Reportage/Assinie-Sagbadou, Mabianeha, Assouindé : Quand l’érosion côtière traumatise les populations

L'érosion a eu raison des habitations. (Ph: Ahua Kouakou)
L'érosion a eu raison des habitations. (Ph: Ahua Kouakou)
L'érosion a eu raison des habitations. (Ph: Ahua Kouakou)

Reportage/Assinie-Sagbadou, Mabianeha, Assouindé : Quand l’érosion côtière traumatise les populations

Le 21/06/22 à 14:30
modifié 21/06/22 à 14:30
Le recul de la côte et l’abaissement des plages, l’érosion, est un phénomène lent et graduel. D’année en année, le phénomène gagne du terrain en Côte d’Ivoire. La commune d’Assinie notamment n’est pas épargnée. Plusieurs localités de cette cité balnéaire sont frappées par l’érosion côtière. D’Assouindé, à Sagbadou en passant par Mabianeha, les conséquences sont dramatiques.
Le temps est clément. Il y a non seulement le soleil, mais aussi du vent. Dans l’insouciance, les enfants jouent dans le sable fin. Quelques femmes vendent des galettes, devant leur cour. La lagune est calme. Des jeunes, de sexe masculin, pêchent aux abords. D’autres, dans des pirogues, avec leurs filets, sont en quête de poissons et de crevettes.

Il est 9h, ce vendredi 27 mai lorsque nous arrivons à Assinie-Sagbadou. Comme dans tout village, le visiteur doit rendre ses civilités à la chefferie. En compagnie de notre guide, Assouan, un jeune du village, nous nous retrouvons chez le chef central d’Assinie, Ahemou Attoumani. Après les bénédictions, nous sommes autorisés à exercer notre mission, en toute légalité.

Sans autre forme de procédure, nous nous dirigeons à Assinie-Sagbadou, un village de 18000 âmes, un quartier de la commune d’Assinie, situé au nord-est de Mafia et au nord-ouest d’Assinie-France, qui est la face visible de l’érosion côtière.

Informée de notre visite, la chefferie de ladite localité, est réunie en grand nombre. En l’absence du chef, ses collaborateurs les plus proches sont présents. Ces notables, la cinquantaine révolue, nous reçoivent dans la cour de la maison qui abrite la chefferie d’Assinie-Sagbadou. Ils semblent stressés, les traits du visage marqués par la tristesse, sont perceptibles. Le sujet de l’érosion côtière, au centre de la rencontre est alarmant.

Sans grand espoir, Kodjo Aka, substitut du chef, Niamkey N’Da, porte-parole de la notabilité, les notables, N’Diamoua N’Guessan, Kouamé Eloukou et Boa Bilé ainsi que Mihimou Aka, secrétaire, acceptent d’aborder tout de même les problèmes liés à l’érosion côtière, qui rythment leur quotidien, avant toute visite de terrain. Chacun, avec des mots choisis, met en évidence le drame que vivent les habitants de Sagbadou, depuis quelques années, déjà.

Cette bâtisse à Sagbadou est menacée. (Ph: Ahua Kouakou)
Cette bâtisse à Sagbadou est menacée. (Ph: Ahua Kouakou)



« La répétition est pédagogique. Nous sommes à longueur de journée interrogés par des journalistes et des Organisations non gouvernementales (ONG) sur l’érosion côtière qui est une réelle menace pour les populations de Sagbadou. Mais, après nous ne voyons aucune action concrète », lance d’entrée un notable, comme pour mettre en évidence l’état d’esprit des populations de cette localité. A savoir jouer sa partition, sans afficher un optimisme béat. Car tous reconnaissent la complexité des solutions au mal dont souffrent les ressortissants d’Assinie-Sagbadou.

La 15è Conférence des parties (COP 15) de la Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification et la restauration des forêts, tenue à Abidjan du 9 au 20 mai 2022, bien que n’ayant pas inscrit l’érosion côtière au menu des débats, redonne toutefois de l’espoir aux populations de Sagbadou touchées par ce phénomène. Et pour cause, le rendez-vous de la capitale économique ivoirienne a permis de donner davantage d’informations sur d’importants fonds verts disponibles. En outre, la COP 15 a mis en évidence l’affirmation de la volonté du secteur privé à lutter contre le changement climatique en général.

