Catherine Morvan
Protection des personnes en situation de handicap/Catherine Morvan : « Nous devons tous nous sentir concernés »
Le Programme de réadaptation physique (Prp) pour l’Afrique de l’Ouest fait partie des programmes du Comité international de la Croix-Rouge. La responsable régionale de ce programme du Cicr, Catherine Morvan, basée au Togo, de passage à Abidjan, lève le voile sur l’évaluation en cours du secteur de la réadaptation et les perspectives pour venir en aide aux handicapés de Côte d’Ivoire.
Que signifie pour vous la réadaptation physique ?
La réadaptation physique est un moyen d’intégrer les personnes handicapées physiques dans les familles et les communautés, les écoles et les lieux de travail. Elle comprend la fourniture de dispositifs de mobilité (prothèses, orthèses, aides à la marche et fauteuils roulants), les services de kinésithérapie, d’ergothérapie, d’orthophonie... Nous devons tous nous sentir concernés car nous sommes tous susceptibles de devenir une personne handicapée un jour ou l’autre, ne serait-ce qu’en prenant de l’âge, ou d’avoir des proches en situation de handicap.
Quelle est la mission du Programme de réadaptation physique du CICR ?
Notre programme de réadaptation physique pour le Togo, le Bénin et la Côte d’Ivoire, consiste en un support aux personnes handicapées tout en essayant d’avoir une approche systémique pour soutenir les gouvernements dans ce domaine. Il s’agit de promouvoir la réadaptation physique, qui est souvent le parent pauvre des ministères de la santé, pas seulement en Côte d’Ivoire mais un peu partout.
Cela signifie-t-il que les personnes victimes d’accidents sont aussi prises en charge par votre programme ?
En réalité, il ne s’agit pas de prise en charge directe de groupes spécifiques de personnes. Le CICR cherche plutôt à renforcer la réadaptation physique des personnes handicapées dans les structures déjà existantes. Le CICR travaille donc avec les bénéficiaires et les prestataires de services dans différents centres de réadaptation ou au travers d’associations regroupant des professionnels de la réadaptation physique.
Finalement, quels sont vos objectifs ?
Notre but principal est d’appuyer la réadaptation physique au sein des ministères de la santé dans les trois pays où nous exerçons. En fait, dans un souci de pérennité de nos actions, nous prenons des initiatives avec les différents acteurs de la réadaptation physique, afin d’améliorer la qualité des services dédiés pour répondre aux normes internationales. Nous visons également le renforcement des compétences des professionnels du secteur, l’amélioration de l’accès aux services de réadaptation physique aux personnes en situation de handicap et de leur inclusion dans la société.
Quelles sont les actions concrètes que vous posez, notamment en Côte d’Ivoire ?
Nous travaillons avec le ministère de la santé, des professionnels de la santé, des prestataires de service ainsi que des associations professionnelles composées de kinésithérapeutes, d’orthopédistes, etc. Annuellement, nous finançons par exemple la prise en charge (appareillage orthopédique ou rééducation physique) d’une cinquantaine de personnes vulnérables et souffrant de handicap physique. Nous développons aussi des outils qui assurent la qualité des soins et sponsorisons quelques formations initiales ou continues, par exemple, des formations d’orthoprothésistes.
En Côte d’Ivoire, le CICR finance l’évaluation du secteur de la réadaptation par un consultant de l’Organisation mondiale de la santé. Cette évaluation va être menée par le consultant en collaboration avec tous les acteurs du secteur (réunis dans un groupe de travail). Il s’agit donc d’un exercice participatif qui se réalise à distance dans un premier temps via un questionnaire puis dans un deuxième temps, en février, le consultant viendra en Côte d’Ivoire afin de rencontrer tous les participants et finaliser l’évaluation. Finalement, le rapport sera soumis au ministre de la santé pour validation avant d’entamer la seconde étape qui consistera à établir un plan national stratégique s’appuyant sur les recommandations de l’évaluation.
Le CICR soutient le secteur de la réadaptation physique en Côte d’Ivoire depuis 2012.
Avez-vous des exemples de résultats concrets concernant la Côte d’Ivoire ?
Oui. Le CICR a sponsorisé la formation en ortho-prothèse de deux Ivoiriens pendant trois ans à l’École nationale des auxiliaires médicaux de Lomé, au Togo. Ils viennent de terminer leur formation et travaillent maintenant au centre de réadaptation physique tenu par l’association Vivre Debout.
Comment se fait la sélection des handicapés bénéficiaires de votre programme ?
C’est vraiment le grand enjeu. Idéalement, nous souhaitons cibler les personnes handicapées les plus pauvres. Nous travaillons donc avec des assistants sociaux dans les différents centres partenaires pour qu’ils nous aident à identifier les personnes les plus vulnérables, celles qui ont vraiment besoin d’un appareillage ou d’une aide qui puisse leur permettre de passer à une autre étape de leur vie.
