Gal Ouassenan: ce qu'il disait de Bédié, Gbagbo et Ado...

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Gal Ouassenan: ce qu'il disait de Bédié, Gbagbo et Ado...

Le 11/08/23 à 14:24
modifié 11/08/23 à 14:38
Est-ce qu’on peut affirmer que l'alliance PPA-CI et PDCI, c’est pour combattre le RHDP ?
Le terme combat n’est pas le terme exact, il s'agit plutôt de s’opposer. Quand vous n’êtes pas au pouvoir, vous êtes systématiquement dans l’opposition et vous vous opposez parce que l’objectif d’un parti politique, c’est d’arriver au pouvoir.
Certains partis politiques se contentent d'une alliance qui leur permet d'avoir des postes et d'autres avantages. Cela est satisfaisants pour eux.
D’autres veulent exercer le pouvoir et se donnent les moyens pour atteindre cet objectif.
Au lieu que ce soit tel ou tel parti qui leur accorde quelque chose, quelques postes, ils veulent que ce soit plutôt leur parti qui soit au pouvoir. C’est le cas de notre parti, le PDCI aujourd’hui.
Quand vous écoutez les discours de tous les responsables du PDCI, ils disent tous : « il faut qu’à telle ou telle élection, nous prenions le pouvoir ».
Et ceux qui exercent déjà le pouvoir d’État rétorquent : « nous allons garder le pouvoir ».


PDCI-PPA-CI, dites-vous, n’est donc ni un mariage forcé ni un mariage contraint, mais un mariage de circonstance. A l’épreuve du terrain, on voit que les choses n’avancent pas d’une manière aussi facile. Dans une soixantaine de circonscriptions, au niveau communal, vous n’avez pas pu avoir des listes communes pour les élections du 2 septembre prochain. Est-ce que votre alliance ne commence pas difficilement ?
Est-ce qu’il y a quelque de facile en politique ? Tout est difficile en politique malheureusement. Vous avez affaire à des êtres humains et les êtres humains, vous ne pouvez pas changer leur caractère du jour au lendemain. Dans le même parti souvent, vous avez des oppositions. Cela arrive n'est-ce pas ?
Le candidat du parti est parfois contesté par certains qui disent : « je pars en indépendant » ? Être indépendant, c’est une autre forme d’opposition puisque vous vous opposez au candidat que votre parti a choisi.


Gbagbo-Bédié ça ne sonne donc pas faux ?

Rien ne sonne faux, dès qu’on se met ensemble. Ça sonne faux, lorsque vous vous quittez (rire).

Les trois grands leaders se sont rencontrés en 2021. Est-ce qu'on peut dire que le fait les 3 grands leaders de la Côte d’Ivoire se parlent et dialoguent est un avantage pour le pays dans une sous-région qui semble habitée par des démons de la division et par de continuelles querelles de chapelle ?
Oui. De toute façon, à partir du moment où des hommes politiques se rencontrent, engagent un dialogue, je peux dire qu’ils se mettent dans la ligne politique que nous a enseignée le père de la nation, feu Félix Houphouët-Boigny.
Il a toujours dit que la Côte d’Ivoire est le pays du dialogue. Il nous a toujours dit : « il faut que vous échangiez puisque vous tous, vous défendez les intérêts des mêmes populations ».
Si donc les trois s’entendent, se mettent ensemble, échangent, de ces échanges sortira quelque chose de positif, de constructif, pour la côte d’Ivoire. Donc je trouve que c’est une bonne chose que, de temps en temps, nos leaders puissent se rencontrer pour pouvoir échanger et voir dans quel sens ils voient l’intérêt du pays.


Vous définissez le dialogue comme une philosophie houphouëtiste. Est-ce qu’on peut penser que Gbagbo est devenu houphouëtiste ?
Lui-même n'a-t-il pas dit que le président Houphouët lui a dit qu'ils se ressemblent (rire) ? Vous savez, le président Gbagbo, pendant la gestion du président Houphouët, n’a pas voulu rentrer au gouvernement. Je pense que cela a été une erreur parce que tout s’apprend dans la vie. Le président Houphouët-Boigny lui a fait trois fois, des propositions d’entrée au gouvernement mais il a refusé en se disant qu'il veut le corrompre.
S’il avait accepté d’entrer dans le gouvernement d’Houphouët-Boigny, il aurait beaucoup appris.