Ce 27 mai, une semaine après la COP 15, la chefferie trouve opportune de revenir, une énième fois, sur la situation des populations face à l’avancée de la mer et de la lagune. Kodjo Aka, substitut du chef, plante le décor. « Chaque jour est perçu comme une grâce pour nous les habitants d’Assinie-Sagbadou. Nous ne savons pas ce que sera notre sort le lendemain. Car, nous assistons impuissants à l’avancée de la lagune sous l’effet de la mer et par conséquent à la destruction de nos habitations et autres biens », relève-t-il, avec amertume.

Puis d’ajouter : « nous ne savons pas à quel saint nous vouer. Notre seul refuge, c’est Dieu ». Poursuivant, l’adjoint au chef indique que plusieurs familles sont actuellement sans toit du fait de l’érosion côtière. « Depuis quelques années, plusieurs parmi nous ont abandonné leurs domiciles et vivent dans la précarité dans d’autres lieux », clame Kodjo Aka.

A l’en croire, d’ici une dizaine d’années, le village risque de ne plus exister. « Il y a moins de dix ans seulement, certaines habitations étaient très loin de la mer. Actuellement, elles sont menacées par les eaux. C’est dire que chaque jour qui passe, la mer avance et donc notre crainte est grande », fait-il observer, tout en tirant la sonnette d’alarme.

Le porte-parole de la chefferie, quant à lui, insiste déjà sur la submersion de plusieurs tombes. Ce qui, dit-il, montre que les populations ont perdu tout repère. « Pour un Africain, le repos de l’âme de son parent est très important. Or, à ce jour, de multiples tombes sont englouties par la mer qui avance à pas de géant. Cela est un signe de notre désarroi », déplore Niamkey N’Da.

Face à ce drame, chacun recherche des solutions.

Les mesures de lutte contre l’érosion inefficaces

Située à environ 94 km d’Abidjan au sud-est de la Côte d’Ivoire, Assinie est connue pour ses berges ensoleillées entre la lagune et l’océan. Pourtant, à Assinie-Sagbadou, le constat est tout autre. Une visite à pirogue, le long de la rive de la lagune Aby, met à nu l’insalubrité des bords du village.

Les mesures de lutte inefficaces. (Ph: Ahua Kouakou)
Les mesures de lutte inefficaces. (Ph: Ahua Kouakou)



En effet, face à l’avancée de la mer, les populations qui assistent de façon résignée à l’engloutissement de leurs habitations, ont trouvé leurs propres solutions. Il s’agit pour les familles modestes de bonder les rivages de pneus usés, d’ordures ménagères et de tout autre article usagé qu’elles estiment pouvoir freiner l’avancée de la mer. Non seulement, cette solution ne donne aucun résultat. Pis, elle contribue à rendre les berges insalubres.

« Les gens sont désespérés. Pour certains, s’ils plantent des mangroves, cela peut retarder l’avancée des eaux. Pour d’autres, les pneus usés et autres articles en caoutchouc jetés aux bords peuvent les aider à résoudre leur problème. Dans un tel contexte, il est difficile de s’opposer surtout que nous n’avons aucune solution », souligne un notable. Résultat, les plages restent peu exploitables et se réduisent d’année en année comme une peau de chagrin. Cette situation contribue à diminuer l’afflux des touristes, dans ce village.

Pourtant, le tourisme reste l’une des principales activités dans la commune d’Assinie. « Si la situation reste en l’état, après la construction de l’autoroute Abidjan-Dabou, les touristes vont davantage se diriger vers Jacqueville, au détriment d’Assinie », déclare, avec déception, Kodjo Aka.

L’avancée des eaux ne détruit pas que les biens immobiliers. Elle impacte négativement la pêche, l’activité principale des populations.

