Alpha Blondy, tout feu tout flamme: "La première matière première de la Côte d’Ivoire, c’est la paix, préservons-la"

Alpha Blondy, star ivoirienne du reggae. (Ph: Adama Koné)
Alpha Blondy, star ivoirienne du reggae. (Ph: Adama Koné)
Alpha Blondy, star ivoirienne du reggae. (Ph: Adama Koné)

Alpha Blondy, tout feu tout flamme: "La première matière première de la Côte d’Ivoire, c’est la paix, préservons-la"

Le 07/07/25 à 11:46
modifié 09/07/25 à 13:46
Plus de 20 ans de silence. Puis, une heure d'entretien, beaucoup d'émotion, avec quelquefois des larmes, quand il parle de la Côte d'Ivoire. La star brise enfin le silence dans cette interview historique.
Vous venez de faire un concert très important à Osaka, au Japon, la troisième ville de ce pays. Est-ce un public que vous retrouvez ou un public que vous découvrez ?

C’est un public que je découvre. Parce que c’est la première fois que j’arrive au Japon et c’est la première fois que j’y joue.

Alors, quel est le retour que ce public vous a fait ? Comment appréciez-vous ce public ?

C’était une surprise. J’ai découvert que les gens connaissaient déjà le Papa Alpha Blondy. Le fait que c’étaient des gens qui ne comprennent pas le Dioula, chantent en Dioula, avec le public qui était là, c’était très convivial. C’était beau, très beau.

On est étonné qu’après tant d’années, plus de 40 ans sur la scène, le Japon n’ait pas été visité ?

Le Japon n’a pas été visité parce qu’il fallait des promoteurs. Nous, notre problème, c’est d’avoir des promoteurs sérieux. Quand on nous fait des propositions, on nous invite, on veut savoir la compétence du promoteur. Dans ce métier, il y a souvent des promoteurs véreux. Il y a des gens qui te disent on y va. Mais quand ces derniers ne respectent pas les termes du contrat, ce n’est pas la peine. Il n’y a rien de plus embêtant que de se retrouver face à un promoteur véreux très loin de chez toi. On est passé en escale à Osaka plusieurs fois, pour aller en Australie, pour aller en Nouvelle-Calédonie, même pour aller à Tahiti. Mais cette fois-ci, on a été invité sérieusement. Il y a encore d’autres personnes qui nous ont fait des propositions. Elles sont en discussion avec mon équipe.

Il est donc possible que vous reveniez à Osaka. Etes-vous prêt à renouveler cette expérience ?

Osaka ou Kyoto ou Tokyo.

Il y a eu 14 titres au cours de ce concert. Avec plusieurs titres qui ont fait appel au répertoire d’Alpha Blondy de ses débuts. Entre autres Jah Glory, Jérusalem, Cocody Rock, Sweet Fanta Diallo. Ça répond à quoi ?

Ça répond au fait qu’il y a des chansons qui sont des bornes kilométriques. Qui sont l’identité d’Alpha Blondy. Avant, je faisais la promotion des nouveaux titres. Et puis j’ai vu qu’on ramait trop. Donc, pour lancer un nouvel album, tu prends les anciens titres et tu ajoutes un ou deux nouveaux titres pour que les gens se retrouvent.

Et ça a été bien apprécié lors du concert. En outre, vous avez chanté quelque chose qui a particulièrement marqué. La chanson ‘‘Dounougnan’’ qui parle du destin. Alors aujourd’hui, Alpha Blondy pense-t-il que son destin s’est accompli ou est en train de s’accomplir ?

Je vais vous dire quelque chose sans être prétentieux. Mon destin appartient à mon Créateur. C’est Lui qui m’a donné cette feuille de route que je suis en train de conjuguer. Maintenant, ce qui est devant n’est pas de mon ressort. Ça Lui appartient. Moi je m’applique à faire ce que je suis en train de faire à l’instant présent.

Vous ne vous projetez pas ?

Parfois, j’ai eu la prétention de me projeter. Ma projection peut aller dans le sens de ma programmation, de ma feuille de route. Mais, la vie m’a enseigné qu’il ne faut pas enjamber Le Maître du temps. Parce que seul Allah maîtrise tous les détails concernant le temps dans lequel nous sommes actuellement. Voilà pourquoi quand on me dit destin, je dis, là, c’est de l’ordre du Patron.

Donc vous acceptez ce qui vous arrive ?

