Jacqueville : Le Patriarche du village d’Abraco intronisé

Sès Tchako Esaie inrtonisé patriarche d'Abraco (Photo Véronique Dadié)
Sès Tchako Esaie inrtonisé patriarche d'Abraco (Photo Véronique Dadié)
Sès Tchako Esaie inrtonisé patriarche d'Abraco (Photo Véronique Dadié)

Jacqueville : Le Patriarche du village d’Abraco intronisé

Le 20/03/23 à 11:46
modifié 20/03/23 à 11:46
Sès Tchako Esaïe, enseignant des mathématiques à la retraite depuis plusieurs décennies, est le patriarche d’Abraco, village du peuple Ahizi situé dans le département de Jacqueville, dans la sous-préfecture d’Atoutou, à plus de 50 Km d’Abidjan.

Il a été intronisé le 18 mars 2023, sur la place publique du village en présence des autorités politiques, administratives, populations villageoises, parents, amis, anciens élèves et admirateurs.

Celui qui détient désormais le pouvoir patriarcal se voit confier ainsi la mission de conciliateur, de rassembleur, de conseiller et de consultant. Une obligation dont il mesure la portée et pour laquelle, il dit accepter parce qu’il ne l’a pas demandé, mais s’impose à lui, car il est le dernier vivant de sa génération.

« Je suis aujourd’hui le patriarche du village d’Abraco et chef de terre de par la naissance. Je suis descendant des fondateurs du village. Etant le plus ancien, je deviens le conseiller, l’instructeur de tous ceux qui viennent me voir. Je deviens un formateur. Je travaille en collaboration avec la chefferie. Je reste juge, instructeur et conseiller », a déclaré celui dont l’âge approche les 90 ans.

Emmanuel Essis, député de Dabou, a invité les populations à respecter les autorités instaurées par Dieu. Car, selon lui, le pouvoir est divin. « Nous avons une démocratie parfaite. Mais nous ne respectons souvent pas les autorités que Dieu nous donne. Le respect du patriarche fait partie de notre coutume », a-t-il déclaré.

Le président du conseil régional de Dabou, Pr Sès Daniel, parrain de la cérémonie, a pour sa part relevé que c’est Dieu qui met en place une autorité et de cette autorité dépend la paix. C’est pourquoi, il a invité les populations à avoir du respect pour le patriarche Sès Tchako Esaïe.

« Si le patriarche et le chef du village ont la paix, vous avez la paix. Je prie Dieu qu’Il donne la sagesse de Salomon au patriarche afin de rassembler les uns et les autres », a souhaité le parrain.

Quant au chef d’Abraco, il s’est réjoui d’avoir un patriarche aussi intellectuel et sage qui pourrait l’aider dans la gestion des affaires du village.

Les festivités se sont déroulées du 17 au 18 mars. Le vendredi 17 mars, il y a eu un animation suivie d’une retraite au flambeau et d’une projection de photos et de diapos relatives au parcours du patriarche.

Faut-il le noter, au nombre des invités, l'on avait des membres de l’Association des anciens élèves du patriarche venus de Danané. Parmi ces anciens élèves, figurent un préfet à la retraite, des administrateurs dans l’administration ivoirienne, des enseignants. Ils sont venus les bras chargés de cadeaux. Aussi, il a été enregistré la présence de l’ancien maire de la ville de François en Martinique.

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Rituel, pouvoir et mission du patriarche

Avant d’être fait patriarche, le doyen Sès Tchako Esaïe devait être couvert de cendre et ensuite se faire apposer par une femme aussi âgée (patriarche des femmes), du kaolin sur le front. Mais, étant bien habillé pour se voir verser de la cendre dessus, c’est l’un de ses neveux qui l’a fait à sa place. Il s’est vu verser de la cendre sur tout le corps. Il était assis sur un tabouret devant le patriarche et tourné vers le village.

Après cette étape, le patriarche a reçu du kaolin sur le front. Signe de longévité, de pouvoir et de sagesse. Etant aussi chef de terre, les populations du village lui doivent respect et loyauté.

Le patriarche, dans le commandement du village, est un consultant pour le chef. Après des réunions, c’est lui qui valide ce qui ressort de ces réunions.

Le patriarche est important dans la gestion des affaires de la communauté. Il est avisé dans les décisions à prendre. Il aide à faire appliquer ces décisions et les lois du pays dans le village.