C’était en quelle année ?

C’était à partir des années 90.
Gbagbo redoutait peut-être d'être phagocyté.
C’est ce qu’il croyait mais s’il y était entré, cela lui aurait permis d’apprendre certaines choses. Que vous le veuillez ou non, quand vous entrez dans la salle du conseil des ministres, vous apprenez des choses auxquelles vous n’avez jamais pensé. S’il avait accepté, peut-être que tout ce qui lui ait arrivé, ne lui serait pas arrivé.

Quand vous dites que ce qui lui est arrivé ne lui serait pas arrivé, vous parler de son départ du pouvoir en 2010 ?

Oui, bien sûr ! Vous voyez dans quelles circonstances cela s’est passé. En politique, il y a toujours de choses que le commun des mortels ne peut pas connaître mais quand vous rentrer en politique, vous apprenez beaucoup de choses et cela lui aurait ouvert une espèce d’éventail assez large. Je pense que ce qui est arrivé, ne lui serait pas arrivé.

Pour vous, les choses se seraient passées avec moins de dégât sous son régime, s’il avait été ministre sous Houphouët-Boigny avant d’être président de la République ?

Oui, c’est ce que je pense personnellement. Je prends mon cas par exemple. J’étais un militaire, le président m’a appelé au gouvernement. Quand j’ai participé à des conseils de ministres, ma mentalité a totalement changé parce qu’il y a des choses en politique que vous ne pouvez pas apprendre ailleurs qu’en étant au sein d'un gouvernement.

Donc vous pensez sous son régime, Gbagbo a eu parfois des bras de fer inutiles ?

Oui, je crois.

Par exemple ?

Je ne vais pas rentrer dans tous les détails (rire) malheureusement, puisque nous sommes tenus par le secret des délibérations. Mais je pense que s’il avait été ministre du président Houphouët, il y a certaines situations qui ne se seraient pas produites dans notre pays.

Vous pouvez juste donner quelques exemples.

Non (rire). Je ne peux pas rentrer dans les détails.

Vous pensez que cela a peut-être aggravé les cas d’atrocité que nous avons connus sous le régime de Gbagbo ?
Oui bien sûr ! Vous savez, c’est rare de voir des personnes qui ont participé à un gouvernement qui soient des jusqu’au-boutistes. J’espère que vous voyez la nuance.
Vous-mêmes, vous ne trouvez pas qu'il y a quelque chose d'anomal lorsqu'une personnalité occupe le poste de président directement dans un gouvernement alors que c'est la première qu'il a accès une salle de conseil des ministres. Alors qu'il n'a jamais été ministre au préalable, il n'a pas fait ses armes auparavant. Aujourd’hui, le fait qu’il ait été président, lui a donné de l’expérience.
Vous pensez qu’être ministre est une sorte de stage qui vous prépare à cette fonction ?
Effectivement ! Quand nous accédions à l’indépendance, la Côte d’ivoire n’était pas le premier pays de la sous-région en termes de développement, de moyens et de potentialités. Vous aviez un pays comme la Guinée qui avait plus de potentialités que nous. Le Sénégal avait des avantages comparatifs.
La Côte d’ivoire a eu la chance que le président Houphouët Boigny avait été ministre plein dans le gouvernement français. Senghor n’avait été que secrétaire d’État. En France ou ailleurs, le secrétaire d’État n’assiste pas au conseil de ministre, puisqu’il est secrétaire d’État auprès d’un ministre. C’est son ministre qui y assiste. C’est ici, en Côte d’Ivoire, que le président Houphouët a estimé que le gouvernement étant un lieu d'apprentissage, il autorisait les secrétaires d’État à assister au conseil des ministres. Devenir ministre nous a permis d’acquérir une certaine connaissance. Devenu indépendant, le pays lui-même, en peu de temps, est devenu la locomotive de la sous-région. Tout simplement à cause de l’expérience acquise par le président Houphouët Boigny dans le gouvernement français. Il a appris des choses que les autres Chefs d’État n’avaient pas apprises.


D’avoir été Premier ministre sous Houphouët-Boigny, cela a donc beaucoup été utile au Président Ouattara dans la conduite du pays ?