On ne peut pas faire autrement. Ce qui est écrit est écrit. Nul n’échappera à sa feuille de route.

Mais vous ne pensez pas qu’on peut modifier ce destin, par des efforts ?

On a parfois l’impression de le modifier. Même le soi-disant effort de résilience que tu vas fournir t’a été donné. C’était prévu, tout est programmé. J’ai lu les écrits de Stephan Hawkins qui dit que depuis le premier coup de crayon de l’univers, tout était prévu, y compris la présence de l’homme. Cela signifie, sans être prétentieux, que le Créateur est parfait. Donc, quelque part, cela nous invite à l’humilité. Quand on te parle de ton destin, cela varie. Avant de te prononcer, il faut dire Inch’Allah. C’est-à-dire « s’il plaît à Dieu » ou « si Dieu le veut ». Moi, c’est comme ça que je fonctionne. Parce que je peux dormir ce soir et ne pas me réveiller demain. Tout est une question de programmation avec Dieu. Nous avons des missions complémentaires. Moi, je suis chanteur. Toi, tu es la caisse de résonance. Sans toi, c’est fini : silence. N’eût été l’activité des producteurs, serions-nous en train de prendre du café ? Voilà pourquoi, il y a cette complémentarité divine. Dounougnan se classe dans ça. S’Il te donne, ne t’en vante pas. Et s’Il ne te donne pas, ne te morfonds pas. Ne te lamente pas. Parce que le plus grand cadeau qu’Il t’a donné, c’est le souffle de vie.

Dans mes recherches, j’ai lu que vous avez passé 25 années de votre vie au chômage et de ce fait, vous ne pensez donc pas au repos. Est-ce à dire qu’Alpha Blondy ne compte pas prendre de retraite ?

La retraite, c’est un luxe. Le repos, ma retraite appartiennent à Celui qui m’a mis en mission. Le jour où il pensera que l’élément Alpha doit se mettre en pause, ce sera le moment. Mais pour l’instant, moi, je cours. Avec la force de l’âge, j’avance. Parce que c’est l’assignation qui m’a été faite depuis.

D’où vous vient cette énergie, cette cure de jouvence ? Ce n’est plus l’Alpha Blondy des années 80, 90. Toutefois, on vous a vu vraiment communier, bouger, occuper rationnellement l’espace scénique à Osaka...

C’est l’amour du travail qui me procure du plaisir. Quand tu aimes ton travail, ce n’est plus une corvée, c’est du plaisir. Le plaisir de satisfaire ceux qui ont dépensé leur énergie pour venir me voir. Parce qu’en vérité, ce sont eux qui ont construit Alpha Blondy. Ces visages inconnus, ces personnes anonymes, ce sont eux les fils qui ont tissé la carrière d’Alpha Blondy. Ce sont ces derniers qui ont acheté les disques, qui viennent aux concerts. L’énergie qu’ils me donnent, c’est ce qui me motive. Moi, j’ai toujours le trac avant de monter sur scène.

Encore, après tant d’années...

Parce que tu ne veux pas décevoir ceux qui sont venus. Parce que c’est l’occasion de voir les énergies invisibles qui t’ont construit. Je ne veux pas décevoir mon Créateur. Je veux donner le maximum jusqu’au dernier souffle qu’Il m’a donné. Et qu’Il va me retirer, s’Il le désire. Mais, je suis toujours en quête de vouloir assumer la mission que mon Créateur m’a confiée.

On vous a vu accompagner la mission économique de la Côte d’Ivoire en développant l’aspect culturel. Peut-on parler de diplomatie culturelle lorsqu’on voit Alpha Blondy parler du cacao ivoirien, des produits ivoiriens, du tourisme ivoirien, de l’industrie ivoirienne ? Comment la culture peut-elle accompagner l’économie de la Côte d’Ivoire ?

Parler de la Côte d’Ivoire est la chose la plus simple. Dieu m’a confié à la Côte d’Ivoire. Je suis né en Côte d’Ivoire. La Côte d’Ivoire m’a nourri. Elle m’a envoyé à l’école. Je suis le résultat de la politique de la Côte d’Ivoire. Et en plus, je peux, sans aucune prétention, dire que je suis un produit de la Rti. Je suis né deux fois. Ma première naissance, c’est à Dimbokro. La naissance d’Alpha Blondy s’est faite en direct à la télévision ivoirienne en 1981.

