L'éditorial de Venance Konan: Mon ami Norbert

Norbert Navarro
Norbert Navarro
Norbert Navarro

L'éditorial de Venance Konan: Mon ami Norbert

Le 07/06/21 à 06:58
modifié 07/06/21 à 06:58
Ça fait deux jours hein, mon cher Norbert ! J’espère que ton retour dans ton pays ne t’a pas fait oublier que dans notre joli parler ivoirien, cette expression signifie que cela fait un bout de temps qu’on ne s’est pas revu. Notre dernière rencontre remonte à plus de dix ans, si ma mémoire est bonne. Nous avions déjeuné aux « Anciens combattants » au Plateau.

A cette époque, on te soupçonnait très fortement de rouler trop ouvertement pour le « Woody de Mama », ce qui était gênant pour ton statut de correspondant d’une radio qui se voulait neutre et respectable. On racontait même que le Woody t’avait fait de jolis cadeaux. Tu sais comment nous sommes mauvaises langues ici. Il y a quelques années, une de tes patronnes avec qui j’échangeais disait que l’on savait à Paris que si tu avais pu voter lors de notre élection présidentielle en 2010, tu n’aurais certainement pas voté pour le Président actuel. Parce que tout le monde connaissait ton parti pris trop flagrant pour celui qui occupait alors le Palais présidentiel. Est-ce pour cela que tu fus rappelé chez toi, sur tes terres de France et de Navarre ? Je n’en sais rien. Mais j’ai l’impression que l’on t’a mis dans un joli placard là-bas, puisque tu n’apparais pour une revue de presse qu’en fin de semaine. Et l’on constate à chaque fois que ton admiration pour le Woody ou plutôt ta détestation de mon champion à moi n’a pas faibli d’un iota. Ainsi, à chacune de tes revues de presse, tu vas systématiquement chercher des articles écrits par d’obscures feuilles de chou que personne ne lit ici, pour peu qu’elles disent des choses négatives sur notre Président ou qu’elles encensent le mari de Simone et de Nady. Y a quoi, Norbert ? On t’a fait quoi ?

Ton dernier coup a été de parler d’un sondage imaginaire qui aurait été réalisé par un institut qui ne se reconnaît pas là-dedans. Il dit qu’il n’en fait plus depuis belle lurette. Tu as quand même suffisamment d’expérience, Norbert, pour savoir comment vérifier ce genre d’information ! Et puis, ton long séjour sur les bords de la lagune Ébrié aurait dû t’amener à savoir faire la distinction entre nos différents journaux et à savoir que certains d’entre eux, que l’on appelle à tort des journaux, distillent systématiquement des « fake news » pour discréditer ceux qu’ils considèrent comme des ennemis à abattre. Mais toi, le journaliste supposé chevronné, dès lors que ton sondage bidon a dit que ton champion était deux fois plus populaire que le mien, tu n’as pas réfléchi, tu as foncé comme un taureau, tête baissée. Et voilà que tu as mis ta radio, pour laquelle nous avons tant d’estime et en qui nous avons tant confiance, en drap, comme on dit ici, c’est-à-dire en situation gênante. Est-ce bien ça Norbert, mon ami ? Et si après cela, on te met dans un placard encore plus petit, où iras-tu te plaindre ? Diras-tu que quelqu’un a été méchant envers toi ? Norbert, je constate aussi que tu n’as pas eu la courtoisie de nous présenter tes excuses, à nous auditeurs de ta radio, lorsque tu as dû faire ton rectificatif. Je suis presque certain que l’on a dû te chauffer les oreilles pour que tu te résolves à le faire, ce rectificatif.

Tu vas sans doute me rétorquer que moi aussi j’ai pris parti. C’est vrai. Mais moi je ne travaille pas dans une radio internationale supposée neutre. Surtout dans les affaires africaines. Je travaille pour le journal qui soutient les actions du gouvernement et du Président de la République. Je suis même membre affiché du parti du Président et j’ai porté ses couleurs lors des dernières législatives. Voilà. Une autre objection ? Non ? Donc voilà. Fais un peu plus gaffe au choix des sujets de tes prochaines revues de presse. Sinon, tu risques de ne plus en faire du tout. Si nous, auditeurs, nous voyons vers où tu es penché, tes patrons aussi te voient. Et comme ils tiennent à la crédibilité de leur radio, ils risquent de frapper très fort. Parce qu’ils savent que nous sommes très susceptibles et qu’il suffit de peu pour nous énerver. Surtout quand la saison des pluies tarde à venir et que l’on rationne l’électricité.


Le 07/06/21 à 06:58
modifié 07/06/21 à 06:58