Djamala Koffi Edmond, superviseur de l’alphabétisation de la Dren 2 de Bouaké : ‘‘ Une école, un centre ’’

Djamala Koffi Edmond, superviseur de l’alphabétisation de la Dren 2 de Bouaké : ‘‘ Une école, un centre ’’

Le 31/01/21 à 09:08
modifié 31/01/21 à 09:08
Vous proposez que l’État prenne en main les cours d’alphabétisation, en lieu et place des privés...
En effet, que l’État soit plus impliqué, dans le projet «une école, un centre d’alphabétisation». On pourrait charger un enseignant titulaire formé de s’en occuper, surtout qu’on en dispose dans tous les villages de Côte d’Ivoire. De même qu’une prime est versée aux directeurs d’école, on pourrait verser un intéressement à ces enseignants. L’éducation à 100% que prône l’État ne s’en porterait que mieux. L’enfant ne peut pas réussir uniquement avec l’enseignant. Si en plus, les populations sont alphabétisées, on aura de meilleurs résultats. Venez faire une dictée à un élève et vous verrez les lacunes. C’est pourquoi l’alphabétisation ne doit pas être reléguée au second plan. Nous mettons la main à la poche pour faire fonctionner nos services, alors que nous n’avons pas de primes dédiées.
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Y aurait-il autant de problèmes ?
En dehors du 7 novembre de chaque année où on parle d’alphabétisation dans les médias, on ne nous accorde plus une seule minute d’attention. Toute la tâche repose sur les conseillers. C’est nous qui allons sur le terrain. Nous souhaitons que les autorités soient plus attentives. Qu’elles nous donnent des motos, du carburant pour les tournées, les frais d’entretien et que les supervisions soient dotées d’un budget de fonctionnement. Cela nous évitera d’utiliser nos moyens personnels pour le service. En plus, nous n’avons pas d’ordinateurs pour constituer les fichiers des apprenants. Nous avons découvert que des auditeurs sont partis de nos centres pour atteindre des niveaux très appréciables. Il sont légion. Malheureusement, il n’y a pas de traçabilité. Cela nous aiderait, par ailleurs, à atteindre les objectifs que l’État s’est fixé. La Dren 2 de Bouaké couvre quatre départements, à savoir Bouaké, Sakassou, Béoumi et Botro, et onze IEP, qui comptent des points focaux de l’alphabétisation qui sont des conseillers d’alphabétisation, au nombre de 24. Voyez nos chiffres : En janvier, nous avons 63 centres et 967 apprenants de 12 à plus de 45 ans. Nous pourrons faire mieux.
En quoi consiste l’alphabétisation via le mobile ?
Elle se fait à partir du smartphone et vise à préparer l’auditeur à affronter l’alphabet, en lui enseignant les dix symboles. Il s’agit en réalité de la traduction numérique de ce que nous faisons dans les classes. Sauf qu’ici, l’apprenant suit désormais sa formation avec son smartphone partout où il se trouve, à savoir au marché, au champ, quelle que soit l’heure, en étroite collaboration avec l’animateur qui le trouvera sur place pour l’aider. L’animateur, à son tour, est suivi par le conseiller. Dans cette nouvelle forme d’alphabétisation, la chaîne est bien respectée. Ce projet est en train d’être concocté avec Save the Children, les projets état et la direction de l’alphabétisation. Deux centres sont déjà ouverts à Bouaké, dans les localités de Oliénou et Kongodékro. Il y a également deux centres dans le quartier Belleville, et deux autres à Béoumi et Botro.
Pour ces projets, les apprenants seront dotés d’outils numériques. Et à la fin, qu’en sera-t-il d’eux ?
Nous revenons à notre réalité. Malheureusement, les projets développés dans notre domaine n’excèdent pas trois campagnes. Or, pour certifier que quelqu’un est alphabétisé, il faut qu’on respecte au moins les trois campagnes. Après la première, on n’a plus les moyens et on s’arrête en si bon chemin. Cette fois, nous espérons que le projet ira jusqu’à son terme en suivant les trois étapes.
Les collectivités décentralisées vous apportent-elles un soutien ?
Elles ne répondent jamais à nos sollicitations. Nous souhaitons que les mairies et les conseillers régionaux nous apportent un soutien. Ne serait-ce que pour nous procurer des manuels pour les apprenants. Si chaque mairie nous aide à ouvrir dix centres et le conseil régional dix autres, on pourra avancer.
Quelles sont vos satisfactions ?
Elles se situent au plan moral. Certes, nous n’avons pas d’argent mais quand on a formé des personnes qui ne savaient ni lire ni écrire au départ, et qui ont pu s’insérer dans le tissu professionnel ; des gens qui s’appuyaient hier sur une tierce personne pour remplir un chéquier et qui sont autonomes aujourd’hui, nous ne pouvons qu’être heureux. Nous avons rencontré des femmes qui gèrent aujourd’hui leurs comptes. Certains sont même des fonctionnaires. C’est une fierté .
INTERVIEW REALISEE A BOUAKE PAR

MARCELLINE GNEPROUST

La Dren annonce une sensibilisation accrue
Tâche ardue, mais réalisable selon la directrice régionale de l’Éducation nationale (Dren), Mme Coffie Babadjiho Angèle qui annonce des campagnes de sensibilisation accrues auprès des leaders communautaires, religieux, des mutuelles de développement, dans les gares routières et les marchés.

Mme Coffie Angèle a contribué au renforcement des capacités des coordonnateurs. (PHOTOS : JOSÉPHINE KOUADIO)
Mme Coffie Angèle a contribué au renforcement des capacités des coordonnateurs. (PHOTOS : JOSÉPHINE KOUADIO)



Trois mois après son arrivée dans le Gbêkê, la directrice en charge des villes de Bouaké, Sakassou, Béoumi et Botro a effectué une visite de terrain qui lui a permis de prendre le pouls de la situation. Après avoir noté les besoins en matériels didactiques et informatiques, elle a procédé, dit-elle, au rafraîchissement des locaux de la supervision de l’alphabétisation, contribué au financement du renforcement des capacités des conseillers, ainsi que l’organisation des tournées du superviseur. Tout ceci, « dans la mesure de mes possibilités », dit-elle.

Elle a salué les efforts de ses collaborateurs qui ont permis d’avoir 42 promoteurs, 62 animateurs et 63 centres répartis comme suit, à savoir, 38 pour le niveau 1, 17 pour le niveau 2 et 8 pour la post-alpha. Plus de 50% sont des femmes.

Savoir lire et écrire, en plus d’être bénéfique pour l’apprenant, rejaillit positivement selon elle, sur la famille. Car, ne dit-on pas que la femme en est le socle ?

M. GNEPROUST

Le 31/01/21 à 09:08
modifié 31/01/21 à 09:08