Quel est votre meilleur souvenir depuis que vous êtes à la tête de ce programme ?
Au Togo, il y a un programme qui me tient particulièrement à cœur; c’est le programme d’aide aux enfants infirmes moteurs cérébraux. Ces enfants sont souvent lourdement handicapés, souffrant de handicap physique mais aussi de troubles du langage, de problèmes visuels, sensoriels. Même s’il n’assure pas la guérison de ces enfants, ce programme améliore tout de même, et de manière significative, leur qualité de vie. Ces enfants ont besoin de rééducation intensive et presqu’à vie. La première étape dans leur prise en charge consiste souvent à faire comprendre aux parents ce qu’est l’infirmité motrice cérébrale (IMC) et quelles en sont les causes, car beaucoup de parents se réfèrent à des croyances disant par exemple qu’on a lancé un sort à l’enfant, qu’il est victime de la sorcellerie etc. Offrir à son enfant des soins de rééducation intensive est impossible pour beaucoup de familles. Le CICR a donc décidé de promouvoir une approche développée en Afrique du Sud qui consiste à former les mamans à la prise en charge de ces enfants. La stratégie est basée sur l’organisation de réunions, sorte de sessions de formation des mamans par des kinésithérapeutes, orthopédistes et tous professionnels des questions liées aux handicaps. Ces sessions de formation en groupe permettent de sensibiliser les mamans aux problèmes de l’IMC : les difficultés de communication que cela engendre, les difficultés liées à l’alimentation, aux jeux, aux positionnements, etc.
Ces sessions sont autant d’occasions de partage d’expériences, de vécus qui rassurent les mamans et les aident à voir qu’elles et leurs familles ne sont pas seules à vivre cette situation. Petit à petit, on essaie de démystifier ou de dédramatiser le handicap de leurs enfants, l’idée étant de donner des outils aux familles pour améliorer la compréhension du handicap et la qualité de vie des enfants afin d’éviter des cas d’abandon.
Notre programme comporte aussi d’importantes initiatives d’avenir. Par exemple, nous nous impliquerons dans la formation professionnelle d’une dizaine de jeunes femmes handicapées de milieux ruraux dès l’année prochaine, à commencer par le Togo.
Où se situe la difficulté dans votre mission ? Et pensez-vous avoir les moyens pour la mener à bien ?
Notre souci est d’être en phase avec les besoins des populations cibles afin de pouvoir répondre autant que possible à leurs attentes. Au bout de quatre mois d’exercice, je me réjouis de voir que, grâce à mes prédécesseurs, les évaluations du secteur de la réadaptation sont déjà en marche, dans les trois pays que nous couvrons. C’est très encourageant pour la réadaptation physique. J’ai hâte de voir quels seront les résultats de l’évaluation en Côte d’Ivoire afin de pouvoir ensuite envisager le développement d’un plan stratégique. Au Togo, l’évaluation du secteur de la réadaptation vient de se faire et nous pensons que le développement du plan national stratégique pourra être mené en 2021. Au Bénin, l’évaluation a été faite en 2019 et l’élaboration du plan a débuté en 2020.
Quelles sont les idées qui vous orientent dans votre visite en Côte d’Ivoire ?
Le but de la mission en Côte d’Ivoire est de rencontrer les interlocuteurs qui vont être partie prenante de l’évaluation. Il s’agit d’un premier contact afin d’apprendre à les connaître, mentionner les enjeux de cette évaluation et essayer de partager avec eux nos attentes par rapport à cette évaluation. Il y a encore beaucoup à faire, mais cela avance plutôt bien. Nous avons rencontré plusieurs partenaires et interlocuteurs et effectué une rencontre avec le ministre de la santé.
Avez-vous bon espoir pour une réadaptation effective dans ce pays ?
Je pense que le programme est en bonne voie avec des partenaires et interlocuteurs efficaces comme la jeune école de kinésithérapie d’Abidjan.
En Côte d’Ivoire, il est important de sensibiliser la population pour qu’elle se sente concernée par ces sujets de la réadaptation et du handicap. La réadaptation physique, ce n’est pas seulement l’appareillage, c’est aussi assurer l’accès des personnes handicapées aux services, l’accessibilité des bâtiments pour les personnes en fauteuil roulant, l‘intégration professionnelle, l’accès à l’éducation pour les enfants handicapés... Si le public et les décideurs accordent une attention particulière à ces personnes, ils pourront contribuer à améliorer leur qualité de vie.
En dehors du Programme de réadaptation physique, le CICR est-il engagé dans d’autres initiatives en faveur des personnes vulnérables en Côte d’Ivoire ?
