Meiway (parrain du festival des fanfares de Côte d’Ivoire) :« Tant que nous préserverons notre tradition, nous serons toujours fiers de notre combat »

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Meiway (parrain du festival des fanfares de Côte d’Ivoire) :« Tant que nous préserverons notre tradition, nous serons toujours fiers de notre combat »

Le 23/02/21 à 06:38
modifié 23/02/21 à 06:38
L’artiste de renommée internationale, parrain officiel du festival des fanfares de Côte d’Ivoire qui se tiendra en décembre 2021, justifie son soutien à l’événement.
Pourquoi avez-vous accepté de poser votre image sur cet événement qui met la fanfare en première ligne ?

J’ai été approché par mon jeune frère, Firmin Akessé, qui est d’une génération après moi et qui n’a pas forcément connu les valeurs de la tradition que nous avons connues à notre époque. Des valeurs qui se dégradent de plus en plus avec l’avènement du Net avec son corollaire de réseaux sociaux qui font que tout le monde se déporte plus vers les réalités du monde occidental que sur les valeurs qui caractérisent notre tradition. Quand il est venu me proposer un tel projet venant de quelqu’un d’une génération plus jeune, j’ai été émerveillé. J’ai tout de suite accepté en me disant qu’il y a de l’espoir. J’y ai adhéré d’autant plus que je suis quelqu’un qui a les deux pieds ancrés dans la tradition et qui en fait la promotion depuis le début de ma carrière. Du coup, notre jumelage s’est fait de façon spontanée. J’ai décidé d’être le parrain de ce festival et d’accompagner les organisateurs de l’événement. Dieu merci, nous avons évolué sur la question. Il y a eu des éditions passées et forcément, nous n’avons plus le choix que de faire mieux que les précédentes fois. Nous ferons en sorte de faire grandir ce festival.

Cette troisième édition prévoit bien sûr, comme les précédentes, des phases de présélections. Quel est concrètement votre apport ?

Il est clair que le plus important dans l’accompagnement de cet événement, ce n’est pas l’accompagnement financier. C’est surtout l’accompagnement moral. C’est justement cet accompagnement que l’organisateur principal était venu chercher auprès de moi. Et il est au-dessus de tout. Dans un tel cas de figure, quand on est soutenu par des personnes qui sont censées être les garants de la transmission d’une tradition, forcément vous gardez les pieds dans les racines et dans la source pour défendre au mieux la dynamique dans laquelle vous vous engagez. Donc cela a d’abord été l’accompagnement moral. Mais l’accompagnement financier sera présent forcément. Je pense qu’avec des personnalités de mon envergure, il y a des ouvertures qui se font auprès d’éventuels annonceurs et partenaires. C’est dans cette dynamique que nous nous sommes engagés. Jusque-là, il y a eu énormément d’ouvertures, mais nous espérons beaucoup plus. Ce festival se veut un événement à l’échelle nationale, avec une implication totale de tous les citoyens de ce pays.

Á quelles valeurs traditionnelles renvoie justement la fanfare dont il est question dans ce festival ?

Personne n’ignore l’engouement que crée toujours le son de la fanfare. Pour moi, la fanfare est un peu l’expression de la fraternité, c’est un appel à l’unisson, le symbole de la solidarité et de la cohésion sociale. C’est un peu le symbole de toutes ces valeurs si chères à l’Afrique et à nos traditions. Si nous ne transmettons pas ce que nous avons reçu de nos devanciers, on aura failli à notre devoir. Et l’histoire parlera de nous comme des auteurs de la rupture. A mon avis, c’est plus que vital pour un pays de protéger ce qui constitue sa vitrine. Et pour moi, notre vitrine, c’est notre tradition. Une tradition que nous ne devons pas galvauder. Je suis convaincu que tant que nous la préserverons, nous serons toujours fiers de notre combat.

Est-ce justement cette volonté de mener le juste combat de la tradition et de la fanfare qui conduit progressivement le père du Zoblazo que vous êtes en mode de pourcentage croissant ? Vous êtes passé de 100% à 200% et même à 1000% pour atteindre, dans votre récent opus, le stade de Légende. Comment l’expliquez-vous ?