Ma première chance, en 1981 déjà. Alpha Blondy est un pur produit de la Côte d’Ivoire. Que ce produit fasse la promotion d’un produit qui est le cacao, parce que le cacao, qu’on le veuille ou pas, partout où tu verras du chocolat, tu verras la tête des paysans de Côte d’Ivoire.

Ces inconnus, ces illustres inconnus, mais leur œuvre, l’œuvre de leurs mains, est partout sur la terre de Dieu. Quand les jeunes fêtent Noël, c’est du chocolat. En plus, la Côte d’Ivoire a l’humilité de ne pas se taper la poitrine pour dire c’est moi le pays du cacao. Il y a des pays qui se sont autoproclamés pays du chocolat. Parler de la Côte d’Ivoire, c’est comme un enfant qui parle, qui vante ses parents.

Vous êtes aujourd’hui un ambassadeur de la Côte d’Ivoire.

Oui, la vie l’a voulu comme ça. Je fais la promotion du pays qui m’a vu naître, du pays qui a tout fait pour moi, du pays à qui je suis redevable. Et le pays lui-même n’a pas attendu que moi je sois là pour sa promotion. La Côte d’Ivoire est le numéro un du cacao. Donc, je suis très fier de représenter, de faire partie de ce don divin qu’est la Côte d’Ivoire. Et puis, le cacao, c’est notre cacao. D’ailleurs, j’ai fait une chanson à l’époque qui s’appelle « café cacao »... Je suis encore dans cette mouvance de promouvoir le cacao, de promouvoir nos paysans. C’est aussi pour promouvoir cette Côte d’Ivoire qui travaille. Nous sommes un pays de bosseurs.

En êtes-vous fier ?

Très, très, très fier. D’ailleurs, tout le monde le sait.

Nous sommes en année électorale. Avez-vous un message à adresser aux Ivoiriens et aux politiques, pour que la Côte d’Ivoire que vous venez de décrire, qui est un pays puissant, qui est un pays intéressant, qui est un pays que les gens doivent visiter, qui est un pays de paix, reste sur le cap de votre description ?

Ce que je peux dire, c’est que la première matière première de la Côte d’Ivoire, c’est la paix. Dans la paix, tout est possible. Dans la paix, tous les rêves sont permis. Je ne suis pas politicien. Après tout ce que la Côte d’Ivoire a traversé, je me permets de penser que nos acteurs politiques ont atteint et acquis une certaine maturité. Quand je regarde les débats politiques aujourd’hui sur les divers supports médiatiques, j’éprouve de la fierté. Parce qu’on se ‘’dit les gbè !’’...

Manifestation de la liberté d’expression...

C’est important. On se dit les « gbè ». Il faut s’appuyer sur cette maturité pour lever les difficultés politiques et avancer. Dans le contexte de compétition mondiale à laquelle la Côte d’Ivoire prend part, je vois les politiciens, nos hommes politiques constituer l’équipe des Éléphants politiques de Côte d’Ivoire face aux autres nations. La Côte d’Ivoire, un pays africain, ne peut pas se payer le luxe d’éteindre des cerveaux. Au-delà des guéguerres entre les chapelles politiques, mon rêve, c’est de voir une véritable équipe des ‘’Éléphants politiques de Côte d’Ivoire‘’.

Comment y parvenir face à des discours incendiaires faisant allusion à la « bagarre »? Ça donne l’impression qu’il y a du feu devant.

Ils sont un peu naïfs. Ils n’ont pas compris le rôle des marchands d’armes. Ils n’ont pas compris que la guerre est un business. Et que la moindre faille est exploitée par ces marchands d’armes pour nourrir la guerre. Tout simplement parce que pour eux, c’est rentable. Ils ont leurs journaux, leurs télévisions. C’est une industrie, celle de la guerre. Tout petit malaise est exploitable et rentable pour eux. La guerre n’est pas une affaire de pauvres. Les Africains ne fabriquent pas d’armes ni de munitions. Je n’insulte personne, je fais un petit dessin. Quand on est pauvre, on a intérêt à s’entendre et à s’unir. Dans le contexte mondial actuel, tu allumes un feu et après, ton propre feu t’échappe. Il devient incontrôlable. Comme le disait Donald Trump au Président ukrainien Volodymyr Zelensky : Tu n’as pas les cartes ! Et les pays africains n’ont pas les cartes en main. Vous voulez commencer un jeu et vous n’avez pas les cartes en main. Je vous demande de mettre balle à terre.

Et comment appréciez-vous aujourd’hui la gouvernance de l’État en Côte d’Ivoire ?

