L'éditorial de Venance Konan : Le temps de la grandeur

L'éditorial de Venance Konan : Le temps de la grandeur

Le 27/07/21 à 15:03
modifié 27/07/21 à 15:03
Il y a un temps pour tout, un temps pour toute chose sous les cieux : Un temps pour pleurer, et un temps pour rire, un temps pour se lamenter, et un temps pour danser ; Un temps pour déchirer, et un temps pour coudre, un temps pour se taire et un temps pour parler ; Un temps pour aimer, et un temps pour haïr ; un temps pour la guerre, et un temps pour la paix » (L’Ecclésiaste, dans la Bible) Le temps de la réconciliation est arrivé en Côte d’Ivoire.

Et il est temps de féliciter Laurent Gbagbo pour le courage dont il fait montre en se rendant au Palais présidentiel pour rencontrer le Président de la République Alassane Ouattara. N’affirmait-il pas, il y a peu, qu’il était le vrai gagnant de l’élection présidentielle de 2010 et qu’il avait été écarté par la force parce qu’il gênait ? N’est-ce pas ce que ses partisans ont martelé pendant les dix années qu’il a passées hors du pays dont huit en prison à La Haye ?

Du point de vue de Laurent Gbagbo, il a souffert pour rien puisqu’il a été innocenté par la justice internationale. Nous pouvons comprendre ce point de vue et reconnaître la grandeur qu’il a à surmonter cette souffrance en se rendant chez celui qui l’a vaincu pour lui tendre la main. L’heure n’est plus à la haine, ni à la guerre. C’est le temps de la paix, le temps pour aimer, le temps pour s’aimer au nom de la patrie. Qu’il passe aussi, le temps pour pleurer, le temps pour se lamenter, et que vienne le temps pour parler, le temps pour rire, le temps pour danser la danse des retrouvailles fraternelles.

Remercions le Président de la République qui aurait pu ignorer Laurent Gbagbo qui, bien avant de rentrer au pays, avait annoncé qu’il se rangeait du côté de l’opposition et n’avait pas trouvé de mots assez durs pour fustiger le mandat actuel du Chef de l’État. Il y a longtemps que le Président Ouattara s’est inscrit dans la dynamique de la réconciliation et de l’union entre tous les fils de ce pays, car lui le bâtisseur sait mieux que quiconque qu’aucune œuvre solide ne peut se construire si les enfants du pays sont divisés.

Être réconciliés et unis ne signifie nullement penser tous la même chose et ne pas avoir chacun sa propre vision de la construction du pays. L’essence de la démocratie est la pluralité des opinions et leur harmonieuse cohabitation. Être réconciliés et unis, c’est désarmer nos cœurs, les vider de toute haine et nous attaquer ensemble aux défis auxquels notre pays doit faire face. Être réconciliés et unis, c’est faire preuve de grandeur en surmontant nos souffrances, nos blessures, nos égos.

Nos trois leaders que sont Alassane Ouattara, Henri Konan Bédié et Laurent Gbagbo ont chacun souffert dans son âme et dans sa chair. Ils pourraient s’accuser les uns les autres d’être responsables des souffrances de l’autre. Mais ils sont Grands, c’est-à-dire au-dessus de cela.

Avant-hier, Alassane Ouattara et Henri Konan Bédié marchaient la main dans la main pendant que Laurent Gbagbo se morfondait dans une prison aux Pays-Bas. Hier, Henri Konan Bédié accueillait Laurent Gbagbo en grande pompe dans son fief de Daoukro. Aujourd’hui, Alassane Ouattara et Laurent Gbagbo se rencontreront au Palais présidentiel. Gageons qu’ils sortiront de leur entretien sourire aux lèvres et main dans la main. Et prions pour que dans très peu de temps, les deux hommes soient rejoints par leur aîné Henri Konan Bédié.

La réconciliation entre ces trois hommes qui ont eu chacun à diriger notre pays, une réconciliation à trois, et non plus à deux contre un, serait le plus bel héritage qu’ils laisseraient aux générations actuelles et à venir. Ils savent tous ce que leurs dissensions ont causé comme tort à tout le pays. Ils devraient aussi savoir combien les Ivoiriens sont fatigués de leurs querelles.

Au moment où nous devons faire face à une pandémie qui sape toute notre économie et tout ce que nous avons réalisé comme performance au cours de ces dix dernières années, au moment où la menace djihadiste nous pend au nez et n’est plus quelque chose de virtuel, nos leaders qui sont les aînés pour bon nombre d’entre nous devraient comprendre que plus que jamais le pays a besoin de les voir unis, de les voir en paix. Et ils doivent cela à la Côte d’Ivoire et aux Ivoiriens !


Le 27/07/21 à 15:03
modifié 27/07/21 à 15:03