La pêche bat de l’aile

En dehors du tourisme, la pêche est l’une des activités phares dans la commune d’Assinie. Mais, selon plusieurs jeunes, la pêche ne rapporte plus rien à Assinie-Sagbadou. « A cause de l’avancée de la mer, la lagune est ensablée. Il n’y a pas de profondeur. Du coup, les gros poissons restent à l’embouchure », explique un jeune pêcheur, Assindjo, la quarantaine révolue. Selon un autre, Yves, « même les crevettes sont devenues rares ».

A l’en croire, les jeunes sont songeurs quand ils parlent de leur avenir. « Tous les terrains sont construits. Certaines familles ont leur site submergé. La pêche n’est plus productive. Nous n’avons pas de revenus. C’est vraiment inquiétant », dépeint-il la situation, comme pour interpeller les dirigeants.

Les quelques rares opérateurs du secteur de l’hôtellerie qui restent aux encablures du village, semblent accepter leur sort.

La résignation des opérateurs économiques

Non loin de l’embouchure, entre la lagune et la mer, des hôteliers y sont installés. Ce 27 mai, les berges sont propres et bien décorées. Ce qui donne envie à tout touriste ou tout visiteur de le fréquenter. Mais, selon les populations, en mars et avril, le site est inexploitable. Car, fait observer Kodjo Aka, substitut du chef, durant ces mois, le site est submergé.

« Lorsque la marée est haute, les complexes sont inondés. Du coup, les propriétaires arrêtent leurs activités et quittent les lieux. Il faut attendre une période favorable pour qu’ils reviennent. Le hic, c’est qu’il faut à nouveau trouver des ressources financières pour remettre lesdits établissements hôteliers à niveau », explique Kodjo Aka. Un éternel recommencement qui montre la résignation de ces propriétaires.

Aussi faut-il souligner que pendant la période d’arrêt d’exploitation des hôtels, les jeunes qui y travaillent pour gagner leur pitance quotidienne, se retrouvent au chômage. L’absence de revenus et le stress de l’avancée des eaux rendent la vie des habitants infernale.

Une situation sociale précaire

Le porte-parole de la chefferie le dit tout net. Le stress est la chose la mieux partagée à Assinie-Sagbadou. « Nous avons des personnes qui ont perdu leur maison. Nous ne pouvons pas les aider. Nous aussi, nous ne savons pas quand les eaux vont nous chasser d’ici », se lamente Niamkey N’Da.

Poursuivant, il informe que durant les mois de mars, avril et août, la désolation est plus grande pour les populations tous les matins. « Chaque nuit, durant les mois de mars, d’avril et d’août, la marée est haute. Les bruits assourdissants des vagues sont effrayants.

En outre, les vagues reversées dans la lagune, contribuent à faire avancer les eaux de la lagune. Au petit matin, les habitants constatent les dégâts. C’est affolant », affirme le porte-parole de la chefferie. Du coup, plusieurs familles restent sans abri. « Du jour au lendemain, vous passez de propriétaire à sans-abri, errant dans d’autres localités ou squattant de petits espaces pour survivre », dresse-t-il le sombre tableau.

La situation d’Assouindé n’est pas non plus reluisante.

Assouindé, 15 personnes déplacées en 2020

Près de deux ans après, les populations d’Assouindé n’ont pas oublié les jours sombres d’un jour de ce mois d’août 2020. « La marée était très haute au cours du mois d’août en 2020. La mer a gonflé la lagune. Quinze personnes ont dû quitter leur habitation pour échapper à la mort. Leurs maisons ont été englouties par les eaux. La situation de ces victimes faisait de la peine. Elles ont perdu tous leurs biens », se rappelle Aka Edouard Jean Luc, porte-parole du chef du village d’Assouindé, Nanan Zonah Foulé.

Pour lui, certes en 2021, la situation ne s’est pas reproduite dans cette importante localité de la commune d’Assinie, située à 22 km d’Assinie. Car, explique-t-il, la mer était calme, l’an passé. Mais, indique-t-il, la menace est encore réelle. « Quand vous regardez le long des berges, vous constatez que plusieurs maisons sont encore sous la menace de l’érosion. Il faut éviter que le pire n’arrive avant d’agir. Assouindé a plus que jamais besoin d’actions », conclut-il.

