L'éditorial d'Adama Koné : Thiam, les chemins de sa vie politique

Tidjane Thiam du Pdci-Rda. (Ph: Dr)
Tidjane Thiam du Pdci-Rda. (Ph: Dr)
Tidjane Thiam du Pdci-Rda. (Ph: Dr)

L'éditorial d'Adama Koné : Thiam, les chemins de sa vie politique

Le 13/05/25 à 10:22
modifié 13/05/25 à 10:48
Alors qu'il était en pleine célébration de la date anniversaire du décès de Bob Marley, le 11 mai dernier, la nouvelle de l'abandon "en plein vol" de Tidjane Thiam de la présidence du Parti démocratique de Côte d'Ivoire (Pdci-Rda) a refroidi la ferveur de ce militant de la plus vieille organisation politique du pays. Hier, la décision issue de la réunion du bureau politique d'urgence du Pdci lui a redonné un relatif espoir. Le président Thiam fait vivre à ses partisans toutes les sensations d'un scénario mal structuré.

Le proverbe malinké dit que la vie est une course de fond et non de vitesse. Si tu parcours le monde au galop, en sautant des étapes, tu reviendras franchir ces étapes en marchant.

Le Parti démocratique de Côte d’Ivoire-Rassemblement démocratique africain (Pdci-Rda) est en train de faire l’expérience de cet adage. Souvenez-vous de la réflexion sur la règle des arrondis, il y a quelques semaines. Bref rappel.

Quand vous entamez une série d’opérations avec une variable de base, il est bon de ne penser à arrondir le résultat final qu’à la dernière opération. Si vous ne le faites pas et qu’à chaque étape, vous arrondissez, vous introduisez un biais. Cette erreur va s’agrandir au fur et à mesure des calculs. Et à la fin, vous vous retrouverez avec un résultat bien loin de la réalité.

Vous aurez accumulé beaucoup de petites erreurs qui atteindront une proportion « industrielle ». Donc difficile à rattraper. C’est exactement ce qu’a fait le Pdci en fermant les yeux, dès le départ, en 2023, sur les conditions d’éligibilité du président Tidjane Thiam. Aussi bien sur sa présence et ses cotisations (qu’il a rachetées) au moins pendant dix ans au bureau politique que sur son statut identitaire au moment de l’élection.

En se déliant officiellement de la préférence nationale française, il s’exposait à la rigueur de l’article 48 de la loi fondamentale. Le résultat est connu. Il a été admis sa radiation de la liste électorale, selon la Constitution.

Mais les conséquences des arrangements effectués in vitro ne sont pas terminées. Une militante du parti, Valérie Yapo, est en procès contre son président. A quatre jours (dimanche 11 mai dernier) du verdict sur ce procès lié à sa légalité à la tête du Pdci, Tidjane Thiam décide de jeter l’éponge. Il remet le parti entre les mains du doyen d’âge, selon les textes du Pdci. Et lui, devient un président délégué.

Poste d’ailleurs à interrogations, dès lors qu’il n’est pas statutaire, donc non conforme aux textes du parti. Passons. Sans doute, pour anticiper sur la décision de la justice, la date choisie par Thiam pour faire cette annonce n’est certainement pas fortuite. C’est un marketing politique, au moment où des Chefs d’État et de gouvernement sont réunis à Abidjan dans le cadre du Ceo Forum.

Seulement que l’autre face de son annonce porte les germes d’un aveu qui lui est défavorable. Premièrement, il met la justice à l’aise, pour qui l’affaire pendante devient sans objet. Deuxièmement, son retrait nocturne (c’est à 1h du matin que la nouvelle a été divulguée) de la présidence du Pdci montre que les arguments ou preuves nouvelles que ses avocats disaient apporter au dossier, et qui sont à la base du dernier report de la date du verdict, ne sont pas de poids.

Autrement, le concerné a compris qu’il a commis trop d’erreurs qui l’ont enfoncé. A-t-il définitivement jeté l’éponge ? Non. En tout cas, si l’on s’en tient à sa déclaration d’après radiation. Il disait qu’il n’y a aucun plan en dehors de sa personne. Le dimanche 11 mai également, il répétait qu’il reste attaché à sa volonté de devenir président de la République le 25 octobre prochain.

L’organisation avec précipitation d’un congrès électif demain, 14 mai, laisse penser qu’il reviendra en force, cette fois, avec l’exclusivité de son retour à la Côte d’Ivoire.

D’ailleurs, c’est aux doyens, ceux qui ont créé le « désordre » qu’il a confié la mission de mettre de l’ordre dans la maison. Tidjane Thiam revient du coup à la case départ. Lui qui avait sauté les étapes. La politique est une affaire de requins.

Les dauphins n’y ont pas leur place. Comme dit dans la réflexion d’hier, le Président Gbagbo, dans une vidéo virale, déclarait que: « On ne devient pas président comme çaaa ». Parole accompagnée d’une gestuelle qui rappelle qu’il faut suer abondamment.

Mais, pour Thiam, être président élu du Pdci est un fait, mais devenir Président de la République est une autre réalité. Il a encore devant lui, l’obstacle de son inscription sur la liste électorale à surmonter. Nous le disions.

La détermination affichée pour la révision de cette liste était bien un projet personnel. Car il savait que c’était la voie pour lui de régulariser sa situation et non de militer en faveur de potentiels électeurs qui n’avaient pas manifesté d’intérêt lors des dernières inscriptions.

Autre chose. Depuis près de deux mois, Tidjane Thiam est loin des siens. Au moment où il devait être en première ligne pour diriger son organisation, retrousser les manches et montrer son engagement. Toutes les grandes dates du Pdci se sont déroulées à son absence, comme pendant les 23 ans.

Le 18e bureau politique du 5 avril, le retrait du Pdci de la Cei, le 11 avril, la convention éclatée du 16 avril, sa radiation, le 22 avril, etc. Il est toujours en mission...pour les causes du parti. Le Pdci-Rda est à la croisée des chemins.


Le 13/05/25 à 10:22
modifié 13/05/25 à 10:48