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Témoignages et reconnaissance

Joseph Loza, ancien mare de François
Joseph Loza, ancien mare de François



Joseph Loza, ancien maire de la ville du François en Martinique

"Cela fait 7 ans que je suis venu en Côte d’Ivoire où j’ai connu tonton Esaïe Sès, c’est un homme bien. Quand j’ai appris qu’il sera célébré comme le patriarche de son village, j’ai tenu à venir lui traduire mon admiration. Je l’estime beaucoup et j’ai la conviction que son règne va apporter un plus dans le développement du village. Je pense, le temps que va durer son pouvoir, ce sera un succès. Je suis content de remettre les pieds sur cette terre où des millions d’Africains sont partis pour gagner l’autre partie du monde. Et surtout bénéficier de la sagesse et des conseils avisés du patriarche."

Elégbé Celestin chef du village d'Abraco
Elégbé Celestin chef du village d'Abraco



Elegbé Celestin, chef du village d’Abraco

"Je me réjouis d’avoir un intellectuel de cette envergure auprès de moi pour m’aider à faire appliquer les décisions et les lois du pays dans le village. Le respect du chef est sacré. Le patriarche que Dieu nous a donné est un homme de grande expérience de la vie, une personnalité respectée par tous et des personnes venues d’ailleurs. Nous avons un trésor dans notre village qui nous apportera beaucoup dans la gestion du village et pour la bonne entente des populations dans notre contrée."

Prof Sès Daniel, président du conseil régional de Dabou
Prof Sès Daniel, président du conseil régional de Dabou



Pr Sès Daniel, président du conseil régional de Dabou et parrain de la cérémonie

"C’est avec joie que j’ai participé à cette cérémonie de consécration d’un patriarche qui a pouvoir de fédérer, rassembler, concilier les fils et filles lorsqu’il y a des difficultés. Quelqu’un pour orienter et aider à la prise de décisions pour le développement du village. Je suis content d’avoir une personnalité de cette trempe pour le village. C’est aussi bien que nous fassions perpétuer nos traditions, nos coutumes. Une manière d’inviter nos jeunes à épouser cet esprit. Cela va aider notre pays et nos régions à aller de l’avant et à faire mieux."

Dan epse Sès Josephine, épouse du patriarche (Photo Véronique Daddié)
Dan epse Sès Josephine, épouse du patriarche (Photo Véronique Daddié)



Dan épse Sès Joséphine, l’épouse du patriarche

"Nous sommes dans notre 55e année de vie. Durant toutes ces années, j’ai toujours apprécié son caractère. Il est doux. C’est cela qui nous permis de vivre dans l’harmonie jusqu’à présent. Il est tout le temps en train de donner des conseils. Et quand vous prenez en compte ses conseils, vous arrivez à bon port sans ambiguïté. Mon époux, mon cœur, mon existence, ma moitié, est d’une générosité caractérielle sans pareil. Il sait concilier, réconcilier. Il est rigoureux dans tout ce qu’il fait et c'est ce qu'il inculque à son entourage."

Meles Isidore, ancien élève du Patriarche
Meles Isidore, ancien élève du Patriarche



Meles Isidore Aimé, inspecteur général au ministère de l’Education nationale (ancien élève du patriarche)

"Je peux résumer la personnalité de M. Sès en humilité parce qu’il se rabaissait au niveau de ses élèves pour qu’il soit compris. Il est rigoureux, disponible, responsable. On comprenait mal ce caractère. Mais aujourd’hui, tout ce qu’il a pu semer en nous, nous sert en termes de rendement dans le travail. Car, il n’aimait pas tout ce qui était faux. Parce que, quand ce n’est pas juste, il corrigeait. Ça c’est l’éducateur. Et ce que j’ai eu comme premier contact avec lui en dehors des contacts de rentrée, c’est que j’avais mal porté ma cravate. Il est venu tranquillement, m’a fait une petite claque. J’ai failli réagir, il m’a dit, c’est pour que j’apprenne. Il a noué la cravate pour moi. Depuis lors, je suis celui qui nouent les cravates pour certains collègues et amis. Pour dire qu’il était prêt à donner ce qu’il savait. Et ce qu’il savait, c’était sa personne, son amour. En somme, son caractère de serviteur."

Des membres de l'association des anciens élèves du patriarche
Des membres de l'association des anciens élèves du patriarche



M. Gonto A, porte-parole de l’association des anciens élèves de Sès Tchako Esai à Danané

"Pour ce que l’enseignant, le premier chef d’établissement noir du Ceg de Danané en 1972 a fait pour nous, notre présence témoigne notre profonde gratitude et reconnaissance. Car, c’est grâce à la rigueur qu’il nous imposée et inculquée qui nous a permis d’être ce que nous sommes aujourd’hui. Tout notre succès partout où chacun de nous exerce ou vit, nous le devons à Sès Tchako Esaïe. Nous sommes toujours à son école. Car, c’est un homme bon dans la rigueur. C’est un éducateur sur tous les plans. Nous ne cessions jamais de lui rendre hommage et saluer ce qu’il nous a apporté."



Le 20/03/23 à 11:46
modifié 20/03/23 à 11:46