A Sagbadou les tombes sont englouties par l'eau du fait de l'érosion. (Ph: Ahua Kouakou)
A Sagbadou les tombes sont englouties par l'eau du fait de l'érosion. (Ph: Ahua Kouakou)



Cette interpellation du porte-parole du chef n’est pas fortuite. Des hôtels et des habitations ont été détruits par les assauts des vagues, ces dernières années. Selon plusieurs riverains, la situation reste tout de même pesante pour ceux qui habitent non loin des plages. « Le problème, c’est qu’une catastrophe peut arriver à tout moment. Nous attendons que les autorités nous apportent leur appui parce que la mer n’attend pas », souligne Jeanne, une jeune fille-mère. Le disant, elle pense aussi au déclassement d’une partie de la forêt classée de N’Ganda N’Ganda afin que les populations y vivent. « Pour nous, le déclassement d’une parcelle de la forêt classée reste la solution qui peut être mise en œuvre dans de meilleurs délais », affirme-t-elle.

A Mabianeha, une petite localité située entre la lagune et la mer, c’est infernal.

Mabianeha, 1000 habitants menacés par la mer et la lagune

Voir et écouter pour croire. Mabianeha est un petit village situé entre la lagune Aby et la mer, à environ 13 km d’Assinie et 9 km d’Assouindé qui comprend environ 1000 habitants. Ce 27 mai, aux environs de 14h, nous empruntons une pirogue motorisée pour traverser la lagune qui est calme. La traversée dure à peine cinq minutes. Deux jeunes, âgés d’une vingtaine d’années sont les piroguiers. Leur âge suscite notre inquiète.

Toutefois, rassurent-ils : « nous avons l’expérience et l’expertise ». Ces deux jeunes disent conduire ces pirogues depuis leur bas âge. « Nous utilisons même des pirogues sans moteur pour pêcher lorsque la lagune est calme. Nous n’avons jamais eu de problème », affirment-ils avec fierté.

Selon le porte-parole du chef de Mabianeha, Jean Enoh, chaque jour, des écoliers traversent l’eau à la pirogue pour aller à l’école. « Nous n’avons pas d’école. L’école est située non loin de la voie menant à Assinie. Nos enfants doivent traverser pour aller à la quête du savoir », mentionne-t-il. Mais, c’est surtout l’avancée de la lagune qui l’inquiète. « Nous ne dormons plus. Notre situation est celle de personnes désespérées », dit cet homme, la soixantaine à peine. Il n’exagère pas.

Ce petit village coincé entre la mer et la lagune, au fil des années, perd une partie de sa superficie. « La mer avance. Vous voyez la mosquée et l’église qui ont été abandonnées à cause de l’avancée de la mer », pointe-t-il du doigt plusieurs bâtisses en ruines du fait des vagues. Poursuivant Jean Enoh révèle que durant les périodes où le niveau de la mer est haut, les vagues traversent le village pour aller se jeter dans la lagune. « Ce n’est pas un film, c’est bel et bien une réalité et cela fait énormément peur », relate le porte-parole.

Les autorités municipales ne restent pas inactives, face à cette situation.

La mairie d’Assinie tire la sonnette d’alarme

Ce 27 juin, dans l’après-midi, en l’absence du premier magistrat de la commune d’Assinie, Hyppolite Ebagnitchie, son 4è adjoint qui dit n’avoir pas reçu mandat pour aborder la question de l’érosion côtière, ne veut pas entrer dans les détails sur cette thématique. Toutefois, il ne laisse échapper quelques informations. « La mairie a fait venir des experts pour s’enquérir de la situation de l’érosion côtière. Elle a également organisé des conférences de presse pour tirer la sonnette d’alarme.

Le problème préoccupe au plus haut point le conseil municipal dirigé par le maire Hyppolite Ebagnitchie. Le conseil municipal a posé de nombreuses actions. Nous avons écrit à toutes les autorités du pays. Mais, n’ayant pas reçu l’autorisation d’en parler, je ne peux pas aller plus loin », affirme Nianzou Ety Niamké.