Oui. En plus de son travail en faveur des personnes en situation de handicap, le CICR soutient les autorités pénitentiaires pour améliorer les conditions de détention dans les 33 maisons d’arrêt et de correction du pays, et visite les détenus arrêtés en lien avec des violences ou des troubles. Il travaille étroitement avec la Croix-Rouge de Côte d’Ivoire dans des domaines tels que la préparation aux secours d’urgence, le rétablissement des liens familiaux rompus par la violence ou la migration, et mène diverses activités de promotion du droit et des valeurs humanitaires
Quelle est la mission du Programme de réadaptation physique du CICR ?
Notre programme de réadaptation physique pour le Togo, le Bénin et la Côte d’Ivoire, consiste en un support aux personnes handicapées tout en essayant d’avoir une approche systémique pour soutenir les gouvernements dans ce domaine. Il s’agit de promouvoir la réadaptation physique, qui est souvent le parent pauvre des ministères de la santé, pas seulement en Côte d’Ivoire mais un peu partout.
Cela signifie-t-il que les personnes victimes d’accidents sont aussi prises en charge par votre programme ?
En réalité, il ne s’agit pas de prise en charge directe de groupes spécifiques de personnes. Le CICR cherche plutôt à renforcer la réadaptation physique des personnes handicapées dans les structures déjà existantes. Le CICR travaille donc avec les bénéficiaires et les prestataires de services dans différents centres de réadaptation ou au travers d’associations regroupant des professionnels de la réadaptation physique.
Finalement, quels sont vos objectifs ?
Notre but principal est d’appuyer la réadaptation physique au sein des ministères de la santé dans les trois pays où nous exerçons. En fait, dans un souci de pérennité de nos actions, nous prenons des initiatives avec les différents acteurs de la réadaptation physique, afin d’améliorer la qualité des services dédiés pour répondre aux normes internationales. Nous visons également le renforcement des compétences des professionnels du secteur, l’amélioration de l’accès aux services de réadaptation physique aux personnes en situation de handicap et de leur inclusion dans la société.
Quelles sont les actions concrètes que vous posez, notamment en Côte d’Ivoire ?
Nous travaillons avec le ministère de la santé, des professionnels de la santé, des prestataires de service ainsi que des associations professionnelles composées de kinésithérapeutes, d’orthopédistes, etc. Annuellement, nous finançons par exemple la prise en charge (appareillage orthopédique ou rééducation physique) d’une cinquantaine de personnes vulnérables et souffrant de handicap physique. Nous développons aussi des outils qui assurent la qualité des soins et sponsorisons quelques formations initiales ou continues, par exemple, des formations d’orthoprothésistes.
En Côte d’Ivoire, le CICR finance l’évaluation du secteur de la réadaptation par un consultant de l’Organisation mondiale de la santé. Cette évaluation va être menée par le consultant en collaboration avec tous les acteurs du secteur (réunis dans un groupe de travail). Il s’agit donc d’un exercice participatif qui se réalise à distance dans un premier temps via un questionnaire puis dans un deuxième temps, en février, le consultant viendra en Côte d’Ivoire afin de rencontrer tous les participants et finaliser l’évaluation. Finalement, le rapport sera soumis au ministre de la santé pour validation avant d’entamer la seconde étape qui consistera à établir un plan national stratégique s’appuyant sur les recommandations de l’évaluation.
Le CICR soutient le secteur de la réadaptation physique en Côte d’Ivoire depuis 2012.
Avez-vous des exemples de résultats concrets concernant la Côte d’Ivoire ?
Oui. Le CICR a sponsorisé la formation en ortho-prothèse de deux Ivoiriens pendant trois ans à l’École nationale des auxiliaires médicaux de Lomé, au Togo. Ils viennent de terminer leur formation et travaillent maintenant au centre de réadaptation physique tenu par l’association Vivre Debout.
Comment se fait la sélection des handicapés bénéficiaires de votre programme ?
C’est vraiment le grand enjeu. Idéalement, nous souhaitons cibler les personnes handicapées les plus pauvres. Nous travaillons donc avec des assistants sociaux dans les différents centres partenaires pour qu’ils nous aident à identifier les personnes les plus vulnérables, celles qui ont vraiment besoin d’un appareillage ou d’une aide qui puisse leur permettre de passer à une autre étape de leur vie.
Quel est votre meilleur souvenir depuis que vous êtes à la tête de ce programme ?
