L'éditorial d'Adama Koné : Maturité politique

L'éditorial d'Adama Koné : Maturité politique

Le 04/09/23 à 10:37
modifié 04/09/23 à 10:37
Dimanche 3 septembre 2023. Lendemain des votes régional et municipal en Côte d’Ivoire. Dans la capitale économique, Abidjan, les rues sont calmes.

Dans la commune de Cocody, aux Deux-Plateaux précisément, sur un espace dégagé près d’un supermarché, des citoyens s’adonnent à leur sport favori : la pétanque. Il y a même du monde. Le parking du supermarché affiche complet.

A l’intérieur, les rayons de produits alimentaires et de fournitures scolaires sont pris d’assaut.

C’est non seulement un début de mois, il faut faire des provisions mais aussi, nous sommes à une semaine de la date de la rentrée scolaire prévue le 11 septembre.

A 13 kilomètres de là, dans la commune de Marcory, dans un maquis réputé pour son attiéké au poisson, les serveurs ne chôment pas. C’est l’affluence. Nos envoyés spéciaux à l’intérieur du pays décrivent une ambiance similaire, du nord au sud, de l’est à l’ouest en passant par le centre. C’est qu’en général, les scrutins de ce samedi 2 septembre se sont bien déroulés.

Des incidents inhérents à toute consultation de ce genre ont été enregistrés. La présidente du Conseil national des droits de l’Homme (Cndh), Namizata Sangaré, l’a signifié hier sur le plateau de 13 heures de la Radiodiffusion télévision ivoirienne (Rti).

Ce sont essentiellement des retards dans l’ouverture de bureaux de vote, des tablettes défectueuses et souvent des éclats de voix et même des altercations entre représentants de candidats ou électeurs.

Des incidents rattrapés. Dans tous les cas, les candidats auront la possibilité des faire des réclamations, au besoin.

Dans la sérénité, donc, les Ivoiriens ont attendu les résultats dont la proclamation a commencé dans la mi-journée, hier. Depuis quelques années, le gouvernement et la Commission électorale indépendante (Cei) ont fait un choix intelligent. Celui de fixer les votes au samedi. Ce qui se faisait les dimanches.

Aujourd’hui, voter samedi a l’avantage de disposer d’un jour, le dimanche, pour se remettre des émotions de la veille et de reprendre tranquillement le travail, le lundi. Ce qui permet aussi aux chrétiens de ne pas être coincés dans leur emploi du temps du dimanche par rapport au culte.

En plus, le dimanche, le lendemain du vote, chacun peut suivre, à la maison, les premiers résultats proclamés par la Cei. On peut le dire, ces élections ont été des plus inclusives. Tout comme celles des législatives dernières de 2021.

Le Chef de l’État, Alassane Ouattara, en bon citoyen, est rentré d’un séjour français, le jeudi 31 août, pour accomplir son devoir civique, deux jours après. Si l’ex-président Laurent Gbagbo était absent du territoire lors des législatives de 2021, les élections présentes se sont tenues en sa présence.

Annonçant que sa formation était déterminée à prendre part à toutes les élections en Côte d’Ivoire. Le Seigneur en avait décidé le 1er août.

En rappelant à Lui l’ancien président, Henri Konan Bédié. Mais, il avait déjà donné sa bénédiction à ses candidats avant son décès. Des résultats proclamés en début d’après-midi de ce dimanche (69 communes à 16h15), ces élections donnent quelques enseignements.

Un, la tendance est favorable au Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (Rhdp). Deux, les indépendants font une percée. Trois, le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (Pdci-Rda) résiste, avec des communes significatives. Quatre, le Parti des peuples africains (Ppa-Ci) tient majoritairement sa présence sur la liste provisoire de vainqueurs par son alliance avec le Pdci-Rda. Cinq, le grand absent à cette heure reste le Front populaire ivoirien. Même s’il a soutenu son partenaire électoral, le Rhdp.

La commune la plus attendue était Yopougon. L’enjeu était de taille. Dans une chanson, A’Salfo disait que lorsque l’Asec affronte l’Africa, les supporters de chaque camp voient derrière Bédié et Gbagbo. Et bien, à Yopougon, se jouait un match Ouattara-Gbagbo-Bédié (Rhdp, Ppaci, Pdci-Rda).

C’est que le fils Gbagbo était un symbole de la représentation du père. Dès lors que cette commune est réputée bastion de l’opposition, surtout du Ppa-Ci.

En vérité, ces élections sont l’occasion pour les formations politiques de tirer quelques leçons. La présence remarquée des indépendants a certainement réduit les chances des candidats officiels des partis dont ils sont issus.

Pour eux, le retour à la maison risque d’être difficile. Dans les circonscriptions où ces indépendants ont été déclarés vainqueurs, ces derniers pourraient bénéficier de circonstances atténuantes, surtout quand viendra le moment du décompte final.

Dans les deux cas, les partis peuvent désormais mesurer ce que vaut chaque cadre, qu’il soit candidat officiel ou indépendant. Ainsi, les méthodes de désignation sont mises à l’épreuve du terrain.

L’autre leçon serait les zones acquises ou conquises. Là aussi, il sera question, au vu des résultats, d’apprécier son enracinement ou le travail à abattre pour faire basculer les résultats en sa faveur, prochainement.

Au-delà de ces législatives et municipales, se dessine la configuration du futur Sénat. En effet, dans deux semaines auront lieu les consultations pour l’occupation des fauteuils de la chambre haute du Parlement ivoirien.

L’électorat étant composé des conseillers municipaux et régionaux, élus hier, l’on peut imaginer la coloration, en tout cas, des deux tiers des sénateurs. Le tiers étant nommé par le Chef de l’État.

La Côte d’Ivoire, par ces votes, consolide sa démocratie. Il est plus que jamais nécessaire pour les partis politiques de s’engager dans l’éducation politico-citoyenne de leurs militants. La maturité politique de la population est à ce prix .


Le 04/09/23 à 10:37
modifié 04/09/23 à 10:37