Envoyé spécial à Assinie

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Les populations appellent à être relogées

Les populations de Mabianeha, de Sagbadou et d’Assouindé (22 km d’Assinie et faisant partie de la commune d’Assinie) ne le cachent pas. Aussi bien les chefs que les habitants, la solution, face à l’avancée de la mer, c’est la délocalisation des localités menacées par l’érosion vers un nouvel espace. « Nous voulons aller nous installer ailleurs pour vivre. Notre destination est connue des autorités. Nous demandons qu’une partie de la forêt classée de N’Ganda N’Ganda (Assinie) soit déclassée pour nous permettre de retrouver un lieu calme et vivre normalement », souligne Jean Enoh, porte-parole du chef de Mabianeha.

Le chef central d'Assinie, Ahemou Attoumani (à gauche) et la cheffe Nanan Zonah Foulé, chef de village d’Assouindé (à droite) ont plaidé pour le relogement des populations. (Ph: Ahua Kouakou)
Le chef central d'Assinie, Ahemou Attoumani (à gauche) et la cheffe Nanan Zonah Foulé, chef de village d’Assouindé (à droite) ont plaidé pour le relogement des populations. (Ph: Ahua Kouakou)



Une position partagée par le chef central d’Assinie, Ahemou Attoumani. « Plusieurs localités d’Assinie risquent de disparaître d’ici peu. Nous avons de nombreuses personnes qui ont vu leurs habitations détruites. Nous avons demandé aux autorités de nous permettre d’avoir une partie de la forêt classée, mais depuis cette doléance est restée sans suite », annonce le chef central.

Puis d’insister sur l’urgence de cette préoccupation ces dernières années. La seule femme chef de village d’Assinie, Nanan Zonah Foulé, chef de village d’Assouindé ne dit pas non plus autre chose. « Que les autorités n’attendent pas le pire avant de rechercher une solution à notre problème. Celle que nous trouvons moins compliquée, c’est de nous reloger sur une partie de la forêt classée de N’Ganda N’Ganda », clame-t-elle. La doléance reste la même à Sagbadou où la notabilité demande la relocalisation.

Au ministère des Eaux et forêts, des cadres indiquent que plusieurs fois, l’ex-ministre, Alain Richard Donwahi a échangé avec les populations d’Assinie sur cette doléance. Il a mis en place un comité pour travailler sur la question.

« L’actuel ministre, Laurent Tchagba, est informé de la question. Il a pris fonction, seulement le 24 avril 2022, laissez-lui le temps de plancher sur ces importants dossiers avant de vous revenir », a fait savoir son service de communication.

En attendant, les populations ont les oreilles tendues vers ledit ministère.

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Eric Valère Djagoua, coordonnateur du Pngec au Minedd : « Il faut des études de faisabilité dans chaque zone »

Il l’affirme sans détour. « Certes, il y a un schéma directeur qui indique les problèmes liés à l’érosion côtière de façon générale dans la sous-région. En Côte d’Ivoire, il y a aussi un plan d’aménagement et de protection du littoral. Ce plan s’inscrit dans la loi n° 2017-378 du 02 Juin 2017 relative à l'aménagement, à la protection et à la gestion intégrée du littoral. Mais, il faut aller plus loin », souligne Eric Valère Djagoua, Professeur titulaire des Universités du Cames à l’UFR des Sciences de la terre et des Ressources minières à l’Université Félix Houphouët-Boigny de Cocody et spécialiste en gestion de l’environnement marin et côtier et en télédétection.

Pr Eric Valère Djagoua, coordonnateur du Pngec au ministère de l’Environnement et du développement durable. (Ph: Ahua Kouakou)
Pr Eric Valère Djagoua, coordonnateur du Pngec au ministère de l’Environnement et du développement durable. (Ph: Ahua Kouakou)



Toutefois, celui qui est également coordonnateur national de gestion de l’environnement côtier (PNGEC) au ministère de l’Environnement et du développement durable (Minedd) rappelle que si à Abidjan, notamment à Port-Bouet, il existe une étude de préfaisabilité sur l’érosion côtière, il manque une étude de faisabilité pour indiquer les coûts et confirmer les options proposées.