Tout le monde, dans tous les pays du monde, critique les gouvernants de son pays. C’est comme ça. Mais là, en Côte d’Ivoire, tout ce qui a été réalisé, pour nous qui avons un certain âge, c’est incroyable, ce qui a été fait ! Je veux qu’on continue sur cette lancée. Voilà pourquoi je parle des Éléphants politiques de Côte d’Ivoire. Quand Ouattara ne sera pas là, un autre sera là. Ok ? Vos histoires de partis politiques, je ne suis pas dedans. Ça vous divise. Déjà, on vous a divisés depuis. On a un problème, c’est l’analphabétisme politique. Et j’ai appris un mot qui décrit le mal africain. Ça s’appelle les ultra-crépidarialistes.

Ce sont des gens qui n’ont aucune qualification par rapport à un sujet donné et qui se font des experts de ce sujet. Il y a plein d’ultra-crépidarialistes politiques en Afrique. Surtout en Côte d’Ivoire. Ceux qui, dans un maquis, à la huitième bière, vont expliquer la Constitution. Tu comprends un peu, non ! Ce sont eux qui connaissent tous les politiciens. C’est un danger aussi. Il ne faut pas laisser le pays à la merci des ultra-crépidarialistes. Être en costume, cravate avec une mallette, c’est du cosmétique. Mais la compétence, c’est autre chose. Regarde le Japon. Tu parles de guerre ? Ils y ont goûté et se sont mis au travail. C’est un exemple. Ce n’est pas un hasard si Dieu a voulu qu’on se retrouve ici (Ndlr : l’entretien se déroule à Osaka) pour dire que la plus belle guerre, c’est la guerre avec le cerveau.

C’est la guerre que les Ivoiriens sont en train de gagner depuis l’indépendance en 1960. C’est cette guerre qu’on gagne depuis. Le développement, les universités, les hôpitaux, les infrastructures. C’est cette guerre qu’on doit gagner pour nos petits-enfants et nos enfants. Ce programme de guerre, c’est tellement bête que pour moi, c’est une bêtise effroyable. Comment un Africain intelligent peut-il parler de guerre ou tomber dans le piège de la guerre ? Je ne comprends pas.

Si on vous demandait de vous adresser à trois politiciens essentiels aujourd’hui. A savoir le Président Ouattara, l’ancien Président Gbagbo et Tidjane Thiam du Pdci.

Je leur dirais gentiment, votre survie politique dépend de la paix que vous allez instaurer dans ce pays. Votre entrée dans l’histoire glorieuse de cette Côte d’Ivoire dépendra de comment vous allez maintenir le climat de paix, maintenir les Ivoiriens ensemble. Nous sommes un petit pays, un petit peuple à la grande gueule et vous êtes des nôtres. Vous devez faire cet effort. Ce n’est pas une question de muscles.

Nous parlons aujourd’hui du siècle des cerveaux. Quand je parle de l’équipe des Éléphants politiques, aucun pays africain ne fait ça. Ils sont tous en train de se taper dessus. D’autres pensent que le raccourci c’est le coup d’État, d’autres pensent que ce n’est pas ça. Regardez ceux qui nous ont colonisés. Leurs débats sont chauds, mais ils avancent. Comment ne pouvons-nous pas comprendre cela ? Moi, je suis à un autre niveau de raisonnement par rapport à eux. Je leur fait confiance parce que Dieu les a mis dans ma vie. Mon souhait, c’est qu’ils soient ceux qui vont réaliser les rêves de nos devanciers comme le Président Félix Houphouët-Boigny. Une Côte d’Ivoire de paix. Vous les leaders, vous avez étudié dans la paix. Votre mission est de tout faire pour maintenir ce climat de paix afin que vos enfants et vos descendants ainsi que ceux dont Dieu vous a confié le destin puissent en profiter. Il faut en tenir compte. Vous ne pouvez pas vous permettre d’avoir des colères bidon. Ce que vous dites est trop important. Nos vies en dépendent. Nous Ivoiriens, nous nous sentons bien, on fait le malin, on se la joue, parce qu’on compte sur vous.

Lorsque les journalistes étrangers me posent des questions sur la situation en Côte d’Ivoire, eux tous attendent qu’on parle de bain de sang comme il leur est donné de voir chez les nègres, les Africains, je leur dis non et non. Je n’ai pas le même discours. Quand je parle de Gbagbo, Je parle en bien. Quand je parle de Ouattara, je parle en champion. Même si parfois je mens pour dire que Ouattara, Gbagbo et Thiam, c’est une équipe qui fait la discussion politique. Parce que c’est ce que je veux pour la Côte d’Ivoire.

