotion de la consommation et au développement durable?
Nous ne sommes pas de votre avis. En effet, la production d’huile de palme brute en Côte d’Ivoire est passée de 350.000 tonnes à plus de 500.000 tonnes en l’espace de trois ans. Toutefois, vous avez raison de rappeler que nos producteurs ont effectivement besoin d’adopter et d’appliquer rigoureusement un itinéraire technique adéquat afin de leur permettre d’améliorer sensiblement les rendements encore très faibles (6 à 7 tonnes). Le matériel végétal performant mis en place par le Centre national de recherche agronomique (Cnra) garantit plus de 25 tonnes à l’hectare. Nous y travaillons à travers la mise en place de stratégies de facilitation à accéder aux intrants, notamment la subvention du prix des plants sélectionnés ainsi qu’un encadrement de proximité approprié.
Quels sont, aujourd’hui, les opportunités d’investissement?
La Côte d’Ivoire ambitionne, à travers le troisième plan palmier, de doubler, voire de tripler la production nationale. Cela passera par l’accroissement des rendements des exploitations, la valorisation des jachères en préservant les forêts, la mise en place d’infrastructures modernes et la valorisation des coproduits ou sous-produits issus des processus de transformation. Ce sont autant d’opportunités pour les investisseurs potentiels.
On estime à 2 millions, soit 10 % de la population ivoirienne, le nombre de personnes tirant l’essentiel de leurs revenus du palmier à huile. Quelles sont les retombées de l’Apoc pour les planteurs ivoiriens?
Ce congrès permettra de mieux faire connaître la filière palmier à huile de Côte d’Ivoire. Il est même prévu une sortie sur le terrain pour permettre à nos hôtes d’échanger avec les planteurs et visualiser les réalisations. Par ailleurs, la réhabilitation de l’image de l’huile de palme va nécessairement profiter à tous les acteurs de la filière, en l’occurrence, les planteurs. Elle va rassurer tous les partenaires techniques qui pourront, par conséquent, être plus attentifs aux besoins de soutien et de financement de nos programmes et objectifs de développement inscrits dans le troisième plan palmier initié par l’Etat de Côte d’Ivoire.
Près de 20 % de la production nationale est exportée sous forme d’huile brute, le reste étant utilisé par les industries locales dont 40 % de produits finis sont exportés sous forme de margarine, d’huile de table, de savons, etc.
Que faites-vous pour stimuler la transformation locale?
Ces statistiques ne sont pas d’actualité. Aujourd’hui, la quasi-totalité de l’huile produite en Côte d’Ivoire est transformée sur place par les usines de raffinerie locales dont les capacités de transformation sont, pour l’instant, supérieures à la production nationale d’huile brute.
Pourtant, le secteur ivoirien des oléagineux attire de nombreux hommes d’affaires. A preuve, une délégation américaine conduite par Fahim-El Khoury a séjourné, récemment, à Abidjan.
Où faut-ils les orienter ?
Les perspectives sont encourageantes. Les déficits en oléagineux et donc en huile de palme sont estimés à plus de 500.000 tonnes pour l’espace Uemoa et plus de 1,8 million de tonnes pour la Cedeao. La filière palmier à huile de Côte d’Ivoire dispose d’atouts indéniables pour la conquête de ces marchés. Tous ces investisseurs seront pris en compte dans le cadre de la réalisation du troisième plan palmier qui fait la part belle au partenariat public-privé.
Interview réalisée par
Lancine Bakayoko