Quant à Assinie et San Pedro, il informe qu’il faut des études de préfaisabilité et de faisabilité.

L’expert déclare que la zone d’Assinie fait partie des cinq points chauds, sensibles à l’érosion côtière en Côte d’Ivoire déterminée par les experts ivoiriens et internationaux. « L’endroit est caractérisé principalement par une submersion, une inondation marine et une érosion. Car, quand il y a submersion, il y a déficit sédimentaire. C’est pour cela que cette zone est très sensible. Compte tenu de son niveau très bas. Il n’y a pas de pente, le niveau où se trouvent les maisons et la mer », dépeint-il la situation.

Pour Eric Valère Djagoua, coordonnateur-adjoint du Projet d'investissement pour la résilience des zones côtières ouest-africaines (WACA ResIP), toute solution commande une visibilité et une bonne compréhension du phénomène.

C’est la raison pour laquelle, dit-il, il faut faire une étude de vulnérabilité. « Toutes les zones n’ont pas les mêmes caractéristiques. On ne peut pas transposer une solution d’un endroit donné à un autre. Tant que les études ne sont pas faites, on ne peut pas faire de proposition », insiste-t-il.

En tout état de cause, l’expert avance qu’en matière de risques côtiers, il y a trois solutions.

La première, indique-t-il, c’est qu’on puisse protéger la zone. La deuxième, c’est de s’en accommoder. La dernière, est de faire un repli stratégique. C’est-à-dire, quitter la zone. Concernant ce dernier point, l’universitaire relève que la préoccupation essentielle, c’est de réinstaller les populations. A savoir quel endroit propice pour les réinstaller ? Parce que, clame-t-il, il ne faut pas que les populations soient éloignées des bords lagunaires, la plupart étant des pêcheurs.

En sus, conseille-t-il, il faut que les populations soient dans un environnement saint. « Ce sont tous ces éléments environnementaux et sociaux qu’il faut prendre en compte », conclut-il.

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Plusieurs localités ivoiriennes confrontées au défi de l’érosion côtière

Avec 590 km de côte, la Côte d’Ivoire a de nombreuses villes qui font rêver. Toutefois, les zones côtières ivoiriennes comme celles de la sous-région ouest africaine sont confrontées à l’érosion. Outre Abidjan, la capitale économique, San Pedro qui abrite le second port du pays, Grand-Lahou ainsi que les stations balnéaires de Grand-Bassam et d’Assinie font face à ce phénomène.

Selon les experts du Programme de gestion du littoral ouest-africain de gestion du littoral (Waca), la mer avance d’un à trois mètres par an. C’est dire que le danger est réel.

Rappelons que le Programme de gestion du littoral ouest-africain de gestion du littoral a pour but d’aider les pays à harmoniser leur gestion des infrastructures et des ressources naturelles afin d’accroître leur résilience au changement climatique en général, et à l’érosion côtière et aux inondations en particulier.

Le programme intègre dans son champ d'intervention deux aires protégées de Côte d’Ivoire : les parcs nationaux d'Azagny (C’est un parc couvrant une superficie de 19 400 ha à Grand-Lahou) et les Îles Ehotilé (C’est un parc national situé, à l'est du pays, sur la lagune Aby près d'Assinie et d'Adiaké. Il vise en outre à permettre la préservation du cordon littoral ivoirien).

Financé par la Banque mondiale pour un montant d'environ 16 milliards F CFA au bénéfice de l'Etat de Côte d'Ivoire, le projet Waca s'étend sur une durée de cinq ans, de 2018 à 2023. Il prévoit également la réhabilitation et le reboisement des champs de mangroves dans le complexe lagunaire de Grand-Lahou (Sud ivoirien), ainsi que dans les parcs d'Azagny et des Îles Ehotilé, placés sous la gestion exclusive de l'Office ivoirien des parcs et réserves (Oipr).



Le 21/06/22 à 14:30
modifié 21/06/22 à 14:30