Lorsque vous observez l’atmosphère en Somalie, c’est une compétition où tu n’as pas le droit de glisser et tomber. C’est dans une telle situation que nous sommes. J’ai l’impression que les « ultra-crépidarialistes » sont un peu dangereux. Car ce sont eux qui poussent les uns et les autres sur les réseaux sociaux à l’adversité.

Votre dernier album est sorti. Comment se comporte-t-il sur le plan médiatique et sur le plan commercial ?

Il se comporte très bien. Depuis longtemps, je suis mon propre producteur. Je suis maintenant mon propre éditeur. J’ai une maison de disque qui est mon distributeur. Tout se passe bien. Mon épouse est très active. Son équipe et elle travaillent sur les réseaux sociaux.

La collaboration est très bonne avec votre conjointe ?

Oui. C’est une grande bosseuse. C’est une femme qui travaille même jusqu’à 4h du matin.

Alpha Blondy a sorti Jah Glory en 1982. Depuis lors, il est suivi par Fraternité Matin et Ivoire Dimanche. Ce média de service public a 60 ans aujourd’hui. Quel est le regard de Alpha Blondy sur ce Journal qui l’a accompagné ?

Ce journal a un titre prémonitoire qui est en même temps une grande leçon que les politiciens ivoiriens doivent tous essayer de mettre en pratique. Fraternité Matin, la fraternité entre les Ivoiriens, le Matin de la fraternité. Depuis 60 ans, nous sommes dans ce matin de la fraternité, pour la Côte d’Ivoire. Il faut que cette fraternité soit maintenue, à tous les prix. C’est même divin que Dieu vous ait donné ce titre. C’est cette fraternité qui va nous mener où nous allons. C’est la borne kilométrique de nos vies. Combien de politiciens n’ont pas fait de promotion à partir de Fraternité Matin ? Je ne parle pas des artistes. Celui qui est en face de vous. C’est quand Fraternité Matin parle de toi que tu deviens quelqu’un dans ton domaine d’activité. Quelque part, Fraternité Matin est une matrice pour la pensée positive ivoirienne. C’est ce ciment invisible qui nous lie depuis. La preuve, la page nécrologique de la Côte d’Ivoire, c’est dans Fraternité Matin. Nous pleurons nos morts. Nous avons nos joies et nos peines dans ce journal. Ce journal est un testament pour la Côte d’Ivoire.

Alpha Blondy, ce sont près de 50 ans de service aujourd’hui, comment se projette-t-il ?

Celui qui m’a assigné cette mission est Celui-là-même qui s’occupera de la suite de la carrière et du souffle de vie d’Alpha Blondy.

Et il voudrait qu’on retienne quoi de lui, Alpha Blondy, en lui souhaitant de bonnes et longues années ?

Je m’applique à réussir la mission que mon Créateur m’a confiée. J’y mets tout mon cœur et toute mon énergie et j’aimerais que mon Créateur Seul, avec ceux pour qui je travaillais, le public, les générations pour lesquelles j’ai travaillé, qu’ils disent, « le kôrô a fait ce qu’il a pu ».

D’où tire-t-il cette spiritualité, cette grande spiritualité et même cette philosophie dans le parler ?

Nous sommes tous des êtres spirituels. Ma grand-mère m’a dit ceci...

Nagnélé ?

Oui, Nagnélé. Elle dit si tu cherches Dieu et que tu dépasses l’être humain, tu ne le verras plus.

L’homme est Dieu alors ?

Oui. Dieu commence par celui qui est en face de toi. On dit que Dieu n’est pas visible. Le gars-là est venu et il dit qu’il est journaliste. Toi, tu dis quoi ? L’autre dit que, lui, il est cuisinier. Au bord de la route, il y a des mendiants. Le mendiant dit quoi ? Donnez à Dieu. Quand tu vas à la mosquée, il y a l’imam qui parle. Tous ceux qui sont là, qui sont-ils ? C’est une sorte de panthéisme. Il n’y a de Dieu que Dieu. Car tout est Dieu. Et Dieu créa Dieu à l’image de Dieu et par humilité, il l’appela homme. Voilà ma lecture.

Envoyé spécial à Osaka, Japon


Le 07/07/25 à 11:46
modifié 09/07/25 à 13:46