(Rires). Effectivement, le Zoblazo, c’est cette musique et cette danse que j’ai créées à partir de cette tradition que Firmin et moi sommes aujourd’hui en train de défendre par ce festival. C’est un brassage de plusieurs autres folklores des N’Zima de Grand-Bassam. Cette musique, je l’ai voulue évolutive parce que la Côte d’Ivoire est très métissée. J’ai voulu qu’on ressente ce métissage dans ce que je fais. Donc de Bassam, en sillonnant les autres régions de la Côte d’Ivoire, j’ai toujours voulu intégrer les autres musiques dans ce que je fais. C’est ce mix qui forme le Zoblazo que je souhaite vraiment à l’image de mon pays. Je le veux comme un symbole, une espèce de porte-flambeau de la culture ivoirienne.

Est-ce encore cette volonté de porter le flambeau de la culture ivoirienne que l’on retrouve dans votre dernier album intitulé Légende ?

L’album Légende est le dernier de ma discographie et a marqué les trente ans de ma carrière. Nous avons eu la chance de célébrer cet événement en Côte d’Ivoire, dans le mois de décembre 2019 et malheureusement, quelques mois après, la pandémie liée à la Covid-19 a plombé le métier et depuis ce temps, nous sommes liés à l’actualité de cette pandémie. Aujourd’hui, il est très difficile de réaliser, en termes de projets, ce qu’on envisageait. Du coup, nous évoluons sur des plans B, en essayant de trouver des moyens d’intéresser nos partenaires, parce que sans partenaires aujourd’hui, on ne peut rien réaliser à grande échelle. Il nous faut des moyens, il nous faut de l’argent qui ne vient pas forcément des acteurs. Mais plutôt des partenaires qui ont des budgets pour cela. Ces partenaires n’ont aucun intérêt à évoluer dans des actions qui n’attirent pas de monde. Alors que cette pandémie nous oblige à réaliser des événements en évitant d’avoir trop de monde. Ce qui fait que les choses ne sont pas si faciles que ça, mais la vie doit continuer. Si nous prenons conscience que la vie doit continuer, il faut bien se mettre à la tâche. C’est dans ce cadre que nous avons décidé de ne pas croiser les bras en organisant ce festival des fanfares de Côte d’Ivoire qui doit survivre malgré tout. Parce que la vie continue pour nous et la vie doit continuer pour notre nation.

Le festival des fanfares met en jeu un trophée qui porte votre nom. Un commentaire ?

C’est un honneur ! Venant du commissaire général qui a décidé que ce trophée porte mon nom, je pense que si nous deux, nous nous sommes retrouvés sur ce festival, c’est parce que nous formons une belle paire qui doit être matérialisée par des actions. Cette action qui est de faire en sorte qu’un trophée porte mon nom est pour moi légitime. Je l’accepte, je l’apprécie et je ferai en sorte qu’à mon niveau, le travail soit fait, de sorte à ce que le festival des fanfares de Côte d’Ivoire survive. Qu’il aille le plus loin possible et atteigne l’objectif visé qui est la protection de nos traditions. Il est clair que la fanfare nous a été aussi transmise avec l’arrivée des colons qui nous ont fait découvrir les cuivres. Mais il est aussi clair que les Africains pratiquaient cette musique de rassemblement avant eux, sans cuivre !

Avant, on pouvait tailler des plantes pour en faire une trompette traditionnelle. Il y a des choses qui ont toujours existé dans nos traditions. Voyez un peu la corrélation entre le piano et le balafon, la basse et le N’Goni. Il y a plusieurs exemples que nous pouvons citer. La technique liée à l’exploitation des cuivres nous a certainement facilité les choses. Mais nous avons gardé avec la fanfare les valeurs de fraternité universelle, de solidarité et de cohésion sociale.

Interview réalisée par BRIGITTE GUIRATHE



Le 23/02/21 à 06:38
modifié 23/02/21 à 06:38