Meta : Refonte de l’algorithme pour imposer les contenus sans liens et les Reels

Meta : Refonte de l’algorithme pour imposer les contenus sans liens et les Reels

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Le 18/06/25 à 16:13
modifié 18/06/25 à 16:24
Le groupe Meta, maison mère de Facebook, Instagram et Threads, traverse une zone de turbulence. Alors que plusieurs organisations de défense des droits numériques tirent la sonnette d’alarme sur la montée des contenus nocifs sur ses plateformes aux États-Unis, de nouvelles informations confirment que l’algorithme du réseau social Facebook pénalise désormais clairement les publications contenant des liens externes, tout en favorisant massivement les vidéos au format Reels.

Selon une enquête menée auprès de 7 000 utilisateurs actifs de Facebook, Instagram et Threads, et publiée par des ONG telles qu’UltraViolet, GLAAD et All Out, l’abandon du fact-checking aux États-Unis par Meta a entraîné une recrudescence inquiétante des contenus nuisibles sur ses plateformes. Depuis janvier 2024, Meta a cessé toute collaboration avec les agences de vérification de faits comme l’AFP dans ce pays, réduisant également les efforts de modération pour « éviter de censurer à tort ».

Les conséquences semblent directes, 77 % des sondés affirment se sentir moins en sécurité lorsqu’ils s’expriment librement en ligne et 92 % estiment que Meta les protège désormais moins efficacement face à ces dérives. Ces chiffres révèlent une inquiétude croissante autour de la responsabilité de Meta dans la protection de ses utilisateurs, alors que l’entreprise semble opérer un virage stratégique vers l’expansion de ses outils vidéos.

Dans le même temps, plusieurs administrateurs de pages Facebook ont récemment reçu une alerte les informant que l’ajout de liens dans les publications réduisait leur portée (« reach »). Meta leur recommande désormais de placer ces liens dans le premier commentaire, une stratégie longtemps considérée comme une rumeur dans le milieu du community management.

Les chiffres fournis par Meta pour le premier trimestre 2025 vont dans ce sens. 97,3 % des publications les plus vues aux États-Unis ne contenaient aucun lien dans leur texte. Seules 2,7 % intégraient un lien externe. Cette stratégie confirme la volonté du groupe de retenir les utilisateurs dans son écosystème au lieu de les rediriger vers des sites extérieurs.

La vidéo courte au cœur de la stratégie

Par ailleurs, Meta impose une refonte en profondeur de l’expérience vidéo sur Facebook. La plateforme a annoncé que toutes les vidéos seront désormais publiées sous format vertical Reels, abandonnant complètement le format horizontal. Les Reels – vidéos courtes, inspirées de TikTok – vont également remplacer l’onglet “Vidéos” dans l’interface utilisateur, qui deviendra simplement “Reels”. Une façon de séduire un public plus jeune, notamment la génération Z, en perte de vitesse sur Facebook ces dernières années.

Dans les mois à venir, l’application Facebook intégrera des outils plus puissants d’édition vidéo, permettant aux utilisateurs d’ajouter musique, effets visuels, filtres, ou encore réduction de bruit, directement depuis leur smartphone. Ce double mouvement relâchement de la modération d’une part, recentrage sur les contenus engageants mais formatés de l’autre interroge.

Pour les associations à l’origine de l’enquête, les nouvelles orientations de Meta créent un environnement plus propice à la désinformation, à la haine en ligne et à l’autocensure. À vouloir séduire les jeunes et booster ses performances vidéo, Meta prend le risque de fragiliser les fondations mêmes de la liberté d’expression sur ses plateformes.

Didier ASSOUMOU


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Le 18/06/25 à 16:13
modifié 18/06/25 à 16:24