Le président Ouattara est un bel exemple de ce que je dis. Vous voyez comment il dirige le pays ? Tout ce qu’il fait montre qu’il a appris. Il a eu cette chance. Je dirai, c’est une chance pour nous, les Ivoiriens que soit quelqu’un qui ait été Premier ministre d’Houphouët qui soit à la tête du pays. Il sait par quel bout prendre telle chose ou telle situation. Quand vous n’avez jamais participé à la gestion d’un pays, c’est différent. Un pays se gère mais pour le gérer, il faut avoir un savoir-faire. Il y a une certaine pratique qu’il faut connaître et je pense que tout ça a un peu échoué par moment.

La jeunesse d’aujourd’hui doit donc commencer par apprendre si elle veut hériter du flambeau après les trois grands leaders ?

Absolument. Il faut que la jeunesse s’implique dans la gestion. A beaucoup d’endroits, on apprend. Mais il faut que dans tous ces secteurs où l'on apprend, la jeunesse soit impliquée. Quand je vois des jeunes ministres comme, à notre temps d’ailleurs, c’est un avantage. Quand vous rentrez jeune, ministre, vous apprenez beaucoup. Vous vous dites : « mon Dieu, donc j’étais en dehors totalement du coup ».

En ce moment même, Gabriel fatal, un jeune ministre de 34 ans est rentré dans le gouvernement français, dans un département aussi difficile que l’Éducation nationale.

Voilà, c’est cela.

On attend beaucoup dire Bédié, Ouattara, Gbagbo sont des vieux, qu’ils ont fait leur temps. Est-ce que ce genre de commentaires vous parle ?

Parmi les trois, deux ont été des collaborateurs directs du président Houphouët. Il leur a transmis beaucoup de son expérience. Le troisième a été président de la République. Donc, on peut dire qu’il a été obligé d’apprendre sur le tas. Il a aussi des connaissances, une expérience de la gestion. J’espère qu’à leur tour, ils ont transmis leur savoir-faire à leurs collaborateurs de sorte qu’après, il y ait la continuité. J’ajoute que ce n’est pas parce qu’on a été Président ou Premier ministre qu’on est un omniscient. Vous avez des jeunes qui rentrent en politique et qui, en peu de temps, réussissent. Il y a donc aussi une prédisposition à la fonction.
Vous êtes du PDCI, mais on vous voit jouer le rôle de leader de la région, vous être en de bons termes avec toutes les chapelles politiques. Comment vous y prenez ?


Il n’y a rien de spécifique dans nos rapports. D’abord, c’est notre éducation elle-même. Nous avons le respect des aînés. Tous ceux qui sont des aînés et anciens de la région ont un respect pour moi et moi aussi j’ai le droit de leur rendre. Quand il y a une situation donnée, moi je dis : « je suis à votre disposition, si vous pensez que je peux vous êtes d’une quelconque utilité, je suis prêt ». Certes, je suis PDCI mais c’est le parti où le président Houphouët lui-même m’a mis. Moi, j’étais un militaire et en tant que militaire, je me voyais en train de faire une carrière militaire et prendre tranquillement ma retraite puis voilà.

Est-ce que vous avez des regrets pour Katiola ? Avez-vous rêvé faire quelque chose et que vous n’avez pas pu faire ?

Non, je pense qu'aujourd’hui vous savez que les gens citent Katiola parmi les belles villes. Nous faisons la politique, mais ce qui va rester après nous, c’est ce que les populations retiendront.

Et je prends le cas de mon aîné, le général Ouattara Thomas d’Aquin quand il a pris sa retraite, c’est moi qui ait proposé, en raison de son expérience, qu’on lui demande d’être le maire de Katiola. Nous sommes allés lui demander et il ne voulait pas. Nous lui avons dit : « vous avez acquis une certaine expérience dans la gestion des hommes et ça peut nous aider ». Et quand il est devenu maire, il a fait avancer la ville. Moi, aujourd’hui, avec mon âge, je suis prêt à donner des conseils et j’ai une petite expérience que je peux mettre à disposition de toute personne qui disposer à travailler pour la région. Je prends par exemple le maire Thomas Camara, c’est mon fils. Lui et moi, nous nous entendons bien.


Le 11/08/23 à 14:24
modifié 11/08/23 à 14:38