Au Togo, il y a un programme qui me tient particulièrement à cœur; c’est le programme d’aide aux enfants infirmes moteurs cérébraux. Ces enfants sont souvent lourdement handicapés, souffrant de handicap physique mais aussi de troubles du langage, de problèmes visuels, sensoriels. Même s’il n’assure pas la guérison de ces enfants, ce programme améliore tout de même, et de manière significative, leur qualité de vie. Ces enfants ont besoin de rééducation intensive et presqu’à vie. La première étape dans leur prise en charge consiste souvent à faire comprendre aux parents ce qu’est l’infirmité motrice cérébrale (IMC) et quelles en sont les causes, car beaucoup de parents se réfèrent à des croyances disant par exemple qu’on a lancé un sort à l’enfant, qu’il est victime de la sorcellerie etc. Offrir à son enfant des soins de rééducation intensive est impossible pour beaucoup de familles. Le CICR a donc décidé de promouvoir une approche développée en Afrique du Sud qui consiste à former les mamans à la prise en charge de ces enfants. La stratégie est basée sur l’organisation de réunions, sorte de sessions de formation des mamans par des kinésithérapeutes, orthopédistes et tous professionnels des questions liées aux handicaps. Ces sessions de formation en groupe permettent de sensibiliser les mamans aux problèmes de l’IMC : les difficultés de communication que cela engendre, les difficultés liées à l’alimentation, aux jeux, aux positionnements, etc.
Ces sessions sont autant d’occasions de partage d’expériences, de vécus qui rassurent les mamans et les aident à voir qu’elles et leurs familles ne sont pas seules à vivre cette situation. Petit à petit, on essaie de démystifier ou de dédramatiser le handicap de leurs enfants, l’idée étant de donner des outils aux familles pour améliorer la compréhension du handicap et la qualité de vie des enfants afin d’éviter des cas d’abandon.
Notre programme comporte aussi d’importantes initiatives d’avenir. Par exemple, nous nous impliquerons dans la formation professionnelle d’une dizaine de jeunes femmes handicapées de milieux ruraux dès l’année prochaine, à commencer par le Togo.
Où se situe la difficulté dans votre mission ? Et pensez-vous avoir les moyens pour la mener à bien ?
Notre souci est d’être en phase avec les besoins des populations cibles afin de pouvoir répondre autant que possible à leurs attentes. Au bout de quatre mois d’exercice, je me réjouis de voir que, grâce à mes prédécesseurs, les évaluations du secteur de la réadaptation sont déjà en marche, dans les trois pays que nous couvrons. C’est très encourageant pour la réadaptation physique. J’ai hâte de voir quels seront les résultats de l’évaluation en Côte d’Ivoire afin de pouvoir ensuite envisager le développement d’un plan stratégique. Au Togo, l’évaluation du secteur de la réadaptation vient de se faire et nous pensons que le développement du plan national stratégique pourra être mené en 2021. Au Bénin, l’évaluation a été faite en 2019 et l’élaboration du plan a débuté en 2020.
Quelles sont les idées qui vous orientent dans votre visite en Côte d’Ivoire ?
Le but de la mission en Côte d’Ivoire est de rencontrer les interlocuteurs qui vont être partie prenante de l’évaluation. Il s’agit d’un premier contact afin d’apprendre à les connaître, mentionner les enjeux de cette évaluation et essayer de partager avec eux nos attentes par rapport à cette évaluation. Il y a encore beaucoup à faire, mais cela avance plutôt bien. Nous avons rencontré plusieurs partenaires et interlocuteurs et effectué une rencontre avec le ministre de la santé.
Avez-vous bon espoir pour une réadaptation effective dans ce pays ?
Je pense que le programme est en bonne voie avec des partenaires et interlocuteurs efficaces comme la jeune école de kinésithérapie d’Abidjan.
En Côte d’Ivoire, il est important de sensibiliser la population pour qu’elle se sente concernée par ces sujets de la réadaptation et du handicap. La réadaptation physique, ce n’est pas seulement l’appareillage, c’est aussi assurer l’accès des personnes handicapées aux services, l’accessibilité des bâtiments pour les personnes en fauteuil roulant, l‘intégration professionnelle, l’accès à l’éducation pour les enfants handicapés... Si le public et les décideurs accordent une attention particulière à ces personnes, ils pourront contribuer à améliorer leur qualité de vie.
En dehors du Programme de réadaptation physique, le CICR est-il engagé dans d’autres initiatives en faveur des personnes vulnérables en Côte d’Ivoire ?
Oui. En plus de son travail en faveur des personnes en situation de handicap, le CICR soutient les autorités pénitentiaires pour améliorer les conditions de détention dans les 33 maisons d’arrêt et de correction du pays, et visite les détenus arrêtés en lien avec des violences ou des troubles. Il travaille étroitement avec la Croix-Rouge de Côte d’Ivoire dans des domaines tels que la préparation aux secours d’urgence, le rétablissement des liens familiaux rompus par la violence ou la migration, et mène diverses activités de promotion du droit et des valeurs humanitaires