L'Editorial d'Adama Koné : Bédié, les vivants... et la mort

Le cercueil de l'ex-président de la République
Le cercueil de l'ex-président de la République
Le cercueil de l'ex-président de la République

L'Editorial d'Adama Koné : Bédié, les vivants... et la mort

Le 03/06/24 à 23:30
modifié 04/06/24 à 00:12
Henri Konan Bédié a fini, mais Henri Konan Bédié n'est pas fini. L'ex-président de la République, inhumé le samedi 1er juin 2024, dans son village, n'est pas fini, car son action, son parcours, sa vie seront toujours enseignés et alimenteront les échanges. Le Sphinx de Daoukro a fini, car son passage sur la terre des hommes est terminé. Ses activités sont achevées. Il ne peut plus rien ajouter à son œuvre. Toutefois, son décès nous laisse des enseignements.

Toutes les informations sont connues à son sujet. Toutes les cases concernant l’ancien Chef d’État, Aimé Henri Konan Bédié, sont désormais cochées. Né le samedi 5 mai 1934 à Daoukro. Décédé le mardi 1er août 2023 à Abidjan. Inhumé le samedi 1er juin 2024 à Pepressou. De 1934 à 2023, on pourra alimenter le temps ainsi : élève à Dabou, étudiant à Poitiers, en France, ambassadeur aux États-Unis, ministre de l’Économie, président de l’Assemblée nationale, Président de la République, président du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (Pdci-Rda). Son curriculum vitae s’est arrêté ce fatidique mardi 1er août 2023. Plus rien ne peut y être ajouté. Tel est le destin de l’Homme. Telle est la volonté du Tout-Puissant. Et pendant dix mois, du 1er août 2023 au 1er juin 2024, la Côte d’Ivoire n’a cessé d’honorer sa mémoire. D’abord, dix jours de deuil national, au mois d’août 2023, avec l’annulation de la célébration de la fête de l’indépendance, le report de la Journée nationale de l’excellence et celui de l’inauguration du 5e pont d’Abidjan.Après la présentation des condoléances à la famille, du 19 au 21 mai 2024, la levée du corps, le 23 mai, la nation ivoirienne, avec à sa tête le Président de la République, Alassane Ouattara, lui a rendu hommage, au Palais présidentiel au Plateau, le vendredi 24 mai. Tous les témoignages relèvent la bonté, le dynamisme, le charisme, le leadership, la gentillesse que l’homme a incarnés. En ces moments, la seule action des vivants est le recueillement.

En effet, le défunt n’a plus besoin de médicaments. Il n’a plus besoin de conseils. Il n’a plus besoin d’assistance, de soutiens physiques ou de biens matériels et financiers. Seules les prières l’accompagnent pour l’aider au moment où il frappe à la porte du Père céleste. Des prières qui viennent en soutien à ses bonnes œuvres sur la terre pour que son âme repose en paix et pour que le Seigneur l’accueille dans son royaume.

La mort d’Aimé Henri Konan Bédié interpelle tous les Ivoiriens, tous les vivants. La mort, cette réalité pour laquelle aucune personne ne peut avoir une expérience. Vous avez beau perdre 1000 parents et connaissances, au 1001e décès, la douleur est toujours vivace. La même, ou même plus intense. C’est la loi de la nature. Une nature qui ramène au réalisme de l’humanité : le sang coule dans chaque corps, la physiologie est la même pour chacun, la naissance, l’enfance, l’adolescence, la jeunesse, la maturité, la vieillesse et la mort sont les étapes de la vie, communes à chaque être humain. Des réalités qui doivent conduire les vivants à l’humilité, la modestie et à la bonne foi. L’observation de la société est édifiante.

Généralement, lorsque la situation sociale et professionnelle s’améliore, on veut habiter les quartiers chics de nos capitales.

Considérons la ville d’Abidjan. Le citoyen va chercher à déposer ses valises à Beverly, à Angré, dans les nombreuses Riviera, à Marcory résidentiel, à Biétry, pour ne citer que ces zones. Attitude tout à fait normale. Manifester et illustrer la grâce divine d’être à l’abri du besoin et améliorer sa situation est même une reconnaissance du bienfait de Dieu. On ne peut donc pas reprocher au citoyen de jouir de cette bénédiction. Le problème est donc ailleurs. C’est que beaucoup de ces habitants, de leur vivant, ne veulent même pas entendre parler de certains quartiers. Il a été observé cet homme cossu, refusant de se rendre à Adjamé où son mécanicien avait aménagé, après avoir perdu son garage de Marcory. Certains ne se rendent à Abobo ou Yopougon que lors d’escorte pour une cérémonie ou de passage aux différents corridors au cours de voyage.

Ces quartiers évités de leur vivant sont pourtant ceux qui les accueillent pour le repos éternel. C’est à Williamsville, dans la commune d’Adjamé, à Yopougon, à Abobo et dans les villages en effet que ces morts sont enterrés. Si ce sont dans des mausolées, il n’en demeure pas moins que la profondeur de la tombe est la même, qu’on soit pauvre ou riche. Il n’en demeure pas moins que c’est dans la même terre que la tombe est creusée. Il n’en demeure pas moins que la prière du plus nanti a la même valeur que celle du plus démuni. La vie est une interpellation. Autant le riche doit être humble et juste, autant le modeste doit se départir des vilains sentiments comme la jalousie, l’ingratitude et la paresse.

Au début de cette réflexion, il a été énuméré les valeurs reconnues au Président Bédié. Que ces valeurs habitent chacun des vivants. Que Dieu ait l’âme de cet homme au parcours inspirant. Que tous les morts reposent en paix. Et qu’ils intercèdent auprès de Dieu pour une vie paisible et gaie en Côte d’Ivoire. Amen !



Le 03/06/24 à 23:30
modifié 04/06/24 à 00:12